Semi-conducteurs : Trump souffle le chaud et le froid sur les importations

Entre jeux de pouvoir et stratégie industrielle, la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine vient de franchir une nouvelle étape. Derrière l’annonce d’exemptions se cache une réalité bien plus mordante pour le secteur des semi-conducteurs.

Anton Kunin
By Anton Kunin Published on 14 avril 2025 8h09
Semi-conducteurs : Trump souffle le chaud et le froid sur les importations
Semi-conducteurs : Trump souffle le chaud et le froid sur les importations - © Economie Matin
125%La semaine du 7 avril 2025, Donald Trump annonçait des droits de douane de 125% sur les semiconducteurs chinois.

Trump relance l’offensive avec une enquête nationale sur les semiconducteurs

Donald Trump ne sait décidément pas faire les choses à moitié. Le 12 avril 2025, son administration annonçait en grande pompe une exemption tarifaire pour les produits électroniques importés de Chine — une décision qui a fait bondir les marchés. Les smartphones, ordinateurs et autres composants stratégiques semblaient, pour un court instant, échapper aux droits de douane écrasants imposés depuis des mois.

Mais à peine deux jours plus tard, le masque tombe. Le président américain, fidèle à son art du retournement, change d'avis. Le coup de théâtre survient lorsque Donald Trump annonce une enquête pour raisons de sécurité nationale sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement électronique, avec une cible très claire : les semiconducteurs. Sur les réseaux sociaux, il proclame vouloir s'attaquer à l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement des composants électroniques. Cette déclaration n’est pas restée lettre morte. Kevin Hassett, directeur du Conseil économique national, confirme sur CNN : les semi-conducteurs sont désormais considérés comme des biens stratégiques à rapatrier coûte que coûte sur le sol américain.

Des exemptions temporaires... avant la tempête tarifaire

Le message envoyé aux entreprises technologiques ? Préparez-vous à de nouvelles taxes. Le secrétaire au Commerce Howard Lutnick est on ne peut plus clair : « Il dit qu'ils sont exemptés des droits de douane réciproques, mais qu'ils sont inclus dans les droits de douane sur les semi-conducteurs, qui arriveront probablement dans un mois ou deux ». Il précise également que ces nouveaux droits de douane seront des « tarifs spéciaux ciblés », applicable aux smartphones, ordinateurs, mais aussi aux médicaments.

Le même jour, The Guardian rapporte les propos de Lutnick selon lesquels ces mesures visent à rapatrier la production sur le territoire américain, sous couvert d’enjeux de souveraineté économique. Une rhétorique déjà bien huilée sous l’ère Trump, qui revient en force : « Il s'agit de choses qui relèvent de la sécurité nationale et qui doivent être fabriquées en Amérique ».

Réactions en chaîne et incertitude économique

En Chine, la riposte ne s’est pas fait attendre. Le ministère du Commerce qualifie l’exemption d' « un petit pas vers la correction de sa pratique unilatérale erronée de « tarifs réciproques ». Un camouflet diplomatique, certes modéré, mais assorti d’une exigence : la levée totale du régime tarifaire américain.

Du côté des marchés, le yoyo continue. Les actions d’Apple et de Nvidia ont brièvement rebondi après l’annonce des exemptions, avant de vaciller face aux menaces de surtaxes ciblées. La confusion règne aussi à Washington : « Il n'y a pas de politique tarifaire, mais seulement du chaos et de la corruption », dénonce la sénatrice démocrate Elizabeth Warren sur ABC.

Même dans le camp républicain, certains s'interrogent. L’investisseur Bill Ackman, pourtant favorable à Trump, plaide pour une pause tarifaire de 90 jours avec la Chine : « Il atteindrait le même objectif en amenant les entreprises américaines à délocaliser leurs chaînes d'approvisionnement depuis la Chine sans subir les perturbations et les risques ».

Quand la politique tarifaire devient un levier électoral

Derrière cette surenchère de déclarations, une logique politique apparaît : Donald Trump se positionne comme le seul maître du tempo économique, alternant menaces et accalmies, dans un jeu de bras de fer qui embrouille partenaires commerciaux comme marchés financiers. Le secteur des semi-conducteurs, pivot de l’innovation mondiale, devient l’otage d’une stratégie électoraliste au timing bien défini.

Le 13 avril 2025, sur le chemin du retour vers la Maison-Blanche, Trump résume sa vision dans un aveu candide à bord d’Air Force One : « Nous voulions simplifier les choses par rapport à beaucoup d'autres entreprises, parce que nous voulons fabriquer nos puces, nos semi-conducteurs et d'autres choses dans notre pays ».

Mais la multiplication des annonces contradictoires, des exemptions partielles suivies de surtaxes ciblées, laisse un goût amer. Les entreprises peinent à planifier. Les investisseurs vacillent. Et les citoyens ? Ils assistent à une nouvelle guerre des nerfs, où le « made in America » devient une injonction tarifaire plus qu’un projet industriel clair.

Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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