Doctolib veut vos données personnelles pour son intelligence artificielle

Depuis quelques semaines, une petite fenêtre s’ouvre sur l’application Doctolib, discrète mais lourde de conséquences. Ce message, que la plupart des utilisateurs balaient d’un simple clic pour accéder plus rapidement à leurs rendez-vous médicaux, recèle une vérité bien plus complexe : Doctolib veut utiliser vos données personnelles pour entraîner son intelligence artificielle.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 13 août 2024 à 6h35
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217 MILLIONS €Le chiffre d'affaires de Doctolib était de 217 millions d'euros en 2022

Un enjeu de taille pour Doctolib : transformer la santé avec l'IA

Doctolib, leader français de la prise de rendez-vous en ligne, voit en l'intelligence artificielle (IA) un outil capable de métamorphoser l'expérience médicale. L'entreprise souhaite améliorer la précision de ses services en analysant des données massives, allant de l'historique de vos consultations aux documents médicaux que vous téléchargez. L'objectif affiché est noble : offrir une médecine plus personnalisée, plus réactive, plus efficace. Mais à quel prix ?

Derrière cette volonté d’innovation se cache une réalité moins reluisante. En demandant votre consentement pour collecter ces données, Doctolib risque de franchir une ligne rouge. La santé est un domaine éminemment sensible, et l'utilisation des données personnelles dans ce cadre devrait faire l'objet de toutes les précautions possibles. Les donner à une entreprise tierce n’est donc pas du tout anodin.

Santé : quelles données veut récupérer Doctolib ?

Les informations que Doctolib propose de collecter pour nourrir son IA sont loin d'être anodines. Elles incluent les détails de vos rendez-vous passés, mais aussi des éléments bien plus sensibles : vos notes médicales, des enregistrements vocaux de consultations, et même les profils médicaux détaillés. Ces données, une fois récoltées, sont toutefois anonymisées, une pratique qui reste imparfaite et contestée par de nombreux experts en protection des données.

L'anonymisation, bien qu'elle réduise le risque de ré-identification, n'est pas une garantie absolue. Le traitement de données aussi riches et variées peut potentiellement conduire à la ré-identification des patients, surtout lorsque ces données sont croisées avec d'autres bases. Le fait que Doctolib puisse conserver ces informations jusqu'à trois ans ajoute une couche supplémentaire de risque.

Comment protéger vos données face à cette vague de numérisation ?

Pour les patients soucieux de protéger leurs informations personnelles, il existe heureusement des moyens de contrer cette collecte massive. Doctolib permet à ses utilisateurs de refuser l’utilisation de leurs données pour l’entraînement de l’IA. Cette option, disponible dans les paramètres de l'application, n'est toutefois pas mise en avant et nécessite une vigilance accrue de la part des utilisateurs. Doctolib n’a pas le choix : c’est le RGPD qui l’oblige à demander le consentement des utilisateurs pour cette collecte de données personnelles.

Refuser le consentement, c’est refuser de se soumettre à une logique de datafication systématique de la santé. C’est aussi un acte de résistance face à la tentation croissante de monétiser des données personnelles sous couvert d'innovations technologiques.

Le cas de Doctolib n’est que la partie émergée de l’iceberg. À l’heure où l'intelligence artificielle se développe à un rythme effréné, il est plus que jamais nécessaire d’ouvrir un débat public sur l’utilisation des données personnelles dans le domaine de la santé. Les patients, les professionnels de santé, mais aussi les législateurs doivent être impliqués dans cette réflexion pour garantir que les innovations technologiques ne se fassent pas au détriment des droits fondamentaux des citoyens.

En fin de compte, la question centrale reste celle de la confiance. Les utilisateurs de Doctolib, tout comme ceux des autres plateformes numériques, doivent pouvoir faire confiance à ces entreprises pour protéger leurs données.

Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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