Espérance de vie : l’Europe stagne depuis 2011

Après des décennies de progression ininterrompue, l’espérance de vie en Europe stagne depuis 2011, sauf dans quelques pays.

Jade Blachier
Par Jade Blachier Publié le 19 février 2025 à 14h58
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85,7 ansEn 2024, l'espérance de vie à la naissance a atteint 80,1 ans pour les hommes et 85,7 ans pour les femmes.

Une étude publiée dans The Lancet Public Health met en lumière une tendance inquiétante : l’espérance de vie en Europe ralentit depuis 2011. Cette décélération, bien antérieure à la pandémie de COVID-19, révèle un basculement de la santé publique du continent. Alors que certains pays comme la Norvège ou la Suède continuent de progresser, d’autres, notamment le Royaume-Uni et l’Allemagne, voient leur longévité stagner.

Une progression en perte de vitesse

Les données de l’étude montrent que la progression annuelle de l’espérance de vie en Europe a nettement ralenti au cours des dernières décennies. Entre 1990 et 2011, l’espérance de vie augmentait en moyenne de 0,23 an par an. Ce rythme a chuté à 0,15 par an entre 2011 et 2019, marquant un net ralentissement. La pandémie de COVID-19 a encore aggravé la situation, entraînant une baisse de 0,18 par an en moyenne entre 2019 et 2021.

Jusqu’en 2011, l’Europe bénéficiait encore d’une amélioration continue de la longévité, principalement grâce aux avancées médicales et à la baisse des maladies cardiovasculaires et du cancer. Depuis cette date, le rythme s’est ralenti de manière significative. La pandémie de COVID-19 a accentué le phénomène, entraînant une chute brutale dans certains pays. L’Angleterre et l’Allemagne sont parmi les États les plus touchés, tandis que la Norvège, l’Islande et la Suède ont mieux résisté à cette tendance grâce à des politiques de prévention rigoureuses.

Modes de vie et politiques de santé en échec

La stagnation de l’espérance de vie en Europe ne tient pas du hasard. Elle est directement liée à plusieurs facteurs structurels. L’augmentation des maladies chroniques, notamment les maladies cardiovasculaires, constitue l’un des principaux freins à l’allongement de la durée de vie. Ce phénomène est en grande partie dû à une alimentation déséquilibrée, un mode de vie sédentaire, une augmentation des cas d’obésité et de diabète ainsi qu’une prévalence accrue de l’hypertension artérielle. Comme l’explique le professeur Nicholas Steel de l’Université d’East Anglia, "les progrès de la santé publique et de la médecine au XXe siècle permettaient d’espérer une amélioration continue de l’espérance de vie en Europe", mais ce n’est plus le cas.

Tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne en matière de prévention. L’Angleterre, par exemple, a connu les plus fortes difficultés après 2011, notamment en raison d’un manque d’investissement dans la prévention des maladies cardiovasculaires, d’une réduction des dépenses de santé publique et d’un accès inégal aux soins. À l’inverse, des pays comme la Norvège, la Suède ou l’Islande ont continué à progresser, notamment grâce à une taxation des produits nocifs pour la santé, des campagnes de prévention efficaces et un meilleur accès aux soins médicaux préventifs.

COVID-19 : un accélérateur du problème ou un révélateur ?

Certaines nations, déjà touchées par le ralentissement depuis 2011, ont vu leur longévité chuter brutalement lors de la pandémie de COVID-19. La Grèce et l’Angleterre ont subi les plus fortes baisses, avec une perte moyenne de 0,61 an et 0,6 an respectivement. L’Allemagne a également été impactée, avec une diminution de 0,5 an. En revanche, les pays nordiques ont mieux résisté, en maintenant voire en augmentant leur espérance de vie. Cette différence s’explique par une politique sanitaire plus stricte et une meilleure gestion des soins de santé. Comme le souligne le professeur Nicholas Steel, les politiques nationales améliorant la santé de la population sont directement liées à une meilleure résilience face aux crises sanitaires.

Vers une relance de la longévité ?

Le ralentissement actuel de l’espérance de vie n’est pas une fatalité. De nombreux leviers existent pour renouer avec une progression durable. La prévention doit être renforcée par des campagnes nationales contre l’obésité et le diabète, une incitation à la consommation de produits alimentaires sains et une lutte renforcée contre le tabagisme et l’alcoolisme. L’accès aux soins doit également être amélioré, notamment en renforçant la couverture médicale dans les zones rurales et en luttant contre les inégalités de santé entre riches et pauvres. L’activité physique doit aussi être encouragée.

Les modèles nordiques peuvent également servir d’exemple, notamment en matière de régulation du marché alimentaire et de taxation des produits nocifs. Comme le rappelle le professeur Nicholas Steel, l’espérance de vie pour les plus âgés continue à s’améliorer dans bien des pays, ce qui prouve que nous n’avons pas atteint un plafond biologique de longévité.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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