Le phénomène du surendettement en France touche des milliers de ménages chaque année. En 2024, la Banque de France a dévoilé une augmentation du nombre de dossiers de surendettement, liée à la fragilité économique des ménages qui est en plein boom.
Surendettement : 7 ménages endettés sur 10 sont locataires
Une augmentation des dossiers de surendettement en France
Au cours des sept premiers mois de l'année 2024, la Banque de France a enregistré une hausse de 12 % des dossiers de surendettement déposés, atteignant un total de 81 184 dossiers. Cette augmentation, bien qu'elle soit inférieure aux chiffres de 2019, période prépandémique de référence, traduit une aggravation des difficultés financières rencontrées par de nombreux ménages.
Les causes de cette augmentation sont multiples, mais les principales raisons identifiées par la Banque de France dans son rapport publié le 13 août 2024 sont les suivantes :
- Changement de situation financière : 35,4 % des dossiers déposés au deuxième trimestre 2024 sont dus à un changement de situation financière, souvent lié à une augmentation des charges, notamment les coûts énergétiques et les frais de logement.
- Changement de situation professionnelle : Le chômage, les licenciements, ou les départs à la retraite constituent 28,5 % des causes de surendettement. Cette part, bien qu’en légère diminution par rapport à l'année précédente, demeure préoccupante.
- Changement de situation familiale : Les divorces, veuvages ou autres modifications de la structure familiale représentent 14,4 % des cas. Ces événements bouleversent souvent l’équilibre économique des ménages, les rendant vulnérables à l'accumulation des dettes.
Surendettement : des dettes omniprésentes
Les dettes liées aux charges courantes, incluant les loyers, l'énergie, et les communications, ainsi que les crédits à la consommation, sont omniprésentes dans trois quarts des dossiers de surendettement. En revanche, les dettes immobilières ne représentent que moins de 10 % des dossiers.
Les crédits à la consommation, autrefois plus répandus, sont aujourd'hui mieux encadrés par la législation, ce qui a contribué à limiter leur impact sur le surendettement global. Cependant, avec la hausse du coût de la vie et la fin des aides de l'État, les ménages sont de plus en plus contraints de recourir à des prêts pour financer leurs dépenses courantes.
L’inflation : un terrain fertile pour le surendettement
L'inflation continue d'affecter sévèrement le pouvoir d'achat des ménages. Au premier semestre 2024, le taux d'inflation s'est stabilisé à 2,3 % hors tabac, mais cette apparente accalmie masque des tensions persistantes sur les budgets des ménages les plus modestes. Les hausses des prix de l'énergie, en particulier, ont eu un impact dévastateur sur ces foyers, les forçant parfois à faire des choix drastiques entre payer leurs dettes ou subvenir à leurs besoins essentiels.
Par ailleurs, la fin des aides d'État, telles que le bouclier tarifaire sur les prix de l'énergie, a laissé de nombreux ménages sans protection contre les fluctuations du marché. De quoi exacerber les difficultés financières, en particulier pour ceux qui étaient déjà sur le fil du rasoir.
Les indicateurs clés du surendettement en France
Les inscriptions au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ont progressé de 5 % entre janvier et juillet 2024 par rapport à la même période en 2023. Ce fichier recense les personnes ayant rencontré des difficultés dans le remboursement de leurs crédits, ainsi que celles ayant déposé un dossier auprès de la commission de surendettement.
En revanche, il est à noter une baisse de 9 % des inscriptions au fichier central des chèques (FCC), qui recense les personnes ayant émis un chèque sans provision ou ayant fait un usage abusif de leur carte bancaire.
Le nombre de désignations de banques pour l'ouverture d'un compte bancaire, dans le cadre du droit au compte, poursuit également sa baisse avec une diminution de 7 % sur un an, et de 40 % par rapport à 2019.
Typologie des ménages surendettés
Le profil des ménages surendettés en 2024 présente des caractéristiques marquantes. Selon les dernières enquêtes, 67,7 % des ménages surendettés gagnent l'équivalent ou moins que le Smic, et plus de la moitié d'entre eux se trouvent sous le seuil de pauvreté monétaire. La majorité des ménages surendettés (76 %) sont locataires de leur logement, montrant une nouvelle fois que les personnes n'ayant pas accès à la propriété ont plus de difficultés à terminer le mois sans dettes.
Les solutions de traitement des situations de surendettement ont permis de limiter les redépôts de dossiers, mais la situation reste préoccupante, en particulier avec la hausse des prix et les conditions d'accès au logement qui ne cessent de se durcir. Les ménages modestes, souvent sans filet de sécurité, sont les premiers à souffrir de cette situation, et leurs perspectives d'amélioration restent limitées dans un contexte économique incertain.
Toujours pas de reprise économique forte : un problème
La Banque de France a exprimé sa vigilance face à l'évolution des dossiers de surendettement pour le reste de l'année 2024. Bien que le taux de chômage ait légèrement diminué de 0,2 point au deuxième trimestre, atteignant 7,3 % de la population active, les signes de reprise économique demeurent fragiles et inégalement répartis. La baisse de l'inflation, notamment des prix alimentaires et énergétiques, a offert un répit aux ménages, mais la situation reste tendue.
La hausse du nombre de demandes d'informations et d'accompagnement adressées à la Banque de France, en progression de 9 % sur les sept premiers mois de l'année, ainsi que l'augmentation de 14 % de la fréquentation des pages dédiées aux services d'inclusion financière, sont des indicateurs d'une montée en puissance des fragilités financières des ménages.