Intel : les méga-usines pour microprocesseurs en Europe retardées

Le géant américain des microprocesseurs, Intel, avait prévu de construire des usines de semi-conducteurs à Magdebourg, en Allemagne, et en Pologne, avec une ouverture initialement prévue en 2025. Cependant, le 16 septembre 2024, Intel a officiellement annoncé un report de deux ans, repoussant la date d’inauguration à 2027. Cette décision a pris de court les gouvernements concernés, en particulier l’Allemagne, qui avait mis en place un programme de subventions de grande envergure pour attirer cet investissement stratégique.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 17 septembre 2024 à 11h00
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14%Intel a annoncé un chiffre d'affaires global en baisse de 14 %, à 54,2 milliards de dollarspour 2023

Intel : un report dû à des prévisions de demande mondiale révisées

Intel a justifié ce retard par une réévaluation de la demande mondiale de semi-conducteurs. Selon un communiqué de la firme, les prévisions de consommation sur le marché des puces électroniques ont été revues à la baisse, ce qui a contraint l'entreprise à ajuster son calendrier de production. Si le projet n'est pas annulé, Intel insiste sur le fait que ce report est une décision purement commerciale, et non liée à des problématiques techniques ou géopolitiques. La société a souligné que ses plans en Europe restent inchangés, mais que le contexte économique mondial impose des ajustements.

« Cette décision repose sur une révision des besoins mondiaux en semi-conducteurs. Le ralentissement de la demande nous a amenés à repousser le calendrier de production », a déclaré un porte-parole d'Intel lors de l'annonce. Le marché des semi-conducteurs, longtemps en surchauffe à cause de la pénurie mondiale, semble retrouver un équilibre qui impacte désormais la capacité d'investissement des entreprises du secteur.

Les réactions en Allemagne : déception et inquiétudes pour les usines

En Allemagne, où la ville de Magdebourg devait accueillir l'une des usines, la nouvelle a été accueillie avec une certaine déception. Le gouvernement allemand, sous la houlette du chancelier Olaf Scholz, avait activement soutenu l’installation d’Intel en promettant des subventions d'environ dix milliards d’euros pour attirer l’entreprise. La construction de l'usine faisait partie d'une stratégie plus large visant à renforcer la souveraineté technologique de l'Europe, notamment dans le domaine des semi-conducteurs.

« C'est une déception, mais le projet n'est pas annulé. Intel continue d’investir en Allemagne et nous restons optimistes quant à la réalisation de cette usine stratégique pour l’avenir industriel de l’Europe », a réagi Olaf Scholz lors d’une conférence de presse. Cependant, certains acteurs politiques ont exprimé des inquiétudes sur la dépendance excessive de l’Allemagne vis-à-vis des entreprises américaines pour des projets technologiques clés.

D'autres responsables, comme le ministre allemand de l’Économie, Robert Habeck, ont également tenté de minimiser l’impact de cette annonce, affirmant que la décision d'Intel est avant tout commerciale et que les relations entre l’Allemagne et l’entreprise restent excellentes. « La décision d'Intel est purement commerciale, elle reflète les ajustements nécessaires dans un marché en constante évolution », a déclaré Robert Habeck dans une interview. « L'engagement d'Intel envers Magdebourg est intact, mais il est normal qu'une entreprise de cette envergure ajuste ses plans en fonction des fluctuations du marché mondial. »

Industrie : un revers pour l’Europe, mais des enjeux qui demeurent

Pour l'Europe, ce report représente un défi supplémentaire dans sa quête de souveraineté technologique. L'Union européenne avait fait de la production locale de semi-conducteurs une priorité stratégique dans le cadre de son "Chips Act", visant à doubler la part de l'Europe dans la production mondiale de semi-conducteurs d'ici 2030.

L’objectif de l’Europe est de réduire sa dépendance aux importations asiatiques, principalement de Taïwan et de la Corée du Sud, qui dominent actuellement ce marché. Le report du projet d’Intel, combiné aux retards d’autres acteurs majeurs comme TSMC, pourrait freiner cette ambition. La concurrence mondiale pour attirer des investissements dans la fabrication de puces est féroce, et ce report pourrait affecter la capacité de l’Europe à rattraper son retard.

Selon des experts de l’industrie, ce délai de deux ans pourrait également permettre à l'Europe de repenser ses stratégies d'investissement dans les semi-conducteurs, notamment en encourageant le développement de compétences locales et en diversifiant les partenariats technologiques.

La Pologne devra aussi attendre son usine Intel

Outre l’Allemagne, la Pologne est également concernée par ce report, bien que dans une moindre mesure. L'usine polonaise, qui devait voir le jour dans les prochaines années, est également repoussée à 2027. Cependant, le gouvernement polonais n’a pas encore réagi officiellement à cette annonce. Il est probable que les autorités polonaises, comme leurs homologues allemands, réévaluent leur stratégie de subventions pour soutenir ce projet.

Le report des deux usines européennes s’inscrit dans un contexte mondial complexe, où les priorités économiques et industrielles sont en perpétuelle mutation. Pour Intel, ce délai semble avant tout une manière de se donner le temps nécessaire pour ajuster ses capacités de production aux fluctuations du marché.

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Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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