Hérault : la justice cloue au sol 31 éoliennes pour cause de massacre écologique

La tempête judiciaire souffle plus fort que le vent des turbines. Dans l’Hérault, un parc éolien flamboyant vient d’essuyer un revers cinglant. Le verdict ? Brutal. Les conséquences ? Potentiellement durables. Et si l’avenir des énergies renouvelables ne tenait qu’à un battement d’ailes ?

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 8 avril 2025 7h16
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@shutter - © Economie Matin
10,2%En 2023 les éoliennes ont produit 10,2% de l'électricité du pays.

Le 7 avril 2025, le tribunal judiciaire de Montpellier a rendu une décision qui fait date : l’arrêt immédiat de 31 éoliennes implantées sur le causse d’Aumelas, dans l’Hérault. Une suspension de quatre mois infligée à EDF Renouvelables et à neuf de ses filiales, épinglées pour leur responsabilité dans une surmortalité massive d’oiseaux protégés. En ligne de mire : le faucon crécerellette, emblème fragile d’un écosystème aujourd’hui broyé par des rotors en mouvement.

Un massacre silencieux orchestré par les pales des éoliennes

Les turbines géantes ne font pas que tourner. Elles tuent. C’est en tout cas ce qu’a démontré le tribunal montpelliérain, qui a retenu la destruction de 160 individus d’espèces protégées, notamment des faucons crécerellettes, des busards cendrés, et des chauves-souris. Un constat glaçant, corroboré par France Nature Environnement (FNE), qui estime même entre 150 et 300 le nombre de faucons tués depuis l’ouverture du parc.

Ces faucons migrateurs arrivent chaque année en avril pour se reproduire sur le causse d’Aumelas, un site classé Natura 2000. Malgré les dispositifs d’effarouchement installés par EDF, les cadavres se sont accumulés, forçant l’association FNE à porter plainte. Et à obtenir gain de cause.

Simon Popy, président de FNE Occitanie Méditerranée, n’a pas mâché ses mots relaye le Huffpost : « Avec ces éoliennes à l’arrêt, il n’y aura pas de nouvelle mortalité cette année, puisque les faucons crécerellettes arrivent en avril d’Afrique pour la nidification et repartent à la fin de l’été ».

La justice tranche : suspension, condamnation et amendes records

Le couperet est tombé net. Le parc est suspendu quatre mois avec exécution provisoire, à compter du 7 avril 2025. Plus encore, la décision judiciaire constitue une première au pénal contre un opérateur éolien.

Chaque société exploitante – au nombre de dix – a été condamnée à 500 000 euros d’amende, dont la moitié avec sursis. Le préjudice écologique est lui aussi chiffré : 74 087 euros seront versés à l’État, soit 1 800 euros par faucon tué. S’y ajoutent 114 000 euros de réparation morale à FNE OcMed, et autant à France Nature Environnement.

L’ancien PDG d’EDF Renouvelables, Bruno Bensasson, a écopé de six mois de prison avec sursis et 100 000 euros d’amende, dont 30 000 euros avec sursis, détaille Libération.

EDF contre-attaque : la guerre du vent est lancée

Face à cette avalanche de sanctions, EDF Renouvelables ne compte pas baisser les bras. Dans un communiqué, le groupe a annoncé avoir fait appel de la décision. Il plaide avoir mis en place des dispositifs de limitation des risques, tout en refusant d’effectuer une demande de dérogation à la législation environnementale, au motif que seul le préfet peut l’exiger.

Mais le tribunal a pointé une persistence fautive : selon la présidente du tribunal, les exploitants ont continué à fonctionner « hors du cadre légal » malgré des alertes répétées.

Un constat partagé par Olivier Gourbinot, coordinateur fédéral de FNE, qui dénonce : « Un groupe de premier plan est condamné pour destruction d’espèce protégée et pour son comportement à continuer à méconnaître le droit de l’environnement [...] une décision jamais vue, un signal fort ».

Éoliennes à l’arrêt : des conséquences pour la production d’énergie ?

Avec 31 turbines à l’arrêt, la production d’électricité du parc est mise entre parenthèses jusqu’à la fin août 2025. L’impact reste limité à l’échelle nationale, mais symboliquement, le choc est immense. Cette affaire relance le débat sur la compatibilité entre transition énergétique et protection de la biodiversité.

D’un côté, les défenseurs des renouvelables dénoncent un jugement contre-productif. De l’autre, les écologistes de terrain rappellent que l’urgence climatique ne justifie pas toutes les atteintes à la faune. Et qu’un projet vert ne peut être légalement gris.

L’affaire d’Aumelas deviendra-t-elle un précédent ? Un modèle de conciliation entre énergie et biodiversité ? Ou un casse-tête juridique récurrent pour les producteurs d’énergie ? Le vent, désormais, tourne.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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