Droits de succession : la Cour des comptes suggère une réforme

La Cour des comptes a ouvert le débat sur la réforme des droits de succession. Dans son rapport dévoilé le 25 septembre 2024, elle propose des pistes pour rééquilibrer un impôt largement contesté en France.

Grégoire Hernandez
Par Grégoire Hernandez Modifié le 26 septembre 2024 à 10h28
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Droits de succession : la Cour des comptes suggère une réforme - © Economie Matin
45 %Actuellement, les héritiers en ligne directe, c'est à dire les enfants et les petits-enfants, bénéficient d’un abattement de 100 000 euros et sont imposés à un taux progressif, allant de 5 % si la part taxable est inférieure à 8 072 euros à 45 % au-delà de 1 805 677 euros.

Les droits de succession : un impôt mal accepté par les Français

Les droits de succession sont l'impôt le moins populaire en France. Selon le rapport de la Cour des comptes du 25 septembre 2024, 87 % des Français souhaitent qu'ils soient diminués. Cependant, les recettes issues de cet impôt ont explosé, passant de 7 milliards d'euros en 2011 à 16,6 milliards d'euros en 2023. La France est ainsi en tête des pays de l'OCDE en matière de poids des donations et successions dans le PIB (0,74 %). Face à ce constat, la Cour des comptes estime qu’une réforme est envisageable, mais à condition qu’elle se fasse "à produit constant". En clair, il ne peut y avoir de baisse des prélèvements sans une compensation budgétaire ailleurs. Le gouvernement, confronté au dérapage du déficit public, doit donc envisager une réforme "équilibrée" qui toucherait principalement les avantages fiscaux dérogatoires.

La Cour des comptes a dans son viseur deux dispositifs qui favorisent les ménages les plus fortunés : le "Pacte Dutreil" et l'assurance-vie. Ces niches fiscales permettent aux héritiers d'entreprises familiales et aux détenteurs d’assurance-vie de bénéficier d'exonérations significatives. Par exemple, le "Pacte Dutreil", créée en 2000, offre une exonération de 75 % sur la valeur des parts ou actions d’une société transmise. Quant à l’assurance-vie, elle offre des abattements fiscaux généreux, privilégiant les ménages aisés. En effet, une assurance-vie permet à chaque bénéficiaire de profiter d’un abattement de 152 500 euros. Ensuite, les sommes sont taxées hors succession : 20 % pour les 700 000 premiers euros et 31,25 % au-delà. Mais cela n'est possible que si les versements ont été faits avant les 70 ans du défunt. Passé cet âge, un abattement global de 30 500 euros s'applique, le reste étant soumis aux droits de succession. La Cour propose de limiter ces dispositifs pour financer une baisse des taux d'imposition en faveur des héritiers "collatéraux", comme les frères, sœurs, neveux, nièces ou encore les enfants du conjoint dans les familles recomposées. Ainsi, elle espère mieux prendre en compte "les évolutions familiales et sociétales". Cependant, la Cour ne chiffre pas encore l'impact financier d'une telle réforme.

Des héritiers collatéraux défavorisés par rapport aux enfants

Actuellement, les héritiers en ligne directe, c'est à dire les enfants et les petits-enfants, bénéficient d’un abattement de 100 000 euros et sont imposés à un taux progressif, allant de 5 % si la part taxable est inférieure à 8 072 euros à 45 % au-delà de 1 805 677 euros. En revanche, les héritiers collatéraux, comme les frères et sœurs, neveux et nièces, ou les beaux-enfants du défunt, sont soumis à une fiscalité nettement plus lourde. Les taux d'imposition varient de 45 % à 60 % avec des abattements beaucoup moins avantageux. La Cour des comptes souligne l'injustice de ce système, surtout qu'il y a de plus en plus de familles recomposées. La réforme proposée vise à réduire cet écart en abaissant les taux pour les héritiers collatéraux et les enfants de familles recomposées, financée par la réduction des avantages fiscaux des ménages les plus riches.

Le rapport de la Cour des comptes appelle à une réforme prudente. Bien qu'elle s'oppose aux allègements des droits de succession proposés par certains partis politiques, comme les macronistes ou le RN, elle envisage une refonte des dispositifs dérogatoires. En France, la fiscalité du patrimoine atteint déjà 4,1 % du PIB en 2022, soit le taux le plus élevé de l'Union européenne. Une réforme des droits de succession doit donc se faire sans réduire les recettes fiscales globales. La présidente de la première chambre de la Cour des comptes, Carine Camby, évoque l’idée de s’inspirer du système allemand, où le pourcentage d'exonération décroît avec la valeur de l'entreprise transmise. Quoi qu’il en soit, le gouvernement du nouveau Premier ministre, Michel Barnier, devra trancher sur cette question sensible, tout en assurant une "équité" fiscale.

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Grégoire Hernandez

Étudiant en école de journalisme. Journaliste chez Économie Matin depuis septembre 2023.

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