Les chiffres sont implacables. En 2023, les femmes du secteur privé en France ont perçu en moyenne un salaire inférieur de 22,2 % à celui des hommes. Une situation qui perdure malgré les discours sur l’égalité professionnelle. Faut-il en conclure que les entreprises sont fondamentalement sexistes ? Ou bien ces écarts traduisent-ils un système plus insidieux et ancré dans l’organisation du travail ?
Inégalités salariales : les hommes gagnent 22 % de plus que les femmes en France
Une inégalité persistante malgré des décennies de lois : L'INSEE confirme les écarts de salaire entre hommes et femmes en France
Le 4 mars 2025, l’INSEE a publié une étude qui confirme que rien ne va : en 2023, les femmes du secteur privé ont gagné en moyenne 21 340 euros nets par an, soit 22,2 % de moins que leurs homologues masculins (27 430 euros nets). Certes, cet écart s’est réduit d’un tiers depuis 1995, notamment grâce à des avancées législatives et une prise de conscience progressive. Mais la dynamique reste lente, avec une réduction annuelle d’environ 1 point de pourcentage depuis 2019.
Alors, comment expliquer une telle disparité en 2025 ? L’étude pointe d’abord un volume de travail inférieur de 9,3 % pour les femmes, en raison d’un recours accru au temps partiel. Mais même à temps de travail égal, l’écart de rémunération demeure à 14,2 %. Et pour un même emploi exercé dans le même établissement, il atteint encore 3,8 %. Une situation qui met en lumière un problème structurel.
Salaire : Pourquoi les femmes gagnent-elles moins ?
L’INSEE identifie un facteur clé : la répartition genrée des métiers. En clair, les femmes ne travaillent pas aux mêmes postes que les hommes. Prenons l’exemple des secrétaires, une profession composée à 95,3 % de femmes, où le salaire net moyen à temps plein plafonne à 2 044 euros par mois. À l’inverse, les ingénieurs et cadres en informatique, des professions où les hommes représentent 74,3 % des effectifs, bénéficient d’une rémunération moyenne de 3 985 euros nets par mois.
Même lorsque les femmes accèdent à des postes mieux rémunérés, elles restent sous-représentées aux plus hauts niveaux de responsabilité. Parmi les 1 % des emplois les mieux rémunérés, seules 24 % sont occupées par des femmes. Un plafond de verre qui semble infranchissable malgré les discours sur la mixité en entreprise.
Comparaison des salaires selon les métiers fortement féminisés et masculinisés en 2023
Profession | Pourcentage de femmes | Salaire moyen net mensuel (temps plein) |
---|---|---|
Secrétaire | 95,3 % | 2 044 euros |
Aide à domicile | 97,5 % | 1 800 euros |
Cadre administratif en PME | 56,4 % | 4 432 euros |
Ingénieur et cadre en informatique | 25,7 % | 3 985 euros |
Salaire : Un écart qui se creuse avec l’âge et le nombre d’enfants
Maternité et carrière : le double fardeau des femmes
Autre donnée frappante : plus une femme avance en âge, plus l’écart salarial avec un homme du même âge s’accroît. Chez les moins de 25 ans, la différence est de 4,3 %. Mais à partir de 60 ans et plus, elle atteint 24,9 %. En cause ? Une évolution de carrière ralentie, des opportunités de promotion moins fréquentes et le fameux "coût" de la maternité.
Car en 2023, avoir des enfants reste un frein professionnel majeur pour les femmes. Celles qui n’en ont pas gagnent 13,8 % de moins que les hommes, un écart qui bondit à 40,9 % pour celles qui ont trois enfants ou plus. Malgré les dispositifs visant à mieux partager les congés parentaux, les interruptions de carrière restent plus fréquentes chez les mères que chez les pères. Une inégalité invisible qui se traduit ensuite sur la fiche de paie.
Comment réduire ces inégalités salariales ?
Face à cette situation, plusieurs solutions sont avancées. Certaines entreprises ont mis en place des audits internes pour identifier les écarts de salaire injustifiés. La publication de l’Index d’égalité professionnelle, obligatoire pour les sociétés de plus de 50 salariés, a permis d’exposer certaines pratiques discriminatoires.
Mais cela reste insuffisant. Le rapport de l’INSEE recommande trois leviers d’action prioritaires :
- Revaloriser les métiers à prédominance féminine, notamment dans le soin et le service à la personne.
- Encourager un accès égal aux promotions et postes de direction.
- Renforcer l’accompagnement des femmes après un congé maternité pour éviter la stagnation des carrières.
Les associations féministes, elles, réclament des sanctions financières contre les entreprises qui ne respectent pas les engagements en matière d’égalité salariale. Mais pour l’instant, les politiques publiques se contentent d’incitations plutôt que de mesures coercitives.
La France n’est toujours pas le pays de l’égalité
En 2025, les inégalités salariales en France restent une réalité tenace. Si l’écart se réduit lentement, il demeure marqué par des inégalités structurelles : la répartition genrée des métiers, la maternité, et un plafond de verre toujours solide. Tant que ces mécanismes ne seront pas brisés, les femmes continueront d’être payées moins que les hommes, et ce, quelles que soient leurs compétences ou leurs ambitions.
La question est simple : combien de décennies faudra-t-il encore pour que "à travail égal, salaire égal" devienne enfin une réalité ?