Climat : l’absorption de CO2 par les forêts s’est écroulée en 2023

L’année 2023 marque un tournant catastrophique dans la lutte contre le réchauffement climatique. Les forêts, qui absorbaient autrefois une part significative du carbone émis par les activités humaines, n’ont presque plus joué leur rôle crucial de puits de carbone cette année. Cette diminution de l’absorption de CO2 par les écosystèmes terrestres, autrefois pilier central des politiques climatiques, fait craindre une accélération sans précédent du réchauffement global. Les conséquences sont potentiellement irréversibles.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 23 octobre 2024 14h02
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1,1%les émissions humaines de CO2 ont déjà augmenté de 1,1 % entre 2022 et 2023

L’effondrement des puits de carbone : une menace pour l'équilibre climatique

En temps normal, les forêts du monde entier, ainsi que les sols, absorbent environ 20% des émissions humaines de carbone. Ces puits de carbone, comme les scientifiques les désignent, permettent de freiner la progression du réchauffement climatique en capturant une partie du dioxyde de carbone (CO2) produit par l’activité humaine. Toutefois, selon une étude relayée en octobre 2023, cette capacité a été drastiquement réduite cette année. Une donnée alarmante qui pourrait changer la trajectoire climatique déjà critique de la planète.

L’étude, publiée par des chercheurs affiliés à plusieurs grandes universités internationales et repérée par La Croix, révèle que les forêts et les sols n'ont capté qu’entre 1,5 et 2,6 milliards de tonnes de CO2 en 2023, contre 9,5 milliards en 2022. C'est un plongeon vertigineux, laissant planer la menace d'un effondrement encore plus important dans les années à venir. Les mécanismes naturels sur lesquels nous avons longtemps compté pour réguler les gaz à effet de serre sont en train de céder sous la pression des événements climatiques extrêmes.

Incendies et sécheresses, le cercle vicieux qui frappe les forêts

Les raisons de cet affaiblissement des puits de carbone sont clairement identifiées : sécheresses récurrentes et incendies dévastateurs. Ces événements climatiques, souvent exacerbés par le réchauffement lui-même, ont décimé des forêts entières, transformant des zones autrefois absorbantes en émettrices de CO2.

En 2023, les incendies en Canada, en Sibérie et en Amazonie ont ravagé des millions d'hectares de forêt. L'Amazonie, souvent appelée le "poumon de la Terre", a subi six mois de sécheresse continue, transformant temporairement cette région-clé en une source nette de carbone plutôt qu'en une réserve absorbante. La situation est d’autant plus préoccupante en Europe, où les forêts, notamment en France et en Allemagne, ont vu leur capacité à capter le CO2 décliner depuis plusieurs années, en raison de la multiplication des épisodes de sécheresses. Pire encore, les forêts allemandes sont désormais, elles aussi, devenues émettrices de carbone.

Selon Philippe Ciais, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), ce sont principalement les jeunes arbres qui absorbent le carbone. Lorsque les forêts sont soumises à des phénomènes extrêmes comme les sécheresses et les incendies, les arbres adultes meurent, privant ainsi l’écosystème de cette précieuse captation de CO2, tandis que la décomposition des arbres morts relâche ce gaz dans l’atmosphère. C'est un cercle vicieux : plus le climat se réchauffe, plus les forêts peinent à se régénérer et à jouer leur rôle vital.

Les conséquences pour la planète : une catastrophe climatique

L'impact de cette baisse d'absorption est colossal. Les scientifiques avertissent que si cette tendance persiste, il sera extrêmement difficile de limiter le réchauffement climatique en dessous des seuils critiques. Selon le rapport du Global Carbon Project, les émissions humaines de CO2 ont déjà augmenté de 1,1 % entre 2022 et 2023. Cette augmentation pourrait sembler modeste, mais elle prend une ampleur démesurée quand elle n’est plus compensée par les puits de carbone naturels.

Si les forêts ne peuvent plus absorber une part significative de nos émissions, cela signifie que le carbone continue de s'accumuler dans l'atmosphère, accélérant ainsi la montée des températures mondiales. Les prévisions du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) deviennent alors d'autant plus alarmantes. Dans leur scénario le plus pessimiste, le réchauffement pourrait atteindre +5,5°C d'ici à 2050, un seuil cataclysmique pour les écosystèmes et la société humaine.

Ce désastre environnemental met en lumière une problématique à long terme : les efforts actuels, aussi ambitieux soient-ils, ne suffiront probablement pas. Si les puits de carbone continuent de s'effondrer, il sera quasiment impossible de respecter les accords de Paris ou de maintenir le réchauffement climatique à un niveau "gérable". Les climatologues préviennent : un tel échec précipiterait des bouleversements écologiques et sociaux de grande ampleur.

Le réchauffement climatique avance : bientôt la fin ?

La défaillance des puits de carbone est le symptôme d'une planète au bord du gouffre. L'année 2023 pourrait bien être un avant-goût des catastrophes à venir si des actions drastiques ne sont pas prises immédiatement. La capacité des forêts à jouer leur rôle de régulateur climatique est compromise, et avec elle, nos espoirs de contenir la catastrophe climatique s'amenuisent.

Pour les citoyens, les entreprises, et les gouvernements, il devient urgent de repenser en profondeur nos modèles économiques et nos modes de vie. Le carbone ne pourra plus être capté de manière aussi efficace par la nature elle-même. C’est à l’humanité de prendre le relais, avant qu’il ne soit trop tard.

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Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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