Impôts : 9 Français sur 10 craignent encore des augmentations

Chaque année, la déclaration de revenus (impôts) ressurgit dans les agendas comme un passage obligé. Mais que se passe-t-il quand les citoyens eux-mêmes doutent de son utilité ? Une nouvelle étude soulève une question brûlante : les Français savent-ils encore pourquoi ils paient des impôts ?

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 11 avril 2025 14h31
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65 %65 % des Français estiment qu’ils n’en ont pas pour leur argent lorsqu’ils paient des impôts.

En ce début d’avril 2025, une nouvelle étude vient bousculer les fondements d’un des piliers de la République : le consentement aux impôts. Publiée conjointement par Odoxa, BFM Business et Capital, l’enquête dévoile un mal-être fiscal profond et un désintérêt croissant pour la logique redistributive censée justifier la contribution de chacun. À travers un ensemble de chiffres tranchants et d’indicateurs révélateurs, elle met en lumière une fracture entre l’administration fiscale et les contribuables. Dans un pays qui détient le triste record mondial de la pression fiscale, la question n’est plus seulement technique, elle devient politique.

Une défiance fiscale majoritaire en France

Ce vendredi 11 avril 2025, un baromètre Odoxa révèle une tendance aussi inquiétante qu’éloquente : 65 % des Français estiment qu’ils n’en ont pas pour leur argent lorsqu’ils paient des impôts. Un chiffre qui traduit une crise du consentement fiscal, où le rapport entre ce que l’on verse et ce que l’on reçoit devient flou, voire insatisfaisant pour une majorité de contribuables.

Encore plus frappant, seuls 56 % des Français affirment comprendre à quoi servent leurs impôts. La défiance ne naît pas uniquement d’un sentiment d’injustice, mais aussi d’un brouillard opaque sur le fonctionnement même de la fiscalité.

Il est pourtant crucial de le rappeler : les impôts servent à financer des services publics essentiels, comme les hôpitaux, écoles, infrastructures, sécurité, armée, et à maintenir un système de solidarité nationale, incluant retraites, aides sociales et couverture maladie. Ce sont les rouages d’une démocratie sociale qui s’effritent aux yeux de ceux qui les financent.

Des chiffres qui confirment l’essoufflement du modèle des impôts français

L’hexagone ne détient pas un simple record symbolique : selon l’OCDE, la France est bel et bien le pays le plus imposé du monde en proportion de la richesse produite. Ce niveau d’imposition historique pourrait expliquer pourquoi 84 % des Français sont persuadés que leurs impôts ont augmenté ces dernières années, et 92 % anticipent qu’ils continueront à grimper dans un avenir proche.

Cette pression fiscale, de plus en plus mal acceptée, se heurte à un contexte socio-économique marqué par la rigueur budgétaire, les alertes sur la dette publique et un service public dont la qualité perçue semble se dégrader.

Face à cela, les propositions de nouvelles hausses d’impôts passent mal. Toujours selon le baromètre Odoxa, les préférences fiscales des Français varient fortement selon leur profil : près de 39 % d’entre eux accepteraient davantage une fiscalité accrue sur les produits d’épargne, contre 30 % qui privilégieraient une augmentation des impôts sur le revenu, et 28 % qui opteraient pour une majoration de la TVA. Ce morcellement des opinions illustre une impasse politique : aucun levier fiscal ne parvient à susciter un large consensus.

L’épargne : miroir de l’inquiétude des Français

La défiance fiscale se reflète aussi dans le comportement des épargnants. Selon la même étude, 62 % des Français déclarent être inquiets du rendement de leur épargne. Et pour cause : les deux placements les plus populaires, à savoir le Livret A et l’assurance-vie, n’ont cessé de décevoir les épargnants au cours des derniers mois. Ce désintérêt croissant est d’ailleurs mesurable : 43 % des Français ont déjà déserté le Livret A, et six sur dix affirment qu’ils pourraient l’abandonner totalement si son taux venait à baisser encore.

Ce climat d’inquiétude est alimenté par un contexte mondial instable, mais aussi par la crainte d’une nouvelle fiscalisation de ces produits d’épargne. Un tel scénario serait mal vécu : la taxation de l’épargne ne recueillerait l’adhésion que d’une minorité, et ce rejet serait comparable à celui de l’impôt sur le revenu ou de la TVA, qui ne convainquent pas davantage.

Calendrier fiscal 2025 : le rendez-vous inévitable des impôts

Comme chaque printemps, la déclaration de revenus s'est ouverte pour des millions de contribuables. Cette opération, largement dématérialisée, se fait sur le site impots.gouv.fr et s’inscrit désormais dans le cadre du prélèvement à la source, un mécanisme censé lisser le paiement tout au long de l’année.

Selon les informations disponibles sur le portail du Ministère de l’Économie, les recettes issues de l’impôt sur le revenu alimentent essentiellement les services publics, les prestations sociales et les investissements publics. En 2023, près d’un quart de l’impôt sur le revenu collecté, soit 18 milliards d’euros, a été reversé aux contribuables sous forme de réductions et crédits d’impôt, comme l’a précisé la ministre Amélie de Montchalin.

Parmi les mesures fiscales actuellement mobilisables pour alléger la charge déclarative, on retrouve notamment la déduction des pensions alimentaires versées pour un enfant majeur, dans la limite de 6 974 euros, le crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile, qui couvre 50 % des dépenses dans la limite de 12 000 euros, ou encore celui pour garde d’enfants hors domicile plafonné à 1 750 euros. D’autres dispositifs s’appliquent à la scolarité des enfants, avec des réductions allant de 61 à 183 euros selon le niveau d’étude, aux frais liés à la dépendance en établissement (jusqu’à 10 000 euros de dépenses), ou encore aux dons faits aux associations, qui permettent une réduction de 75 % jusqu’à 1 000 euros, et de 66 % au-delà, dans la limite de 20 % du revenu imposable.

Mais malgré cette panoplie d’ajustements techniques et incitatifs, une question lancinante persiste : les citoyens ont-ils encore le sentiment que leur contribution fiscale s’accompagne d’un juste retour en services publics ? Ou bien l’impôt, autrefois outil de justice sociale, est-il devenu pour eux une ponction sans contrepartie ?

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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