Récession en France : vers une crise économique en 2025 ?

Les signaux de l’économie française paraissent positifs en cette fin d’année 2024, grâce notamment aux bons résultats du troisième trimestre boosté par les Jeux Olympiques de Paris. Mais dans les faits, la France va mal, très mal. Et la censure ne va rien faire d’autre que rajouter une couche d’incertitude à une situation déjà très compliquée.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 9 décembre 2024 à 6h00
Economie : la récession frappe déjà la France
Economie : la récession frappe déjà la France - © Economie Matin
3,3%L'OCDE prévoit une croissance mondiale de 3,3% en 2025.

Patrick Martin, président du Medef, a en effet lancé un signal d’alarme sur l’état de l’économie française. Il affirme, mais ce n’est pas la première fois, que la France est déjà entrée en légère récession.

La récession est déjà en France selon le Medef

La déclaration de Patrick Martin, relayée par plusieurs médias, repose sur des éléments concrets et inquiétants. « Je pense qu’au moment où je vous parle, nous sommes déjà rentrés en légère récession. Toutes les dernières estimations publiques ou d’organismes économiques, à demi-mot, le disent », a-t-il déclaré au Journal du Dimanche (JDD). Une analyse qui découle des indicateurs qui témoignent d’un ralentissement marqué de l’activité économique.

L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) a récemment estimé que l’incertitude politique actuelle pourrait réduire la croissance de 0,3 % en 2025, amputant ainsi le PIB de 9 milliards d’euros et privant les finances publiques de 4 milliards d’euros de recettes fiscales. En parallèle, le nombre de faillites d’entreprises a atteint 66 000 cette année, un record historique. De son côté, l’OCDE a baissé la prévision de croissance de l’Hexagone pour 2025 tandis que les agences de notation s’inquiètent des conséquences de la censure historique du gouvernement Barnier.

Récession : Les investisseurs s’inquiètent… et ne donnent plus d’argent

Les craintes exprimées par Patrick Martin trouvent également un écho dans les comportements des investisseurs. Selon lui, « la moitié des investisseurs étrangers qui disaient vouloir investir en France ont suspendu voire annulé leur projet ». Cette réticence est un coup dur pour l’attractivité économique de la France, qui fait face à une perte de compétitivité face à d’autres pays européens. En Espagne, au Portugal ou en Italie, des réformes pro-business ont permis de dynamiser l’économie et de renforcer l’activité industrielle, contrastant fortement avec la situation française.

L’impact de ce désengagement des investisseurs est visible dans plusieurs secteurs. Le bâtiment, par exemple, traverse une crise sans précédent. « Nous sommes aujourd’hui sur un rythme de 10 000 postes supprimés chaque mois dans la construction. Le nombre de mises en chantier est retombé au niveau de 1953, avec cette nuance qu’en 1953, nous comptions 24 millions d’habitants de moins », déplore Patrick Martin. Ce recul du secteur immobilier, essentiel pour l’emploi et les recettes fiscales locales, alimente une spirale de ralentissement économique.

France : une désindustrialisation qui s’accélère

Le tableau économique dressé par le président du Medef est encore plus sombre lorsqu’il évoque l’industrie française. « Le taux d’utilisation des capacités de production industrielle est tombé à 75 %. Quand l’industrie tourne normalement, ce chiffre est à 83 ou 84 %. Et dans certains secteurs, c’est pire encore », explique-t-il au JDD. La chimie, la sidérurgie et l’automobile sont particulièrement touchées, avec des usines qui peinent à maintenir leur activité.

Ces difficultés industrielles soulèvent des interrogations sur la stratégie économique de la France. La dépendance accrue aux décisions politiques, dans un contexte d’incertitude budgétaire, est pointée du doigt. Patrick Martin rappelle que « les dépenses publiques représentent aujourd’hui 56 % du PIB, contre 35 % dans les années 1960 ». Cette sur-dépendance à la sphère publique fragilise les entreprises et limite leur capacité à s’adapter à un environnement économique globalisé.

Une économie qui vacille sous le poids des choix politiques

Le président du Medef ne mâche pas ses mots lorsqu’il s’agit de critiquer la classe politique française. « Au Medef, nous sommes très inquiets de voir que, dans les joutes politiques actuelles, l’enjeu majeur de l’économie réelle n’est pas pris en compte par beaucoup d’acteurs », déclare-t-il au JDD. Le reflet d’une frustration croissante face à l’incapacité des responsables politiques à définir un cap clair pour l’économie française.

La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), pourtant promise par le président Macron, est un exemple de réforme qui n’a pas été menée à terme. Ce manque de cohérence politique nuit à la compétitivité des entreprises françaises. « Si, dans le même temps, la France accentue la pression fiscale sur nos entreprises et que les droits de douane augmentent aux États-Unis, je vous laisse imaginer l’ampleur du décrochage de l’économie française », prévient Patrick Martin.

Risque de récession : un appel au sursaut politique et économique

Face à cette situation, le Medef appelle à un sursaut. « Nous sommes à l’heure des choix », martèle Patrick Martin. Il demande des mesures immédiates pour relancer l’économie et restaurer la confiance des acteurs économiques. La baisse des taux directeurs de la Banque centrale européenne, bien que trop lente selon lui, constitue une opportunité pour redynamiser l’investissement et la consommation.

Cependant, la clé réside dans une vision politique claire et cohérente. « De grâce, que les responsables politiques s’accordent vite à définir un cap stable, courageux et crédible pour les entreprises et les ménages », implore le président du Medef. Cet appel souligne l’urgence de prendre des décisions audacieuses pour préserver la compétitivité de la France et éviter une dégradation économique encore plus marquée.

L’avenir de l’économie française est à un tournant critique. Les avertissements du Medef et les chiffres doivent servir d’électrochoc. Si aucune réponse politique et économique n’est apportée rapidement, la récession actuelle pourrait marquer le début d’une crise bien plus profonde.

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Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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