Gilbert Montagné, figure emblématique de la chanson française, est au cœur d’une polémique judiciaire qui ébranle sa réputation. Le tube « On va s’aimer », qui a rythmé des décennies de soirées festives, est accusé d’être une contrefaçon.
Affaire Montagné : comment définir le plagiat en matière musicale ?
Décryptage d’un psychodrame judiciaire qui s’étend sur des décennies et implique non seulement le chanteur, mais également son parolier Didier Barbelivien et les rouages complexes du droit d’auteur.
Un refrain accusateur
12 décembre 2024. La cour d’appel de Paris confirme ce que beaucoup suspectaient depuis des années : « On va s’aimer » ressemble étrangement à « Une fille de France », une chanson italienne sortie en 1976. La mélodie, signée Michel Cywie, et les paroles co-écrites par Jean-Max Rivière et… Didier Barbelivien lui-même, auraient servi de base à la composition du tube. Ironie tragique, le parolier est à la fois accusé et victime dans cette affaire.
La condamnation en France, qui suit celle prononcée par la justice italienne en 2008, scelle le sort du morceau. Gilbert Montagné et Didier Barbelivien perdent définitivement leurs royalties sur cette chanson emblématique, estimées à plusieurs centaines de milliers d’euros. La justice italienne avait même évalué le préjudice à 1,6 million d’euros, somme finalement réduite après des recours.
Plagiat : les rouages du droit d’auteur
Mais comment prouve-t-on un plagiat en matière musicale ? Le droit repose sur plusieurs éléments :
- Similitudes mélodiques : La comparaison entre les deux morceaux est essentielle. Ici, le refrain est au cœur du litige.
- Expertises musicales : Des musicologues analysent les partitions pour détecter les correspondances dans les accords, les rythmes et les structures.
- Intentionnalité : Bien qu’elle soit difficile à prouver, une répétition flagrante peut suffire.
- Jurisprudence internationale : Dans le cas présent, la décision italienne a lourdement pesé sur l’issue en France.
Un tableau résume les critères utilisés pour établir un plagiat dans une œuvre musicale :
Critères | Description | Rôle dans l’affaire Montagné |
---|---|---|
Mélodie | Analyse des notes et accords | Refrain presque identique |
Rythme | Étude des motifs rythmiques | Rythme similaire sur certaines mesures |
Harmonie | Analyse des progressions harmoniques | Correspondances dans les tonalités |
Contexte | Historique de la création de l’œuvre contestée | Barbelivien impliqué dans les deux |
Les répercussions pour Montagné
Désormais, Gilbert Montagné ne touchera plus que ses droits d’interprète. Quant à Didier Barbelivien, il conserve des droits sur « Une fille de France », une maigre consolation après cette débâcle judiciaire. L’affaire, cependant, n’est pas close. En décembre 2024, l’avocat de Montagné, Gilles-William Goldnadel, annonce un pourvoi en cassation.
Montagné, pourtant habitué aux coups durs, reste discret. « Peut-être au refrain, ça se ressemble un peu », a-t-il concédé à demi-mot. Cependant, les faits parlent d’eux-mêmes. Les plateformes de streaming et la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) sont désormais contraintes de redistribuer les revenus à ceux qui, selon la justice, en sont les véritables créateurs.
Un tournant dans la jurisprudence française
Cette affaire, bien que spectaculaire, n’est pas unique. Le plagiat musical est un problème récurrent dans l’industrie. La décision de la cour d’appel de Paris marque un tournant, rappelant que la création musicale repose sur des droits stricts et que l’inspiration ne doit jamais frôler la copie.
Les leçons pour les artistes sont claires : dans un monde de plus en plus connecté, chaque note et chaque accord peuvent être passés au crible. Les œuvres, aussi populaires soient-elles, ne sont pas à l’abri de réclamations tardives. Pour Montagné et Barbelivien, cette affaire restera comme une ombre sur une carrière par ailleurs lumineuse.