La France s’apprête à franchir un cap inédit dans l’histoire de sa gestion de la dette publique. L’Agence France Trésor (AFT) a annoncé un programme d’émissions de dette pour 2025 inédit. La décision de l’AFT s’inscrit dans un contexte particulier. En raison d’une motion de censure qui a entraîné la chute du gouvernement, la France aborde l’année 2025 sans loi de finances adoptée. Une loi spéciale a néanmoins été votée par les deux chambres du Parlement pour permettre à l’État de continuer à fonctionner.
Dette : en 2025 la France va battre un nouveau record
Cette loi donne à l’AFT la latitude nécessaire pour lever des fonds sur les marchés, afin d’assurer la continuité budgétaire. Toutefois, le montant exact des besoins de financement dépendra des arbitrages budgétaires qui seront réalisés ultérieurement. Reste que l’objectif de levée de dette annoncé par l’Agence France Trésor est d’ores-et-déjà historiquement élevé.
300 milliards d’euros : la dette qui sera levée par la France en 2025
Avec un objectif record de 300 milliards d’euros, l’Agence France Trésor donne le ton : la dette de la France n’évolue pas dans le bon sens. Ce montant, qui dépasse les 285 milliards levés en 2024, témoigne de l’ampleur des défis financiers auxquels l’État français est confronté.
Le programme de financement prévoit des émissions nettes à moyen et long terme atteignant 300 milliards d’euros, un montant susceptible d’être ajusté en fonction des besoins identifiés dans la future loi de finances. Les précédentes années avaient déjà marqué une montée en puissance des emprunts : en 2023, la France avait levé 270 milliards d’euros, puis 285 milliards en 2024. Désormais, c’est donc la barre des 300 milliards d’euros qui devrait être atteinte… alors que justement la dette et le déficit de la France sont au centre des débats et des craintes pour le pays.
Année | Montant levé (en milliards d’euros) |
---|---|
2023 | 270 |
2024 | 285 |
2025 | 300 (prévision) |
Agence France Trésor : Une levée de dette avec quelques nouveautés
Pour 2025, l’AFT introduira plusieurs innovations dans ses pratiques. D’abord, elle lancera de nouveaux titres, avec des obligations assimilables du Trésor (OAT) à 3 ans, 6 ans et 10 ans, ainsi qu’une obligation verte à 30 ans. Une obligation supplémentaire, d’une maturité comprise entre 15 et 20 ans, pourrait également voir le jour en fonction des conditions de marché.
L’AFT envisage par ailleurs d’utiliser la syndication, une méthode de placement qui consiste à vendre directement des titres aux investisseurs institutionnels plutôt que de passer par un système d’enchères. Cette stratégie, déjà employée avec succès ces dernières années, permet de mieux répondre aux attentes spécifiques de certains investisseurs, en particulier ceux spécialisés dans les fonds verts. En janvier dernier, la création d’une nouvelle OAT verte avait permis de lever 8 milliards d’euros, attirant des demandes totalisant 100 milliards d’euros.
Outre les innovations techniques, l’AFT s’efforcera également d’élargir sa base d’investisseurs en intensifiant ses efforts de communication. L’instabilité politique actuelle, ajoutée à la dégradation des perspectives budgétaires, suscite des doutes parmi les investisseurs. L’écart de taux entre la France et l’Allemagne s’est ainsi creusé, un signal de la prudence des marchés. Mais ce n’est pas encore la panique.
Dette, déficit, budget : la France commence mal 2025
La France entame 2025 dans une situation budgétaire particulièrement tendue. Le ratio de la dette publique atteint désormais 112,8 % du produit intérieur brut (PIB), un niveau parmi les plus élevés de l’Union européenne. Le déficit budgétaire, qui était annoncé à 5,6 % du PIB en 2024 et qui devrait dépasser finalement les 6 %, pourrait atteindre 6,2 % en 2025.
Indicateur | Valeur 2024 | Prévision 2025 |
---|---|---|
Dette publique | 112,8 % du PIB | En hausse |
Déficit budgétaire | 5,6 % du PIB | 6,2 % du PIB |
La situation est d’autant plus critique que la France fait face à une procédure pour déficit excessif de la part de l’Union européenne. Avec d’autres pays comme l’Italie ou la Pologne, elle devra présenter un plan de redressement convaincant pour éviter des sanctions. Le gouvernement précédent avait proposé un programme de réduction du déficit budgétaire à 3 % du PIB d’ici 2027, mais ce plan d’austérité a été rejeté, tout comme l’exécutif qui l’avait porté.
Une dette qui ne cesse d’augmenter, mais pour combien de temps ?
L’ampleur des emprunts prévus pour 2025 reflète les besoins immédiats de financement de l’État, mais soulève également des interrogations sur la viabilité à long terme de cette stratégie. La dette contractée aujourd’hui devra être remboursée demain, dans un contexte où les taux d’intérêt augmentent et où les marges de manœuvre budgétaires se réduisent.
Si l’objectif de 300 milliards d’euros est atteint, la France franchira un cap historique, mais à quel prix ? L’efficacité des réformes budgétaires à venir, ainsi que la capacité du gouvernement à restaurer la confiance des investisseurs, seront déterminantes pour l’avenir financier du pays. Plus que jamais, la France joue une partie risquée sur les marchés financiers.