La France suit-elle le parcours désastreux de la Grèce ? 

La crise financière Grecque, débuté en 2008 a menacé de s’étendre à toute l’Union Européenne, était due à l’emballement de la dette publique. 

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Par Daniel Moinier Publié le 23 décembre 2024 à 5h30
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4%Enfin en 2022, la Grèce affiche une croissance de 4%, contre 2.6% dans la zone euro

Cette dette pesait sur l’économie de deux manières : 

  • Par les craintes qu’elle a fait naître chez les investisseurs sur sa capacité à rembourser sa dette publique. 
  • Par le poids du paiement des intérêts de la dette 

En rappel, la Grèce était entrée difficilement dans l’Union Européenne en 1981, puis dans l’Euro-zone en 2001. 

En 2008, la difficulté première était un taux d’endettement énorme de 177% du PIB avec un important déficit budgétaire de 13% du PIB. 

Ces critères dépassant les convergences de l’UE non visibles par occultation lors de la présentation de sa dette publique, par des fonds hors bilan et aussi par le biais d’instruments financiers non apparents. 

Les autres problèmes structurels importants du pays : 

  • Sa difficulté à prélever l’impôt 
  • Son budget militaire surdimensionné 
  • Sa dépendance aux fonds structurels européens 

La crise grecque a connu trois pics de tension : 

  • En mai 2010, les pays de la zone euro avec le Fond Monétaire International (FMI) décident d’aider la Grèce. Un accord prévoit des prêts conditionnés à un ajustement structurel suivi par le Gouvernement grec. Prêt de 260 milliards d’euros. 
  • En mai 2011, elle fait de nouveau appel à l’UE et FMI. La France et l’Allemagne sont en désaccord. Le gouvernement est mis en pression par la population. L’ONU s’en mêle. Il avertit que les réductions radicales vont trop impacter la population : baisse de l’emploi, croissance nulle et dépenses sociales augmentées. 
  • En 2015, Alexis Tsípras avec son mouvement SYRIZA gagnent les élections. En juillet il lance un référendum pour présenter un nouveau plan financier des créanciers. Résultat : Non. Mais un autre plan est accepté peu de temps après. 
  • Cette crise révèle que c’est une crise politique et du fonctionnement des institutions dans un pays qui ne possède aucune ressource ou presque.  
  • Comme en France la préservation des acquis est plus forte que la solidarité entre membres, chacun préservant son pré carré. 

 

Mario Monti évoquait que la Grèce est un pays réfractaire au marché unique et à la concurrence avec des corporatismes et des rentes de situation dans le secteur public et même privé. 

La forte inflation a provoqué une perte de compétitivité augmentant le déficit de la balance commerciale. 

Comparaison des prix à la consommation en 2009 : 

Allemagne = 119.2 

Grèce           = 146.4 

Les Grecs consommaient beaucoup plus qu’ils ne produisaient, c’est aussi le cas de la France. 

Ces éléments permettaient de s’interroger sur la soutenabilité de la dette. 

Les jeux olympiques de 2004 ont parachevé l’endettement avec un coût de 15 à 20 Mds d’endettement supplémentaires. 

Le 3 mai 2010, en échange d’une forte austérité, l’UE envoi 110 milliards d’euros à la Grèce. 

Cela ne suffit pas, c’est au tour des créanciers privés dont une quarantaine de banques européennes, qui avancent 158 milliards d’euros en août 2011. 

Entre 2012 et 2017, les rachats de dette grecque rapportent près de 8 milliards d’euros à la BCE. 

Le 28 novembre 2012, l’UE et le FMI allègent la dette grecque de 45 milliards d’euros. 

Mais le 14 août 2015, l’Eurogroupe donne son accord pour un versement de 26 milliards d’euros. 

 

Cette crise a fortement appauvri le pays avec une baisse du PIB de 25%. C’est aussi une forte hausse du chômage et l’apparition de nouvelles catégories de pauvres, un doublement des suicides, une hausse des homicides, une augmentation de 50% des infections au virus HIV, une forte diminution des consultations et même une forte augmentation de la prostitution. La mortalité enfantine a augmenté de 42.8%, les dépressions de 272,7%. 

Les hôpitaux manquent de personnel et de moyens. Ils empruntent le matériel et demandent aux patients de participer aux achats, certains ont dû fermer. La part des médicaments non remboursée est passée de 25% à 40 même 60%. Certains laboratoires ne livrent plus. 30% des Grecs n’ont plus de couverture sociale. 

Coté emploi, les salariés avaient des arriérés de salaires de plusieurs mois, le chômage a frôlé les 27%. 

Selon l’Institut Hans Böckler, les impôts ont augmenté de 337% pour les plus pauvres, perdant 86% de leur revenu et 9% pour les plus riches. 

Les réformes économiques ont permis de réduire le chômage à 11.7 % en 2022. 

Des causes complémentaires sont avancées telles :  

  • Le manque de cadastre.  
  • L’église et les armateurs étaient privilégiés  
  • Les achats d’armes à ses créanciers 
  • De fortes carences de gestion de l’état grec pour renflouer ses caisses telle la France. 

Le comble, ce sont les taux d’intérêt qui ont fortement freiné le rétablissement : à 10 ans ils sont montés à 18,548% en août 2011, mais à 2 ans c’était bien pire : 45.892%. À la suite de cela, le défaut de la Grèce fait de plus son chemin auprès des investisseurs et à cela s’ajoute les garanties exigées par plusieurs pays ! 

Enfin en 2022, la Grèce affiche une croissance de 4%, contre 2.6% dans la zone euro confortée par une excellente saison touristique. 

Kiriakos Mitsotakis est confiant, les chiffres sont encourageants. Cette croissance a permis de réduire les impôts, les cotisations, d’attirer les investisseurs, de restructurer l’économie et de soutenir la société. 

La dernière tranche de remboursement de 15 milliards d’euros s’est faite en août 2018. Ouf ! 

Le poids de la dette est retombé à 206% du PIB en 2020, 170% en 2022, 162,6% en 2023 et même 151.9 début 2024. Mais les campagnes n’ont pas encore retrouvé leurs lustres d’antan. Il y a eu très peu d’investissements tant routiers que publics et la population reste encore très appauvrie. 

Cependant un fait encourageant : 350.000 grecs sont rentrés de l’étranger. Ce qui inquiète maintenant c’est la crise du manque d’eau. 

 

Et la France à fin 2024 : Où en est son économie, ses comptes publiques, sa dette, son gouvernement ? 

Après un intermède de 3 mois avec le gouvernement Barnier et son budget comportant beaucoup d’impôts, taxes et restrictions non acceptés, a été renversé par une motion de censure à l’initiative des groupes LFI et RN. 

C’est au tour de François Bayrou d’installer son nouveau gouvernement et de proposer un plan qui devra plaire aux extrêmes pour éviter une nouvelle censure. 

La France se trouve dans une situation extrême : 

Un endettement des comptes publics de 3228.4 milliards d’euros soit 112% du PIB, 3ème de l’Europe après la Grèce (163.6%), l’Italie (137%). 

 

Les grandes causes principales de notre endettement commencé en 1975. 

  • Les 2 chocs pétroliers : Le premier en 1973 (avec la guerre du Kippour) et le second en 1979. 

Causes et conséquences : Hausse brutale du prix du pétrole ayant une incidence presque immédiate sur la croissance économique mondiale. Ces chocs ont engendré une baisse du PIB de 3%, augmentant presque aussitôt le chômage. La croissance de 5,1% passe à 2,1%. 

C’est la fin des trente glorieuses et d’une croissance élevée. 

 

  • Le coup de grâce, c’est les 4 ordonnances Mitterrand de 1982 sur les diminutions des temps de travail notamment la retraite passant de 65 à 60 ans, soit une perte de 300 Mds par année depuis (en euros de ce jour) soit près 70% de la dette actuelle. 

 

  • C’est aussi 5 dévaluations du franc appauvrissant le pouvoir d’achat des Français. 

C’est sous sa Présidence que la dette a le plus augmenté en pourcentage passant de 21.3% à 52,65%, soit 31.35% et 839 Mds d’euros. 

 

  • La bulle internet ou bulle spéculative a commencé en 1990 avec un apogée en 2000. Elle a affecté principalement les valeurs technologiques. La bourse perd 35%, amplifiée par le spectre de la guerre en Irak et des tensions avec la Corée du Nord. C’est tout de même un recul des affaires de 9% dans la City avec 331.000 salariés licenciés. 

 

  • L’attaque terroriste du 11 septembre 2001 avec la destruction des tours du World Trad Center, a marqué une chute brutale des marchés boursiers entraînant une perte de 1,4 billion de dollars en valeur boursière.  Ce sont surtout les compagnies d’assurances par une sous-capitalisation et l’augmentation des primes qui ont conduit à de nombreuses faillites, y compris européennes. La croissance mondiale du PIB est tombée à 0.5% avec une augmentation du taux de chômage de 0,11%, soit 598.000 emplois perdus. C’est la Chine qui a le plus profité du renversement d’attractivité en devenant progressivement l’usine du monde. 

 

  • En France, à la même époque les 35 heures établis en 2000, généralisées en 2002 ont bouleversé l’économie française et la manière de travailler. Tous les temps de travail en 3x8, 4x8, y compris sur jour 7 jours ont dû s’adapter difficilement. Ce qui a engendré des pertes de marges pour les entreprises pouvant aller jusqu’à 28% avec les investissements. Les embauches ont fortement diminué pendant 4 ans. C’est seulement en 2005/6 que cela s’est en partie rétablit. 

 

  • En 2009, c’est la crise des subprimes sous la présidence de Nicolas Sarkozy arrivé au pouvoir en 2008. Cette crise mondiale exceptionnelle par son ampleur a débuté aux Etats-Unis. Elle a bouleversé toute l’économie mondiale. Toutes les banques étaient près de la faillite, le gouvernement français les a soutenues à coups de milliards. Le PIB a plongé, la dette française a augmenté de près de 500 Mds d’euros. 

 

  • Peu de temps après son arrivée à la présidence de la France en mai 2012, François Hollande a lancé un plan d’impositions supplémentaires de 20%, ce qui a rapidement plombé l’économie. La dette était de 1832 Mds d’euros (91% du PIB) à son arrivée et de 2262 Mds à son départ, soit une hausse de 448 Mds d’euros et + 24.4% sur le quinquennat. 

 

En 2017, c’est l’arrivée d’Emmanuel Macron à la Présidence. Sur son 1er quinquennat, il aura à subir plusieurs évènements imprévisibles :  

  • La crise des gilets jaunes de novembre 2018 jusqu’en novembre 2019, a engendré une perte de 17 milliards d’euros et 25 millions d’heures supplémentaires non payées aux policiers. 

 

  • Ensuite c’est la pandémie du Covid 19 commencé en novembre 2019 avec une durée de 2 ans et demi faisant 116.000 décès. Coût estimé : 140 Mds d’euros. Et surtout une économie travaillant au ralentit avec des pertes difficilement mesurables. 

 

  • Puis c’est au tour de l’inflation de pointer son nez en 2020, avec une pointe de 6.2% qui a diminué début 2023 progressivement, pour revenir à moins de 2% en 2024 et même 1.6 et 1.7% en octobre/novembre. 

Cette inflation a pénalisé l’épargne en entraînant une perte de valeur des sommes épargnées et en diminuant le taux de rendement. Ce qui a entraîné une baisse de l’activité économique, une diminution des investissements et du potentiel de croissance. Elle a aussi pénalisé la compétitivité et le commerce extérieur. Les produits importés deviennent moins chers et engendre des baisses de production et de rentrées d’argent pour l’état. Cependant tous nos produits français deviennent plus chers. Il est estimé que l’inflation a entraîné une perte de revenu national de 40 Mds d’euros en 2021 et 2022. 

Les effets ressentis : Une baisse très significative de consommation, des commandes de véhicules en forte baisse, les achats courants en sont minimisés, l’immobilier est en chute forte, les licenciements ont repris, le taux de chômage s’est inversé avec une augmentation de 7% et 7,5% en 2024. 

 

  • Le 9 juin, c’est la dissolution de l’Assemblée Nationale qui aura pour conséquence après les élections, de se retrouver avec un pays ingouvernable composé de 3 partis inconciliables. Ce qui entraîne une stagnation de toute l’économie avec les branches immobilière et automobile en forte récession pour ne citer qu’elles. 

Pour compléter le tableau ; la France vient d’être dégradée par Moody’s ce qui aggravera encore ses comptes. 

 

Pour être tout à fait exact et enfoncer le clou : il existe d’autres dettes n’entrant pas dans la dette. 

La dette souveraine : estimée à 10.000 Mds d’euros 

C’est l’ensemble des emprunts souscrits par l’état qu’il doit rembourser qui comprend : 

  • Dette publique (expliquée ci-dessus) 
  • Dette hors bilan 
  • Dettes isolées 
  • Dettes des entreprises du secteur public (238.525 Mds d’euros 
  • Dette du déficit commercial (99.6 Mds d’euros en 2023) 
  • Dettes cachées : Celle par exemple due à l’UE 26 qui est de 1 Mds d’euros en 2023. Les dettes auprès du FMI ne rentrent pas dans la dette publique. 
  • Dettes invisibles, elles correspondent au manque d’investissement dans l’entretien des infrastructures (souvent des emprunts pour l’entretien des structures en investissements directs retardés) 20% en 1990 contre 4.3% en 2023 ! Il existe aussi le retard des investissements du plan écologique. (La somme prévue à l’horizon 2050 s’élèverait à 1100 Mds d’euros.) 

Détails des dettes ci-dessus ; 

La dette de la Sécurité Sociale placée dans la CADES (Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale) créée en 1991 sous Jacques Chirac. Le montant versé automatiquement tous les ans de 10 Mds a diminué à 1,15Md d’euros. A fin 2023, la dette amortie s’élève à 242,6 Mds soit 62,5% du montant total de 387,7 Mds. Il reste encore 145,1 Mds à amortir non inclus dans la dette publique. Elle devrait cesser son activité en 2033. Délai déjà repoussé à plusieurs reprises !  

 

La dette hors bilan de 4188 Mds d’euros se compose de : 

  • La dette du régime des retraites de la fonction publique = 1181 Mds d’euros 
  • Les engagements de l’état au titre de sa mission de régulateur économique et social pour 680 Mds d’euros comprenant les dettes des régimes spéciaux : SNCF, RATP…262 Mds d’euros 
  • 12 ans de produits régaliens se montant à 266 Mds d’euros 
  • Les engagements financiers qui comprennent la protection de l’épargne réglementée, les prêts garantis par l’état et les garanties et engagements vis-à-vis de l’U-E se montant à 1591 Mds d’euros (Cours des comptes). 
  • La dette isolée de Sécurité Sociale (pas entièrement remboursée) 
  • Les participations dans des entités publiques ou semi-publiques générant du passif  

 

Sommée par l’Europe la France doit élaborer un plan budgétaire et structural national qui s’étendra sur 4 à 5 ans. Le pays doit s’engager à mettre en place un certain nombre de réformes et d’investissements pour améliorer la croissance tout en préservant la charte écologique. 

En premier, réduire la dette de 1408 Mds d’euros sur 4 ans (maxi 5) et revenir à 60% du PIB° avec un maxi de 3% de déficit. 

Beaucoup de recommandations sont faites par l’UE, le FMI, l’OFCE dont une cure d’austérité de 45 Mds par année qui procurerait une recette additionnelle de 223 Mds.  

Recette ; Ponctionner provisoirement le flux d’épargne moyen annuel de 517 Mds d’euros qui dynamiserait le PIB de 18,32% avec une croissance de 3,66% au lieu de 0,9% actuel. 

Les Français seraient-ils d’accord ? 

 

Pour redresser les finances beaucoup plus rapidement que ne l’a fait la Grèce : 

Seules deux actions seraient nécessaires :  

Un gel de la retraite de 64 ans pour contenter les 2 partis extrêmes et 40 heures pour booster rapidement l’économie sous 3 mois, revenir à l’équilibre des comptes (minimum), augmenter le pouvoir d’achat, les marges entreprises et redresser toutes les caisses, sans autre taxe, ni impôt 

www.danielmoinier.fr 

 

 

 

 

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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