Dette de la France en 2024 : un déficit abyssal de plus de 3300 milliards

Des chiffres vertigineux, des prévisions qui s’effritent et une trajectoire qui inquiète jusqu’aux plus stoïques des économistes : derrière les discours apaisants, le fardeau de la dette publique française révèle une machine budgétaire hors de contrôle.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 27 mars 2025 à 10h35
dette,déficit, moody's, annonce, crise, france, budget
dette,d éficit, moody's, annonce, crise, france, budget - © Economie Matin
0,9%La croissance réelle n’ayant été que de 0,9 % en 2024

Un déficit à 5,8 % : la dette poursuit son inexorable montée

Le 27 mars 2025, l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a livré un diagnostic que personne ne peut plus ignorer : la dette publique de la France a atteint 3 305,3 milliards d’euros en 2024, soit 113,0 % du produit intérieur brut (PIB). Un nouveau montant record.

En parallèle, le déficit public s’établit à 169,6 milliards d’euros, soit 5,8 % du PIB – un résultat un peu meilleur que les 6 % initialement prévus, mais bien plus mauvais que les 4,4 % annoncés par le gouvernement en 2023. Ce n’est pas une amélioration, c’est un moindre effondrement.

Alors que la dépense publique explose, représentant 57,1 % du PIB, les recettes stagnent, freinées par une croissance molle et des rentrées fiscales en net recul. Dans son article du 27 mars 2025, Le Figaro cite la déclaration d’Éric Lombard, ministre de l’Économie : « Ça n’est pas une bonne nouvelle, c’est un déficit trop élevé, c’est pourquoi nous devons le réduire », a-t-il déclaré à France Inter. L’aveu est lucide, presque contrit, mais il n’occulte en rien l’incapacité chronique à respecter les trajectoires annoncées.

Une explosion des dépenses, une économie sous perfusion : l'État s’enfonce

Ce ne sont pas les dépenses militaires ni les grands investissements industriels qui minent les finances publiques. Non. Ce sont principalement les prestations sociales, en hausse de 5,5 % en 2024 (+39,1 milliards d’euros), qui absorbent la moitié de la progression globale des dépenses. Le système est saturé, les dépenses obligatoires automatiques prolifèrent, tandis que la marge de manœuvre budgétaire s’érode.

Selon Les Échos du 27 mars 2025, 40 % de la hausse est due aux retraites, le reste provenant d’indemnisations diverses. Le gouvernement se félicite d’avoir « bien tenu les dépenses », mais la réalité comptable raconte une tout autre histoire. En séance au Sénat le 19 mars 2025, Éric Lombard nuance : « Nous avons de bonnes nouvelles s’agissant des dépenses des collectivités locales et de la sphère sociale ». Une pirouette rhétorique face à une situation structurelle devenue intenable.

Côté recettes, le désenchantement est brutal : 41 milliards d’euros manquent à l’appel par rapport aux prévisions initiales. Le dynamisme fiscal attendu ne s’est pas matérialisé, la croissance réelle n’ayant été que de 0,9 % en 2024 selon l’INSEE. Le taux de prélèvements obligatoires chute à 42,8 % du PIB, un retour à des niveaux d’avant 2012, privant l’État de ressources pour financer son train de vie.

Dette publique 2024 : vers une spirale incontrôlable ?

Au quatrième trimestre 2024, la dette publique augmente encore de 4 milliards d’euros. Or, seules la Grèce et l’Italie affichent une dette plus élevée que l’Hexagone en pourcentage de PIB. Les perspectives ne laissent guère place à l’optimisme. D’après le ministère de l’Économie, la dette pourrait culminer à 116,5 % du PIB en 2027, et le retour sous les 3 % de déficit est désormais repoussé à 2029. En attendant, le pays continuera à vivre à crédit, à emprunter pour rembourser ses emprunts, tout en s’endettant davantage pour soutenir une économie à bout de souffle.

La charge des intérêts de la dette, elle, grimpe de 14,6 % pour atteindre 2 % du PIB : c’est le retour brutal du coût de l’endettement, autrefois absorbé par les taux bas. Le levier monétaire s’est inversé. Le poids de la dette devient une contrainte politique majeure, voire une menace pour la souveraineté budgétaire du pays.

Le 15 avril 2025, une conférence des finances publiques réunira les principales institutions. Objectif affiché : définir une trajectoire de redressement. Mais avec une élection présidentielle en ligne de mire, quelle coalition osera prendre le risque de parler rigueur et austérité ?

La France vit largement au-dessus de ses moyens

La dette française en 2024 n’est pas un accident, mais le fruit d’une succession de renoncements politiques et d’illusions économiques. Le pays vit au-dessus de ses moyens et repousse sans cesse l’heure des comptes. Derrière les chiffres, c’est un modèle social fragilisé, un État désorganisé, et une classe politique tétanisée par le court terme qui se dessinent.

À défaut de réaction rapide, c’est la contrainte extérieure – marchés, agences de notation, Union européenne – qui imposera ses règles. La France n’aura plus le choix : elle devra ajuster brutalement ses dépenses. Et on se souvient de ce que ça a donné en Grèce...

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

Aucun commentaire à «Dette de la France en 2024 : un déficit abyssal de plus de 3300 milliards»

Laisser un commentaire

* Champs requis