Dialogue social : les ordonnances Macron de 2017 rencontrent une réussite en demi-teinte

En 2017 les ordonnances Macron modifiaient profondément le droit du travail, en imposant notamment aux entreprises une seule instance représentative du personnel (IRP), le Comité Social et Economique (CSE) et ce plus tard au 1er janvier 2020.

A Werner
Par Antoine Werner Publié le 24 mars 2024 à 8h00
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dialogue sociale, ordonnances, macron, réforme, travail, emploi, relations - © Economie Matin
96,3%96,3% des entreprises sont des TPE sans salariés en France.

Quatre années plus tard il est aujourd’hui intéressant de faire un premier bilan des conséquences de cette réforme, une des plus importante après les lois Auroux de 1982.

Sur le terrain, aucun des partenaires chez nos différents clients, en majorité des grands groupes industriels, pharmaceutiques ou de services, ne remettait en cause la nécessité d’une réforme. En regroupant en une seule instance les anciens Délégués du Personnel (DP), le Comité d’Entreprise (CE) ou le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) la réforme devait permettre de gagner du temps en économisant le passage par plusieurs instances, souvent redondantes. A cette plus grande agilité s’ajoutait une volonté de montée en compétences des différents acteurs, de transparence sur les projets présentés et de valorisation des parcours de représentation du personnel.

Si le dialogue social reste actif dans nos entreprises clientes, au moins deux grandes problématiques sont pointées, notamment au niveau de la posture des Représentants du personnel.

- Un éloignement du terrain
Le regroupement des instances a provoqué la disparition des DP, qui étaient les interlocuteurs de proximité des salariés au quotidien. Aujourd’hui, les représentants des CSE sont fréquemment plus éloignés du terrain et moins rapides pour agir sur les irritants du quotidien. Face à cette évolution, les entreprises très décentralisées ont pu mettre en place, comme le permettait les ordonnances, des Représentants de proximité (en fonction des entreprises : RDP ou RPX). Toutefois ce nouvel acteur, dont les missions sont définies par accord d’entreprise, a souvent été mis en place avec difficulté. Bien souvent cela est revenu à recréer des DP avec moins de moyens et de pouvoirs, le contenu de leurs rôles restant large voire plutôt flou.

- Un manque de formation et de compétences des Représentants du personnel
Aujourd’hui, un(e) élu(e) au CSE doit à la fois être à l’écoute de petits problèmes spécifiques à chaque salarié qui vient le voir, être capable de comprendre les enjeux stratégiques de son entreprise, ou encore s’approprier les impacts d’une prévention primaire des risques professionnels. Une gageure pour des membres de CSE qui sont amenés à traiter indifféremment de sujets qui relevaient de trois instances différentes.

Face à ces difficultés, des solutions existent pour continuer d’améliorer le dialogue social. Et notamment les quelques recommandations ci-après.

- Miser sur la pédagogie :
Se mettre à la portée des différents interlocuteurs est la clef du succès. Côté Direction ne pas hésiter à proposer les plus amples formations ou accompagnements des membres des CSE. Au mieux se former ensemble - élus et Représentants de la Direction -sur les thèmes de consultation les plus complexes à appréhender. Et utiliser certaines Commissions du CSE - formation, égalité professionnelle, économique notamment - pour en faire des lieux d’échanges et de partage de compétences.

- Donner de l’importance au CSSCT
Le plus efficace : travailler soigneusement les projets de transformation avec les CSSCT, préalablement à la délibération du CSE, afin de capitaliser sur l’expertise propre de ses membres. Et, là encore, faire de cette Commission spécifique un lieu d’échanges et de propositions, une instance dédiée à la prévention primaire des risques auxquels pourraient être exposés les salariés. Et une instance qui travaille en partenariat avec les préventeurs ou Responsables sécurité internes à l’entreprise, les services de santé au travail, les CARSAT et autres experts des conditions de travail en entreprise.

- Clarifier les rôles et le pouvoir des Représentants de proximité
Porte cassée, problème d’attribution de places de stationnement, conditions de travail modifiées, prise en charge des inspections SSCT ou relais du CSE en matière d’activités sociales et culturelles, le RPX est multifonctions. Or rien n’est pire qu’un problème du quotidien qui met des semaines à être pris en charge. Les Représentants de proximité ont toute légitimité pour régler rapidement et efficacement les irritants sociaux du quotidien. Donnons-leurs des pouvoirs de décision et d’action adaptés.

Dans notre contexte économique et politique actuel, il est préférable d’accompagner les transformations nécessaires, de faire preuve d’agilité et d’appréhender sereinement les changements. En conséquence un dialogue social efficient est impératif notamment avec des élus et Représentants du personnel actifs et forces de propositions.

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A Werner

Associé de Pactes Conseil, consultant senior. Spécialiste du Droit social et du dialogue social, de la négociation, de la détection des tensions et la gestion de crise sociale.

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