Fret SNCF, leader du transport ferroviaire de marchandises en France, va disparaître le 1er janvier 2025, pour être remplacé par deux nouvelles sociétés : Hexafret et Technis. La nouvelle société ne pourra pas garder tous les clients de son prédécesseur, notamment ceux les plus rentables. Cette pilule amère, décidée par le gouvernement, lui permettra en revanche d’échapper à une très lourde amende de la Commission européenne.
Fret SNCF : avec son démantèlement, le gouvernement avale une pilule amère
SNCF : les compensations de ses pertes par l’État ont été jugées illégales par Bruxelles
Qui aurait pu penser que Fret SNCF cesserait un jour d’exister ? Et pourtant, c’est le scénario auquel la SNCF s’est résignée, à la demande du gouvernement. Le démantèlement de Fret SNCF découle en effet d'une enquête lancée en 2023 par la Commission européenne, qui reprochait à l'État français d’avoir subventionné la filiale de la SNCF de manière déloyale entre 2005 et 2019. Ces aides, estimées à cinq milliards d’euros, ont été jugées comme une distorsion de concurrence dans un marché ouvert depuis 2006.
Pour éviter un remboursement massif de ces subventions, le gouvernement français a donc opté pour une « discontinuité », une stratégie visant à faire disparaître Fret SNCF tout en assurant une continuité de l’activité à travers deux nouvelles entités. Ainsi, la société Hexafret prendra en charge le transport des marchandises, tandis que Technis assurera la maintenance des locomotives. Cette restructuration, bien que radicale, a été considérée comme le moindre mal par les autorités, le risque de liquidation pure et simple ayant été jugé trop élevé.
Hexafret reprendra les activités de Fret SNCF, avec 20% de son chiffre d’affaires en moins
L'impact économique de cette réorganisation se traduit par une cession de 23 flux de marchandises, principalement les plus rentables, à des concurrents européens, entraînant une perte de 20% du chiffre d'affaires et de 30% des trafics de Fret SNCF. Hexafret se voit amputée de ces lignes stratégiques, notamment des contrats lucratifs avec des clients industriels. Les conséquences se ressentent également sur le plan social, avec 10% de suppressions de postes, soit 500 emplois, bien que le gouvernement et la SNCF se soient engagés à ne pas licencier et à reclasser les salariés concernés dans d’autres branches du groupe.
Face à ces changements, les syndicats expriment une vive opposition et craignent une dégradation des conditions de travail et un affaiblissement du fret ferroviaire en France. Cette disparition de Fret SNCF intervient alors que la part du fret ferroviaire reste faible en France, avec seulement 11% du volume des marchandises transportées en 2023, bien en deçà de la moyenne européenne. Les syndicats, de la CGT à Sud-Rail, réclament un moratoire sur ce processus de discontinuité et ont déjà lancé une alarme sociale, menaçant d’une grève si leurs revendications ne sont pas entendues. Ils dénoncent un plan qui, selon eux, affaiblit l’ensemble du secteur ferroviaire au moment où la transition écologique et la compétitivité de l’économie française nécessitent un outil public performant et durable.