Jamais les entreprises n’avaient autant redistribué leurs bénéfices à leurs actionnaires. En 2024, les dividendes versés à l’échelle mondiale ont atteint la somme vertigineuse de 1 750 milliards de dollars, en progression de 6,6 % par rapport à l’année 2023.
Dividendes 2024 : une année record à 1 750 milliards de dollars

Un niveau de dividendes inédit dans l’histoire
L’année 2024 restera comme un millésime exceptionnel pour les actionnaires des grandes entreprises cotées. Selon l’étude annuelle réalisée par le gestionnaire d’actifs Janus Henderson, les sociétés ont redistribué un total de 1 750 milliards de dollars en dividendes à travers le monde, soit une hausse de 6,6 % en un an. Cette augmentation dépasse les prévisions initiales et s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, la bonne santé du secteur financier a joué un rôle déterminant, les banques ayant vu leurs bénéfices s’envoler grâce aux hausses de taux d’intérêt. D’autre part, le secteur technologique a connu une mutation majeure avec l’entrée en scène de nouveaux acteurs dans la redistribution de dividendes, notamment Meta, Alphabet et Alibaba, qui ont versé leurs premiers dividendes à leurs actionnaires.
Les États-Unis, sans surprise, restent le premier pourvoyeur mondial de dividendes. Avec un total de 651 milliards de dollars versés en 2024, le pays représente à lui seul plus d’un tiers du total mondial. Ce montant est en hausse de 50 milliards de dollars par rapport à 2023, soit une progression supérieure aux versements totaux effectués par la Suisse et presque équivalente à ceux réalisés par l’Allemagne. Derrière les États-Unis, le Royaume-Uni conserve la deuxième place avec 90,6 milliards de dollars, bien que ce chiffre soit en baisse pour la deuxième année consécutive, notamment en raison du recul des dividendes versés dans le secteur minier. Le Japon, troisième du classement, affiche une dynamique spectaculaire avec une progression de 15,5 % sur un an et un total de 86 milliards de dollars distribués. La France, de son côté, confirme son statut de première contributrice en Europe avec un montant record de 68,8 milliards d’euros, soit une hausse de 8 %.
Les grandes entreprises françaises ont largement participé à cet essor, notamment Axa et BNP Paribas, qui ont bénéficié de résultats financiers nettement supérieurs aux attentes. Safran, acteur majeur du secteur de la défense, ainsi qu’EssilorLuxottica, spécialisé dans l’optique de luxe, ont également joué un rôle clé dans cette montée en puissance. À l’inverse, la Société Générale a marqué le pas en 2024 avec une baisse drastique de 47 % de ses dividendes, conséquence d’une année plus difficile sur le plan financier.
Des entreprises toujours plus généreuses, avec Microsoft en tête
Le classement des plus grands verseurs de dividendes en 2024 reste dominé par des multinationales américaines et asiatiques. Microsoft conserve son statut d’entreprise la plus généreuse avec ses actionnaires. La firme dirigée par Satya Nadella continue d’afficher une politique de redistribution massive, portée par des résultats solides et une trésorerie florissante. ExxonMobil, qui retrouve son rang de deuxième plus gros distributeur de dividendes après une période plus compliquée en raison de la volatilité des prix du pétrole, confirme l’importance du secteur énergétique dans ces flux financiers.
Les banques occupent une place de choix dans ce classement, avec des mastodontes comme HSBC, JPMorgan et China Construction Bank qui figurent parmi les dix premiers contributeurs. Le retour des dividendes versés par les grandes institutions bancaires traduit la forte rentabilité retrouvée du secteur financier, boosté par les politiques monétaires restrictives et des marges d’intérêt accrues. En parallèle, le secteur technologique connaît une véritable transformation : Meta et Alphabet, jusqu’alors concentrés sur la rétention de liquidités et la croissance interne, ont franchi un cap en versant pour la première fois des dividendes. Alibaba, le géant chinois du commerce en ligne, a suivi cette même tendance. Ces trois sociétés ont à elles seules contribué à 20 % de la croissance mondiale des dividendes en 2024, avec un total de 15,1 milliards de dollars redistribués.
Après des années de réinvestissement dans leur développement, les entreprises commencent à faire profiter leurs actionnaires des profits générés. Ce changement reflète également l’évolution des attentes des marchés : les investisseurs demandent désormais des retours financiers plus directs, en plus de la croissance du cours de l’action.
Les secteurs les plus rémunérateurs pour les actionnaires
L’analyse sectorielle des dividendes distribués en 2024 montre que certaines industries se démarquent nettement. Les banques ont représenté la plus grande part des versements avec un total de 257,6 milliards de dollars, soit une progression de 12,5 % en un an. La hausse des taux d’intérêt qui a considérablement renforcé la rentabilité des établissements financiers a bien joué son rôle. Les hydrocarbures ont également connu une année faste, avec 166,2 milliards de dollars de dividendes versés, principalement par des acteurs tels qu’ExxonMobil et Chevron, profitant de la stabilisation des cours du pétrole.
Le secteur technologique, rarement friand de dividendes, a enregistré une explosion des versements, atteignant un total de 152,2 milliards de dollars. L’entrée de nouveaux acteurs comme Meta et Alibaba explique en partie cette progression, mais elle reflète aussi une tendance plus globale : la maturité croissante des entreprises du numérique les pousse à rétribuer davantage leurs actionnaires. Le secteur des médias, qui inclut notamment Alphabet et Meta, a connu une progression spectaculaire avec un doublement des dividendes versés, atteignant 30,6 milliards de dollars contre 16,6 milliards en 2023.
Si certains secteurs connaissent une dynamique positive, d’autres affichent une baisse. C’est notamment le cas du secteur minier, qui a vu ses dividendes chuter, pénalisé par une demande mondiale en repli et des coûts d’exploitation plus élevés. Le secteur des transports a également réduit sa politique de redistribution, affecté par des marges sous pression et une volatilité accrue des marchés.
Perspectives pour 2025 : une nouvelle année record en vue ?
Après une année 2024 exceptionnelle, les projections pour 2025 indiquent que cette tendance devrait se poursuivre. Janus Henderson anticipe une progression de 5 %, portant le total des dividendes mondiaux à 1 830 milliards de dollars. Toutefois, plusieurs incertitudes subsistent. La politique économique des États-Unis, avec une administration Trump qui prône un protectionnisme et la guerre commerciale, pourrait influencer les flux de capitaux et le comportement des entreprises en matière de dividendes. De même, un regain d’inflation pourrait inciter les banques centrales à maintenir des taux élevés, ce qui aurait un impact sur la rentabilité des entreprises.
En Europe, la croissance des dividendes pourrait ralentir, notamment en raison d’un contexte économique plus fragile. La France, malgré son bon classement en 2024, pourrait voir son rythme de progression s’infléchir, en particulier si la conjoncture politique et économique devient plus incertaine à la suite des incertitudes concernant la guerre en Ukraine et la menace russe.