Lombalgie : peut-on se priver de professionnels qualifiés ?

Le 16 octobre 2023, journée mondiale de la colonne vertébrale, l’Association Française de Chiropraxie (AFC) appelle l’attention de tous sur la lombalgie et sur le meilleur recours à la chiropraxie pour la traiter.

Audrey Yargui
Par Audrey Yargui Publié le 17 octobre 2023 à 4h30
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Lombalgie : peut-on se priver de professionnels qualifiés ? - © Economie Matin
20%la lombalgie représente 20% des accidents du travail

La lombalgie, une épidémie mondiale appelant la mobilisation de tous les professionnels qualifiés

« L'épidémie mondiale de lombalgie s'intensifie », pouvait-on lire dans l’éditorial The Lancet Rhumatology, en juin dernier. « En 2020, 619 millions de personnes dans le monde souffraient de lombalgie (soit près de 10 % de la population mondiale), et ce chiffre devrait atteindre 843 millions d'ici à 2050 ».

En France, selon les données de l’Assurance maladie, la lombalgie représente 20% des accidents du travail et est la première cause d’inaptitude avant 45 ans.

Peut-on, en toute conscience, se priver de toutes les forces, de toutes les compétences professionnelles qui peuvent être valablement mobilisées pour faire face à ce fléau ?

En 2019 et en 2020, deux études, parues dans le Bristish medical journal et dans Spine confortent l’efficacité des manipulations vertébrales sur la lombalgie chronique, en termes de diminution de la douleur et d’amélioration de la mobilité. Plus récemment encore, une étude de 2022 publiée dans Chiropractic and manual therapies, met en exergue le fait que l’approche chiropratique permet de limiter l’utilisation des anti-inflammatoires, des infiltrations et de réduire les hospitalisations.

Nous, chiropracteurs, sommes titulaires d’un diplôme de premier cycle (niveau bac +5, 300 ETCS) reconnu par le ministère de la santé et celui de l’enseignement supérieur et de la recherche. Nous sommes des professionnels de la santé responsables, compétents et efficaces souhaitant être mieux intégrés dans la trajectoire de soins aux usagers.

Car par le fait, si la chiropraxie a été reconnue dès 2002 par le ministère de la Santé, plus de 20 ans plus tard, notre intégration au système de santé est encore balbutiante. Localement, des initiatives pluriprofessionnelles fleurissent, en centres hospitaliers universitaires notamment. En médecine de ville aussi, où des collaborations se nouent autour du seul intérêt du patient. Reste que ces initiatives ne trouvent pas d’échos auprès des décideurs, elles continuent donc d’évoluer en marge du système de soin balisé par les autorités sanitaires.

Pourtant, nous constatons que les troubles neuro-musculosquelettiques, au premier rang desquels la lombalgie, concernent un grand nombre de consultations dans les services d’urgences hospitalières tout comme en médecine de ville ; sans compter l’impact socio-économique (coût de santé, absentéisme au travail, arrêts maladies au long court).

Or, grâce à leur expertise en santé neuro-musculosquelettique, les chiropracteurs peuvent contribuer à leur échelle au désengorgement du système de soins, améliorer les services à la population (récupération plus rapide), faire chuter la chronicité des pathologies associées et permettre un retour à la vie sociale et au travail. Etant précisé que plus la prise en charge du patient tarde à se mettre en place, plus ce dernier s’expose à ce que sa condition devienne chronique, les troubles neuro-musculosquelettiques ont en effet un impact tant sur la vie sociale, familiale que professionnelle. Aussi, la longueur des délais de consultation retarde le retour au travail et à la vie normale, ce qui a un impact économique en termes de coût des arrêts de travail et des soins conventionnés entre autres.

A l’étranger, des expériences concluantes de prise en charge pluridisciplinaire

Pour appuyer notre discours, nous nous inspirons, entre autres, du modèle des cliniques d’accès rapide pour le traitement des lombalgies, en Ontario.

Le patient est d’abord évalué par un praticien en soins avancés (un chiropracteur, un physiothérapeute ou un infirmier praticien spécialement formé) qui se trouve près de chez lui. Le praticien en soins avancés fait une évaluation complète et normalisée du patient et produit un plan d’autogestion personnalisé pour l’aider à gérer sa douleur. Les patients qui sont des candidats potentiels à la chirurgie sont aiguillés par leur praticien en soins avancés vers un responsable des pratiques pour une évaluation plus en profondeur et pour la prise en charge. Les responsables des pratiques sont des professionnels de la santé travaillant à l’hôpital (des chiropracteurs, des physiothérapeutes ou des infirmiers praticiens) qui sont spécialement formés par des chirurgiens de la colonne vertébrale pour mieux évaluer et traiter les candidats potentiels à la chirurgie. Le responsable des pratiques fait des demandes d’imagerie diagnostique (p. ex. IRM), recommande les interventions avancées appropriées (p. ex. infiltrations rachidiennes) et aiguillera les patients vers un chirurgien si cela est indiqué. Et les résultats sont là. Délais de prise en charge raccourcis, baisse du recours aux IRM, diminution des délais de consultations, et conséquemment, forte augmentation de la satisfaction des patients.

Plus proche de nous, de tels modèles pluridisciplinaires d’évaluation et de prise en charge des TNMS, incluant les chiropracteurs, existent. C’est le cas notamment au Danemark, où le Spine Center of Southern Denmark, de l’hôpital universitaire de Lillebaet, suit une démarche assez proche, et tout aussi pluriprofessionnelle. Diagnostiquer et traiter les patients qui présentent des désordres vertébraux, pour améliorer leur qualité de vie, tel est l’objectif déclaré de cette structure hospitalière de pointe qui accueille 14000 de ses patients dans son service de médecine du rachis, où ils sont pris en charge par 6 rhumatologues, 13 chiropracteurs, 28 kinésithérapeutes et 13 infirmières. Les cas les plus critiques sont quant à eux orientés dans le service de chirurgie du rachis. Naturellement, les services de médecine et de chirurgie coopèrent au bénéfice du patient, en amont et en aval des actes chirurgicaux. Ce centre est aussi un lieu de recherche clinique en médecine et en chirurgie du rachis.

En France, peut-on imaginer que les lignes bougent ?

Attachés à la pluridisciplinarité des prises en charge et à la collaboration interprofessionnelle, les chiropracteurs pourraient s’inscrire dans le parcours de soins comme ils le font dans de nombreux pays. Notons qu’en Suisse, les chiropracteurs comptent parmi les professions médicales. A cet égard, les recommandations du tout récent rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, portant notamment sur l’intégration des chiropracteurs parmi les professionnels de santé, nous apparaissent légitimes. Cette intégration est de longue date au cœur des revendications des représentants des chiropracteurs, qui souhaitent assurer la meilleure qualité de soin possible aux usagers de la chiropraxie.

En cette Journée mondiale de la colonne vertébrale, formons donc le vœu que les décideurs soient à l’écoute des propositions vertueuses formulées par l’Igas. Dans cette attente, les chiropracteurs organisent cette année encore une campagne de promotion de la santé musculosquelettique. Ils accueilleront bénévolement nos concitoyens dans leur cabinet pour leur proposer un bilan vertébral offert sur rendez-vous.

Pour plus de renseignement sur cette opération 

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Audrey Yargui

Audrey Yargui est présidente de l’Association française de chiropraxie.

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