Droits de douane : Harley Davidson va-t-il (encore) devoir augmenter ses prix ?

Pour la seconde fois, Harley Davidson pourrait subir de nouveau l’impact des politiques douanières américaines. Une décision reportée pour l’instant mais qui pourrait menacer les ventes de la firme de Milwaukee en France, et plus largement en Europe.

Jean Baptiste Le Roux
By Jean-Baptiste Le Roux Last modified on 16 avril 2025 8h56
Harley Davidson pourrait être contraint d'augmenter une fois encore ses prix en Europe. Pixabay
Harley Davidson pourrait être contraint d'augmenter une fois encore ses prix en Europe. Pixabay - © Economie Matin

Harley Davidson, icône emblématique américaine, se retrouve à nouveau confrontée aux conséquences d’une guerre commerciale relancée par Donald Trump. Après les turbulences de 2018, le constructeur de motos risque de nouvelles hausses tarifaires européennes, qui pourraient fragiliser sa présence sur un marché clé.

Les conséquences de la crise douanière pour Harley Davidson

Harley Davidson a longtemps symbolisé l’excellence américaine et la liberté de rouler sur les grands espaces. Pourtant, cette image idyllique se heurte désormais aux réalités économiques complexes d'une guerre commerciale initiée par Donald Trump. En représailles aux taxes américaines imposées sur l'acier et l’aluminium européen, l'Union européenne envisage d'imposer des tarifs douaniers élevés sur plusieurs produits américains, incluant explicitement les célèbres motos Harley Davidson. Cette mesure touche directement deux États américains stratégiques, le Wisconsin et la Pennsylvanie, bastions électoraux de Trump, où Harley Davidson possède des installations industrielles importantes.

L’Europe constitue le deuxième marché le plus lucratif pour Harley Davidson, après les États-Unis. Une augmentation notable des tarifs pourrait donc significativement freiner les ventes européennes du constructeur. En 2018, lors d’un conflit similaire, les droits de douane européens étaient passés brutalement de 6% à 31 %, engendrant une forte hausse des prix et une chute des ventes en Europe. En l'espèce cela s'était traduit par une hausse moyenne de 2.000 euros par moto.

Une délocalisation en Thaïlande sans effet positif

Pour contrer l’impact des taxes européennes, Harley Davidson avait adopté une stratégie audacieuse : délocaliser partiellement sa production en Thaïlande. En assemblant ses motos en Asie à partir de composants américains, la firme pensait ainsi contourner les surtaxes appliquées aux produits entièrement fabriqués aux États-Unis. Toutefois, cette approche n'a pas été sans conséquences. Donald Trump avait publiquement critiqué cette décision, accusant l’entreprise emblématique d’abandonner les travailleurs américains au profit d’intérêts commerciaux immédiats.

Cependant, ce stratagème s’est avéré moins efficace que prévu. En novembre 2024, la Cour de justice européenne a jugé que ces motos assemblées en Thaïlande restaient soumises aux mêmes taxes que celles produites directement sur le sol américain. Ce jugement a remis en question la viabilité économique de la stratégie de Harley-Davidson et a démontré les limites des solutions de contournement face à des politiques douanières déterminées.

Et maintenant ?

Concrètement, le fait qu'Harley Davidson fabrique ses motos hors du sol américain ne change donc rien pour l'Europe, engagée dans une guerre commerciale avec les Etats-Unis. Et si l'UE décide d'augmenter à son tour les droits de douane sur les produits américains, qu'ils soient fabriqués sur le sol américain, ou pas (dans le cas d'Harley), la firme de Milwaukee n'aura d'autre choix que d'augmenter, une fois encore, le prix de ses motos, déjà assez onéreuses.

Dernièrement, le patron de l'une des principales concessions Harley Davidson de France nous expliquait que cette hausse des droits de douane entraînerait une hausse des prix pour les motos neuves, mais également pour les motos d'occasion, afin que le marché suive. "C'est comme l'immobilier" a-t-il précisé. Face à nos questions, et après le report de la mesure fiscale de Donald Trump, il a également indiqué que toutes les concessions Harley de France avaient reçu un "courrier officiel" de Milwaukee, expliquant qu'on ne toucherait pas au prix des motos, au moins jusqu'au mois de juin.

Après ? C'est l'inconnu pour l'instant. Un contexte qui pourrait pousser certains motards à se précipiter en concession pour repartir avec un morceau du mythe américain avant que les prix ne flambent. Ce qui pourrait avoir un effet bénéfique sur les ventes de la marque à court terme, avant de prendre de plein fouet la hausse des droits de douane. Qui pourrait en l'occurence ne rien avoir de salutaire pour les ventes d'Harley Davidson en Europe. Pour ceux qui ont la fibre "placement", il y a peut être un coup double à jouer actuellement : rouler sur une belle américaine, avec la quasi-assurance que la moto prendra de la valeur à court terme. Ce qui est plutôt rare pour ce genre d'achat...

Jean Baptiste Le Roux

Jean-Baptiste Le Roux est journaliste. Il travaille également pour Radio Notre Dame, en charge du site web. Il a travaillé pour Jalons, Causeur et Valeurs Actuelles avec Basile de Koch avant de rejoindre Economie Matin, à sa création, en mai 2012. Il est diplômé de l'Institut européen de journalisme (IEJ) et membre de l'Association des Journalistes de Défense. Il publie de temps en temps dans la presse économique spécialisée.

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