Impôt sur les hauts revenus : la mesure temporaire devient permanente

Le ministère de l’Économie a confirmé une décision attendue le 13 avril 2025. L’impôt différentiel sur les hauts revenus, présenté initialement comme temporaire, sera non seulement maintenu mais intégré durablement au système fiscal français. Derrière ce revirement, un objectif affiché : remettre à l’ordre du jour la notion d’équité dans l’impôt. Un symbole ? Peut-être. Une stratégie budgétaire ? Assurément.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 14 avril 2025 18h30
Impôt sur les hauts revenus : la mesure temporaire devient permanente
Impôt sur les hauts revenus : la mesure temporaire devient permanente - © Economie Matin
2 milliards €Les recettes escomptées s’élèveraient à environ 2 milliards d’euros par an, selon les projections de Bercy

Pérennisation de l'impôt : un changement assumé

C’est officiel. Ce qui devait durer deux ans ne s’arrêtera pas en 2026. La « contribution exceptionnelle sur les hauts revenus », mise en place dans le cadre du budget 2025 par Michel Barnier, va devenir une composante structurelle de la fiscalité française. François Bayrou, désormais à la tête du gouvernement, a validé cette orientation.

Et c’est Éric Lombard, ministre de l’Économie, qui l’a confirmé : « Ce gouvernement n’avait pas fait cette promesse », a-t-il lancé dans des propos rapportés par Le Figaro, tout en assumant vouloir « soit maintenir, soit retravailler » la mesure dans le cadre du futur budget 2026. Ce nouvel impôt plancher de 20 % concerne les ménages déclarant plus de 250  000 euros annuels pour un célibataire et 500  000 euros pour un couple sans enfant. Il cible uniquement les contribuables dont le taux moyen d’imposition est inférieur à ce seuil.

Un outil contre l’optimisation fiscale

Si cette contribution a changé de statut, elle a aussi changé de vocation. D’un mécanisme budgétaire ponctuel, elle devient « un outil de lutte contre les sur-optimisations fiscales », selon les mots de Bercy, repris le 13 avril 2025 dans Le Figaro. En clair, l’objectif est de refermer les interstices juridiques qui permettent à certains contribuables très aisés d’échapper à une fiscalité pourtant déjà progressive.

L’Économie ne cache pas sa cible : « Certaines personnes [...] ont une moyenne d’imposition inférieure à celle des Français », observe Éric Lombard. Et de conclure : « Nous demandons beaucoup d’efforts à toutes et à tous. Ce signal de solidarité me semble nécessaire. ». D’un point de vue technique, la règle est claire : si un foyer relevant du barème n’atteint pas un taux moyen de 20 %, la différence est recouvrée par le Trésor public. Un dispositif correctif, non pas un prélèvement supplémentaire, insiste le ministère.

Des milliards pour peu de contribuables

Le nombre de foyers fiscaux concernés est restreint : quelques dizaines de milliers selon les données officielles. Pourtant, les recettes escomptées s’élèveraient à environ 2 milliards d’euros par an, selon les projections de Bercy. Un chiffre modeste face à l’effort de 40 à 50 milliards d’euros supplémentaires annoncé pour 2026, mais politiquement significatif.

Pourquoi alors tant d’agitation pour une mesure aussi ciblée ? Parce qu’elle établit une ligne rouge, celle entre optimisation et solidarité. Surtout, elle évite soigneusement d’aller plus loin. L’ISF (impôt de solidarité sur la fortune) ne fait pas son retour. Et le ministre le martèle : « Il est hors de question de toucher à l’outil de travail, et même de toucher à l’investissement dans les entreprises. ».

Une autre bataille fiscale en cours : le patrimoine

La question du patrimoine, elle, se joue sur un tout autre terrain. En février, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi du groupe écologiste visant à instaurer un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine, incluant les biens professionnels.

La mesure, bien plus large que la contribution sur les revenus, doit être examinée le 12 juin par le Sénat. Peu de chances qu’elle passe. Mais le débat est lancé. Le gouvernement, lui, temporise. Il préfère se concentrer sur les flux (les revenus), et non sur les stocks (le patrimoine), tout en esquivant la case symbolique du retour à l’ISF.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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