Agriculture : l’Europe fait flamber le prix des engrais russes

L’Union européenne durcit son approche face à la Russie en instaurant de nouveaux droits de douane sur des produits agricoles et les engrais azotés.

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Par Grégoire Hernandez Publié le 30 janvier 2025 à 10h29
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Agriculture : l’Europe fait flamber le prix des engrais russes - © Economie Matin
600 MILLIONS €En octobre 2023, la Russie a instauré un impôt sur les exportations d’engrais, générant 600 millions d’euros de revenus en une seule année.

En 2024, un quart des engrais importés par l’Europe provenaient encore de Russie. Aujourd’hui, Bruxelles veut mettre un coup d’arrêt à cette dépendance, avec des taxes qui pourraient atteindre 100 % de la valeur des engrais azotés d’ici à 2028.

Une dépendance européenne aux engrais russes encore marquée

L’Europe importe massivement des engrais russes, une réalité qui s’est renforcée ces dernières années malgré la guerre en Ukraine (+117 % entre 2020-2021 et 2023-2024). En 2024, l’Union européenne a importé 6,18 millions de tonnes d’engrais depuis la Russie, dont 2,54 millions de tonnes d’engrais azotés, des fertilisants indispensables à la productivité agricole.
Historiquement, Bruxelles avait épargné les engrais russes des sanctions économiques imposées après l’invasion de l’Ukraine, sous prétexte de préserver la sécurité alimentaire. Pourtant, cette exception permettait indirectement à Moscou de financer son effort de guerre. En octobre 2023, la Russie a instauré un impôt sur les exportations d’engrais, générant 600 millions d’euros de revenus en une seule année.
Cette situation a mis les producteurs européens sous pression : confrontés à la flambée des prix du gaz, leur principal coût de production, ils ont perdu en compétitivité face aux engrais russes, dont le prix de fabrication est bien plus bas grâce à un accès privilégié au gaz naturel.

Face à cette distorsion économique, la Commission européenne propose d’alourdir drastiquement les droits de douanesur les engrais azotés importés de Russie et de Biélorussie.

🔹 Actuellement, ces engrais sont taxés à 6,5 %.
🔹 À partir du 1er juillet 2025, un tarif additionnel de 40 €/tonne s’ajoutera.
🔹 Ce montant grimpera jusqu’à 315 €/tonne en 2028, atteignant un niveau jugé prohibitif.

Pour limiter l’afflux d’engrais russes, Bruxelles prévoit aussi un seuil d’importation : toute quantité dépassant 2,7 millions de tonnes sera immédiatement soumise aux taxes maximales dès 2025.

Ces mesures visent deux objectifs majeurs :
- Rendre les engrais européens plus compétitifs.
- Réduire les recettes d’exportation russes pour limiter le financement de la guerre en Ukraine.

Un risque pour les agriculteurs européens ?

Si ces nouvelles taxes freinent les importations russes, elles pourraient aussi faire grimper les coûts pour les agriculteurs. Les engrais représentent une charge lourde pour les exploitations, et une augmentation de leur prix pourrait peser sur la rentabilité des producteurs.
Pour éviter un choc économique, la Commission européenne prévoit des mécanismes d’atténuation pour compenser une hausse excessive des prix. Toutefois, la mise en œuvre de ces aides reste floue, et la crainte d’un renchérissement du coût des cultures demeure.
De plus, l’Europe n’est pas encore autosuffisante en production d’engrais. Même si l’UE tente de diversifier ses sources d’approvisionnement (Canada, États-Unis, Ouzbékistan…), la transition prendra du temps.

Au-delà des considérations économiques, cette réforme s’inscrit dans une logique de confrontation avec Moscou. Bruxelles assume pleinement son intention d’affaiblir les finances russes et de réduire les dépendances stratégiques.

Mais cette stratégie comporte des risques :
- Une hausse des prix agricoles qui pourrait peser sur les consommateurs.
- Une possible réduction de la production alimentaire si les agriculteurs limitent l’usage des engrais.
- Des tensions diplomatiques avec d’autres pays exportateurs d’engrais, comme la Biélorussie.

La proposition de la Commission européenne doit encore être validée par le Parlement et le Conseil de l’UE.

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Étudiant en école de journalisme. Journaliste chez Économie Matin depuis septembre 2023.

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