Crédit immobilier : le HCSF est dans l’inaction

« La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent », aurait un jour déclaré Albert Einstein. Au regard de cette citation, on peut aujourd’hui légitimement se demander si le gouverneur de la Banque de France n’est pas entré dans une sorte de folie que nul ne peut arrêter.

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Par Bérangère Dubus Publié le 17 octobre 2023 à 4h00
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Crédit immobilier : le HCSF est dans l’inaction - © Economie Matin
35%Le taux d'endettement maximum est de 35% pour un crédit immobilier.

Qui peut croire que des règles visant à réguler le crédit édictées en 2019, en pleine période d'euphorie boostée par des taux historiquement bas, restent pertinentes en 2023 alors que l'on assiste à une chute des transactions supérieure à celle de 1991 ? Cette obstination à bloquer de manière artificielle l'accès au crédit immobilier, sans jamais réguler le crédit à la consommation, peut également laisser songeur quant à la vision du monde entretenue par le gouverneur de la Banque de France. Une posture qui interroge particulièrement quand on sait que ce dernier a rempli les fonctions de Directeur Général de la société de crédit à la consommation CETELEM de 2011 à 2015.

Des conséquences sociales et politiques majeures

Avec pour résultat une pénurie locative proche de 30% et près de 2 400 000 personnes en attente de logement, la politique actuellement menée par notre banque centrale interroge sur la cohérence avec plusieurs objectifs majeurs fixés par le président de la République. Comment croire que le blocage de l'accès au crédit et donc à la propriété pourraient accompagner efficacement la politique volontariste du gouvernement en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, de lutte contre le chômage ou d’incitation à la mobilité du travail ? Concrètement, en quoi la pénurie locative provoquée par l'immobilisme de la Banque de France qui contraint des conjoints en voie de séparation à cohabiter, qui menace plus de 300 000 emplois dans le BTP et qui empêche des salariés à trouver un logement là où sont les emplois va-t-elle pouvoir permettre de résoudre ces problématiques majeures ?

Les conséquences de cette politique sont également nombreuses sur notre jeunesse avec un nombre grandissant d’étudiants modestes logés dans des campings, voire même contraints d’abandonner leur projet d’études par manque de logement. Dans une période où la dette publique explose et où les Français voient leur taxe foncière augmenter d'année en année, comment justifier de priver les communes et les départements des ressources sur les transactions qui peuvent représenter jusqu'à 30 % de leur budget ? Quelles vont être les conséquences sur les politiques portées par les collectivités locales en matière de protection sociale ou de l’enfance ? Même les initiatives privées de mécénats sportif, culturel ou social, auxquelles contribuent largement les entreprises du BTP se retrouvent fortement impactées par cette politique monétaire. Imaginer réguler l'inflation en provoquant faillites et plans sociaux est un cynisme d'un autre temps. Comment oser assumer une politique aussi élitiste ?

Au-delà même de ces questions essentielles pour notre pays, comment être naïf au point de ne pas deviner à qui va profiter lors des prochaines échéances électorales le sentiment de déclassement et d'humiliation inhérent à l'impossibilité de loger sa famille comme l'ont fait nos parents et grands-parents ? En ajoutant aux difficultés économiques actuelles liées à l'inflation, le blocage de l'accès au crédit aux investisseurs et classes moyennes, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) réunit ainsi tous les ingrédients d'une explosion sociale.

Complexifier l'accès à la propriété et au prêt immobilier quand on sait que 76 % des gens saisissant la Banque de France pour surendettement sont locataires, que 12 % sont hébergés et que seulement 8 % bénéficient d'un crédit immobilier laisse perplexe. Il faut anéantir le mythe du surendettement immobilier : il n'existe tout simplement pas !

Des solutions concrètes et éprouvées

En période d'inflation, il conviendrait tout au contraire de protéger les Français en leur permettant de fixer définitivement leur charge de logement qui pourrait disparaître à la retraite, au lieu de laisser perdurer une situation où les loyers ne cessent d'augmenter. Les solutions pour débloquer la situation sont pourtant là, sans besoin de finances publiques ni même de modifications profondes aux règles historiques relatives au crédit.

Ces solutions relèvent du bon sens et ont toujours fonctionné avant 2019 sans que l'on puisse observer de pic de défaillance :

Allonger les durées de prêt : Le taux fixe permet de renégocier son prêt lorsque le cycle sera baissier, comme cela a été le cas à partir de 2017, en raccourcissant la durée à mensualité équivalente. Ce principe de taux, qui ne peut que baisser par opposition aux loyers, est sécurisant pour tous.

Revenir au calcul dit de compensation des revenus locatifs : En exigeant des banques l'application de la méthode d'endettement classique pour les revenus locatifs, contrairement à avant 2019 où les banques pouvaient appliquer la compensation, on crée un écart d'endettement artificiel de 15 % en moyenne à chiffres équivalents, responsable de la pénurie locative actuelle.

Considérer les prêts réglementés comme un apport tout en les comptant dans l'endettement : Le prêt à Taux zéro ou le prêt patronal ont été créés pour donner un apport aux classes moyennes. Or les banques ne les considèrent plus ainsi, ce qui conduit à des situations aberrantes où 50 % des prêts sont des prêts réglementés, mais on reproche le manque d'apport.

En mettant en place ces 3 mesures, 70 % des crédits seraient débloqués, et on éviterait que la crise du logement ne devienne une crise sociale, peut-être pire que celle des gilets jaunes.

Ainsi, 2022 aura été une année de crise provoquée par l'aveuglement du gouverneur de la Banque de France, qui aura mis un an à accepter ce qui était évident aux yeux de tous : la nécessité de calculer mensuellement du taux d'usure. Une fois cela mis en place, le problème a quasiment été réglé en 4 mois. Que de temps perdu pour des questions d'ego !

2023 aura vu la crise s'aggraver par ce même aveuglement à refuser une évolution consensuelle.

Les courtiers en 2022 avaient manifesté sous les fenêtres de la Banque de France avec le slogan "NI DÉNI NI MÉPRIS". Nous serons à nouveau là avant la prochaine réunion du HCSF annoncée en décembre, avec la ferme intention d'être à nouveau entendus !

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secrétaire générale de l'UIC (Union des Intermédiaires en Crédit Immobilier)

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