Le marché mondial de l’armement connaît une transformation majeure. Selon le dernier rapport de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), publié le 10 mars 2025, les exportations et importations d’armes ont subi des changements spectaculaires entre 2020 et 2024. La guerre en Ukraine, la montée des tensions internationales et l’incertitude géopolitique ont bouleversé l’équilibre des puissances. Quels pays dominent aujourd’hui ce secteur ?
Les ventes d’armes en 2024 : les USA dominent, la France numéro 2
L’armement mondial poursuit son essor et l’Europe, face aux tensions grandissantes avec la Russie, en est l’un des principaux moteurs. D’après le dernier rapport du SIPRI, couvrant la période 2020-2024, les importations d’armes des pays européens membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ont bondi de 105 % par rapport à la période précédente (2015-2019). Les États-Unis confirment leur domination sur le marché avec 43 % des exportations mondiales, tandis que la France consolide sa deuxième place avec un triplement de ses ventes sur le continent européen. De son côté, l’Ukraine devient le premier importateur d’armes au monde, sans réelle surprise après trois ans de conflit.
Industrie de la Défense : Une explosion des ventes d’armes en Europe
L’OTAN en quête de sécurité face à la Russie
L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 a transformé le paysage sécuritaire européen. Les États européens ont massivement renforcé leurs capacités militaires, entraînant une hausse spectaculaire des importations d’armes. Selon le SIPRI, les importations d’armes des membres de l’OTAN en Europe ont plus que doublé en cinq ans (+105 %).
Le chercheur Pieter Wezeman du SIPRI souligne que cette course à l’armement est une réponse directe à « une Russie de plus en plus belliqueuse » et à la nécessité pour les pays européens de moderniser leur défense. Le principal bénéficiaire de cette ruée vers l’armement : les États-Unis, qui fournissent 64 % des armes importées en Europe.
L’Ukraine, premier importateur d’armes mondial
En cinq ans, l’Ukraine est passée du statut de pays importateur marginal à celui de plus grand acheteur d’armes sur la planète. Entre 2020 et 2024, les importations d’armes ukrainiennes ont été multipliées par 100 par rapport à la période 2015-2019.
Ce boom est principalement dû aux livraisons massives d’armes occidentales, notamment américaines (45 % des armes livrées à Kiev), mais aussi allemandes et polonaises. L’Ukraine représente aujourd’hui 8,8 % des importations mondiales d’armes.
Armement : Les États-Unis, indétrônables premiers exportateurs
Un quasi-monopole sur le marché des armes
Les États-Unis conservent leur rang de premier exportateur mondial d’armes avec 43 % de parts de marché. Ils devancent largement la France (deuxième, avec une part environ quatre fois plus faible) et la Russie (troisième, en fort déclin).
Principaux clients des États-Unis entre 2020 et 2024 :
- L’Europe (35 % des exportations américaines), avec de nombreuses ventes d’avions de combat F-35, de systèmes anti-aériens Patriot et d’autres équipements lourds.
- Le Moyen-Orient (33 %), où l’Arabie saoudite reste le plus gros acheteur, malgré une baisse des importations d’armes dans la région.
- L’Asie-Pacifique, où des pays comme le Japon et l’Australie continuent à investir massivement dans leur défense.
Une Europe qui finance le complexe militaro-industriel américain
L’un des aspects marquants du rapport SIPRI est la forte dépendance des pays européens vis-à-vis de l’armement américain. En cinq ans, l’Europe est devenue le principal client des États-Unis, avec 35 % de leurs exportations d’armes.
Pourquoi une telle dépendance ? Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
- L’absence d’une industrie européenne de l’armement unifiée. Malgré des initiatives comme le projet SCAF (Système de Combat Aérien du Futur), les Européens peinent à produire leurs propres équipements.
- Le besoin urgent de matériel opérationnel. Les pays européens ont préféré acheter sur étagère plutôt que développer leurs propres armes.
- L’intégration des industries de défense. Les avions F-35 américains, par exemple, intègrent des composants fabriqués en Europe, ce qui renforce les liens transatlantiques.
Pieter Wezeman, chercheur au SIPRI, souligne que « changer cela demanderait un investissement politique et financier énorme », et que la dépendance à Washington n’est pas près de s’arrêter.
La France, deuxième exportateur mondial grâce à ses avions
Un succès porté par le Rafale
La France se maintient au deuxième rang mondial des exportateurs d’armes, loin derrière les États-Unis mais devant la Russie. Ses exportations ont triplé en Europe, notamment grâce à la vente de Rafale à la Grèce et à la Croatie.
Principaux clients de la France (2020-2024) :
- L’Inde (28 % des exportations françaises), qui reste le principal client de la France.
- Les pays européens (15 %), principalement pour des avions de combat et des missiles.
- L’Ukraine, qui a bénéficié d’un soutien militaire accru.
La Russie en chute libre
Autre fait marquant du rapport SIPRI : les exportations d’armes russes ont plongé de 64 % sur la période 2020-2024. En cause :
- Les sanctions internationales.
- L’utilisation des ressources militaires russes pour la guerre en Ukraine.
- La pression des États-Unis et de leurs alliés pour éviter l’achat d’armes russes.
Les chiffres du SIPRI sont clairs : les exportations américaines dominent largement le marché, l’Europe reste sous dépendance américaine et la guerre en Ukraine a bouleversé les équilibres mondiaux en matière d’armement. La France, bien que loin derrière les États-Unis, tire son épingle du jeu avec des ventes records de Rafale. L’armement est plus que jamais un enjeu stratégique mondial. Face à cette militarisation croissante, l’Europe prendra-t-elle un jour son indépendance vis-à-vis des États-Unis ?