Le Doliprane va-t-il sortir de la souveraineté française ?

Avec des propositions de rachat d’Opella, la filiale de Sanofi qui produit le Doliprane, l’avenir du médicament est au cœur de débats économiques et politiques. La potentielle prise de contrôle par des fonds étrangers interroge sur la capacité de la France à maintenir sa souveraineté industrielle dans le secteur pharmaceutique.

Jean Baptiste Le Roux
Par Jean-Baptiste Le Roux Publié le 26 septembre 2024 à 14h00
Le Doliprane est sous la menace de rachats par des fonds étrangers. Wikipedia
Le Doliprane est sous la menace de rachats par des fonds étrangers. Wikipedia - © Economie Matin

Le Doliprane, un symbole de santé publique en jeu

Le Doliprane, médicament phare du quotidien des Français, est au centre de discussions stratégiques concernant son avenir. En 2023, Sanofi a décidé de vendre sa filiale Opella, responsable de la production du Doliprane, pour se concentrer sur d'autres secteurs, notamment la recherche en oncologie et immunologie. Cette décision a éveillé des craintes, notamment sur une possible délocalisation de la production à l’étranger. Si le paracétamol, ingrédient principal du Doliprane, est déjà importé, l’assemblage des comprimés a toujours lieu en France, dans les usines de Lisieux et Compiègne. La production locale a permis de répondre à une demande croissante, avec 453 millions de boîtes fabriquées en 2023.

Cependant, l’absence d’offre de reprise entièrement française a déclenché des inquiétudes. Les fonds d’investissement intéressés par l’achat, parmi lesquels Clayton, Dubilier & Rice (CD&R), un acteur américain, et PAI Partners, un fonds français allié à des partenaires internationaux, pourraient bien transférer une partie des opérations hors de France. Le gouvernement, vigilant face à ces développements, cherche à éviter une perte de souveraineté industrielle, surtout dans un contexte où la France tente de renforcer son indépendance en matière de santé publique.

Des acheteurs étrangers, la souveraineté française en jeu

Le principal point de tension dans ce dossier est le risque de voir le contrôle de la production du Doliprane passer sous pavillon étranger. D'après le quotidien Le Parisien, Clayton, Dubilier & Rice (CD&R) est bien positionné. Et cela en raison de ses investissements antérieurs en France, tandis que PAI Partners, dans un consortium incluant des fonds de Singapour et d’Abu Dhabi, propose une structure de gouvernance fragmentée. Cette dernière option, bien que laissant Sanofi avec 50% des parts, soulève la question de la gouvernance : qui sera réellement aux commandes d’Opella ? Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a clairement exprimé son souhait de maintenir une souveraineté sanitaire sur ce produit essentiel à la santé publique française.

Dans un contexte de mondialisation, le risque de délocalisation n’est pas anodin. Si des garanties sur le maintien de la production en France ont été évoquées, rien n’est encore certain. Sanofi a investi massivement ces dernières années pour accroître la capacité de production de Doliprane dans ses sites en France, avec des projets d’augmentation des volumes de production jusqu’à 2025. Mais ces investissements suffiront-ils à convaincre les autorités françaises et le public de la pérennité d’une production nationale ?

Une décision à venir : entre risques et opportunités

La question de la souveraineté industrielle est plus que jamais sur la table. Si aucune décision ne sera prise avant la fin de l’année, la potentielle vente d’Opella pose un dilemme : garantir la compétitivité internationale de Sanofi tout en préservant des emplois et une production locale. Une alternative à la vente serait l’introduction en bourse d’Opella, option également envisagée par le conseil d’administration de Sanofi. Cela pourrait permettre de garder un certain contrôle tout en apportant les capitaux nécessaires à son développement.

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Jean Baptiste Le Roux

Jean-Baptiste Le Roux est journaliste. Il travaille également pour Radio Notre Dame, en charge du site web. Il a travaillé pour Jalons, Causeur et Valeurs Actuelles avec Basile de Koch avant de rejoindre Economie Matin, à sa création, en mai 2012. Il est diplômé de l'Institut européen de journalisme (IEJ) et membre de l'Association des Journalistes de Défense. Il publie de temps en temps dans la presse économique spécialisée.

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