Le débat autour des tarifs réglementés de l’électricité semblait tranché. Pourtant, alors que certains réclamaient leur suppression au nom de la concurrence, le gouvernement a pris une décision opposée. Ce choix, motivé par la nécessité de garantir une certaine stabilité aux consommateurs, pose de nombreuses questions sur l’avenir du marché de l’électricité en France.
Electricité : les tarifs réglementés (TRVE) ne disparaîtront pas
Le 17 février 2025, les ministères de l’Économie et de l’Énergie ont publié un rapport évaluant le dispositif des tarifs réglementés de vente d’électricité. Ce document, rendu avec deux mois de retard, était attendu par la Commission de régulation de l’énergie et l’Autorité de la concurrence. Alors que cette dernière prônait une suppression progressive du mécanisme, les conclusions du gouvernement sont sans ambiguïté : les Tarifs réglementés de l'électricité (TRVE) doivent être maintenus pour les consommateurs éligibles.
Le maintien des TRVE : un bouclier contre la volatilité des prix de l’électricité
Les tarifs réglementés ont toujours été présentés comme un rempart contre les hausses brutales des prix du marché. Leur mode de calcul repose sur une moyenne des prix de gros sur vingt-quatre mois, ce qui permet de lisser les fluctuations extrêmes. La crise énergétique de 2021-2023 a mis en évidence l’ampleur des variations tarifaires, si bien que le gouvernement considère ce mécanisme comme un outil de stabilisation indispensable. Selon les conclusions du rapport publié le 17 février 2025, les TRVE permettent d’éviter une exposition trop brutale des petits consommateurs à la volatilité du marché, contrairement aux grands industriels, plus à même de négocier des contrats adaptés à leurs besoins.
Le maintien de ces tarifs est aussi d’un enjeu de sécurité d’approvisionnement et de cohésion territoriale. En garantissant un cadre tarifaire stable aux ménages et aux microentreprises, l’exécutif cherche à éviter les effets pervers d’une dérégulation totale. La question de la souveraineté énergétique entre également en jeu, puisque la France entend favoriser l’électrification des usages dans un cadre sécurisé. D’autant que la suppression des TRVE aurait très probablement entraîné la disparition des offres à prix lissé, réduisant encore davantage la capacité des consommateurs à anticiper leurs dépenses.
Tarif réglementé de l’électricité : une distorsion de la concurrence ?
L’Autorité de la concurrence n’a jamais caché ses réticences face au maintien des TRVE. Selon elle, ces tarifs faussent le marché en limitant l’émergence d’une concurrence plus dynamique. Pourtant, la Commission de régulation de l’énergie a défendu une position inverse, affirmant que le développement des offres alternatives n’a pas été entravé. Le rapport du gouvernement corrobore cette analyse. En 2024, plus de 90 % des nouvelles souscriptions ont concerné des offres de marché, preuve que la concurrence progresse malgré la présence des TRVE.
Un autre point soulevé par les autorités concerne la transparence des offres. Il est souvent reproché aux fournisseurs historiques, comme EDF, de mélanger les offres réglementées et les offres de marché, rendant la comparaison difficile pour le consommateur. Pour remédier à cette situation, le rapport préconise une dissociation plus claire entre ces différentes options, afin d’assurer une meilleure lisibilité et d’éviter toute confusion au moment de la souscription.
Comment améliorer le marché de l’électricité ?
Si le maintien des TRVE est désormais acté, leur évolution reste un sujet ouvert. Le gouvernement envisage plusieurs ajustements pour améliorer la compétitivité du marché tout en protégeant les consommateurs. Parmi les pistes évoquées, la mise en place d’un cadre plus strict pour encadrer les modifications de contrats et les estimations de factures est une priorité. Les fournisseurs pourraient être soumis à des exigences renforcées en matière d’information et de préavis, afin d’éviter les hausses tarifaires brutales qui ont marqué la fin du bouclier tarifaire.
La Commission européenne doit encore se prononcer sur la conformité de cette décision avec les règles du marché intérieur. Bruxelles pourrait exiger des adaptations, voire imposer une suppression progressive du dispositif à moyen terme. En attendant, la France mise sur une approche hybride : conserver les TRVE tout en introduisant des garde-fous pour renforcer la transparence et limiter les distorsions de concurrence.