Gaspillage alimentaire : le grand échec des entreprises françaises en 2025

Alors que la France s’était fixé l’objectif ambitieux de réduire de 50 % le gaspillage alimentaire d’ici 2025, les entreprises peinent encore à tenir la cadence. Entre obligations légales, contraintes logistiques et manque de vision stratégique, les progrès sont timides. Les derniers chiffres du Baromètre Anti-Gaspillage 2025, mené par Dynata pour Comerso, dressent un état des lieux mitigés de l’engagement des professionnels du secteur.

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Par Rédaction Publié le 16 mars 2025 à 18h00
gaspillage alimentaire
Les entreprises française à la peine face au gaspillage alimentaire. - © Economie Matin

Un engagement en hausse, mais insuffisant

La lutte contre le gaspillage alimentaire n'est plus un sujet anecdotique pour les entreprises françaises. Selon le Baromètre Anti-Gaspillage 2025 , 58 % des entreprises déclarent s'être davantage mobilisées en 2025 qu'un an auparavant . Un progrès notable, mais qui cache encore de nombreuses lacunes.

Parmi les chiffres les plus préoccupants :

  • 15 % des entreprises jettent encore plusieurs fois par semaine des revenus alimentaires mais consommables.
  • 83 % des entreprises estiment qu'elles pourraient encore mieux faire.
  • 42 % des entreprises envisagent de réduire leurs engagements anti-gaspillage, notamment sous la pression d'un contexte économique tendu.

Ces données illustrent un paradoxe : les entreprises sont conscientes du problème, mais peinent à faire du gaspillage un enjeu prioritaire dans leurs stratégies.

Des objectifs réglementaires ambitieux, mais peu respectés

La France a mis en place plusieurs cadres législatifs pour inciter les entreprises à réduire leur gaspillage :

  • La loi Garot de 2016, qui interdit aux supermarchés de jeter des produits alimentaires consommables et les oblige à les donner à des associations.
  • La loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) de 2020, qui renforce les obligations de tri et de valorisation des déchets alimentaires.
  • Le Label Anti-Gaspillage Alimentaire, destiné à récompenser les enseignes exemplaires.

Pourtant, dans la pratique, l'application de ces réglementations reste incomplète :

  • 29 % des grandes et moyennes surfaces (GMS) déclarent jeter les denrées consommables plusieurs fois par semaine.
  • 47 % des industriels de l'agroalimentaire assurent encore détruire régulièrement des produits en parfait état.
  • 52 % des distributeurs ignorent encore l'existence du Label Anti-Gaspillage Alimentaire.

Des solutions existantes, mais restent sous-exploitées

Les entreprises ont pourtant à leur disposition plusieurs solutions pour limiter le gaspillage :

  1. Le don aux associations : une pratique adoptée par 92 % des grandes surfaces. Mais seulement 12 % bénéficient d'une collecte quotidienne par les associations, contre 42 % en 2020, faute de logistique adaptée.
  2. La vente à prix réduit des produits à date courte, pratiquée par 69 % des enseignes, reste une solution efficace, mais qui ne couvre pas l'ensemble des invendus.
  3. Les plateformes numériques comme Too Good To Go ou Phenix, utilisées par 57 % des entreprises, permettent d'écouler une partie des stocks à des consommateurs soucieux d'acheter à moindre coût.
  4. L'optimisation des stocks et la gestion prédictive : peu d'entreprises investissent dans l'intelligence artificielle pour mieux anticiper la gestion des stocks et réduire le gaspillage à la source.

Un frein économique persistant

L'un des principaux obstacles à l'engagement des entreprises reste d'ordre économique. Beaucoup peinent à voir la lutte contre le gaspillage comme un levier de rentabilité. Selon l'étude, seulement 39 % des professionnels considèrent la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) comme un facteur d'optimisation économique.

Pourtant, les chiffres montrant qu'une meilleure gestion du gaspillage pourraient représenter un gain financier conséquent :

  • Une entreprise qui optimise ses revenus réduit ses coûts de traitement des déchets de 1,5 % à 0,3 % de son chiffre d'affaires.
  • Les dons alimentaires donnent droit à une réduction fiscale de 60 % du montant donné, un avantage souvent sous-estimé.

Vers un changement en profondeur ?

Face à ces constats, les États généraux du gaspillage alimentaire, organisés le 13 mars 2025 à l'Assemblée nationale, visent à redonner un élan à la lutte contre le gaspillage. À cette occasion, les pouvoirs publics, les associations et les entreprises doivent discuter de nouvelles mesures pour améliorer la situation.

Parmi les pistes envisagées :

  • Un renforcement des contrôles et des sanctions pour les entreprises ne respectant pas la réglementation.
  • Un meilleur accompagnement logistique pour le don alimentaire, avec des collectes plus fréquentes et plus adaptées aux besoins des associations.
  • Une incitation fiscale s'accumule pour encourager les entreprises à adopter de meilleures pratiques.

Le gaspillage alimentaire est un défi majeur pour les entreprises françaises. Si certaines progressent, d'autres continuent de considérer ce sujet comme secondaire. Pourtant, les solutions existent et permettent non seulement de limiter les pertes économiques, mais aussi de réduire l'impact environnemental et de répondre aux attentes des consommateurs. La balle est donc désormais dans le camp des entreprises et des pouvoirs publics pour accélérer la transition.

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