Corleo : Kawasaki imagine une moto sans roues

Il arrive parfois que l’industrie s’enflamme pour des visions futuristes qui flirtent avec le délire technologique. Entre fascination et doute, un curieux prototype fait sensation : une monture mécanique baptisée Corleo.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 14 avril 2025 15h36
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corleo-kawazaki-imagine-une-moto-sans-roues - © Economie Matin
150 cm³Chaque jambe dispose de son propulseur individuel, alimenté par un moteur à hydrogène de 150 cm³ situé à l’arrière.

Le 3 avril 2025, à l’Expo Kansai d’Osaka, le constructeur japonais Kawasaki a levé le voile sur un engin pour le moins déconcertant : Corleo, un prototype de véhicule quadrupède présenté comme l’avenir de la mobilité personnelle tout-terrain. Ce robot à jambes motorisées, inspiré à la fois de l’univers équin et de la moto, a immédiatement suscité une avalanche de réactions, entre émerveillement ingénu et scepticisme frontal.

Corleo, le concept de Kawasaki qui troque les roues pour des jambes robotisées

Adieu les pneus, bonjour les sabots. Avec Corleo, Kawasaki jette un pavé dans la mare technologique : une machine mi-moto, mi-bête de métal, équipée de quatre jambes autonomes dotées de sabots en caoutchouc antidérapants, capables , sur le papier, de franchir des terrains accidentés, de gravir des escaliers ou de bondir comme un animal cybernétique.

Chaque jambe dispose de son propulseur individuel, alimenté par un moteur à hydrogène de 150 cm³ situé à l’arrière. Ce dernier génère l’énergie nécessaire via un système de microgénérateurs répartis dans les membres du robot. À cela s’ajoute un tableau de bord high-tech, avec affichage du niveau d’hydrogène, centre de gravité et guidage GPS.

Le pilote n’est pas en reste : le contrôle repose sur les transferts de poids, détectés par des capteurs placés sur les repose-pieds et le guidon, promettant une interaction fluide entre l’humain et la machine.

Corleo de Kawasaki : innovation technologique ou opération marketing ?

Mais que vaut réellement Corleo, au-delà du clip promotionnel tapageur diffusé en boucle à Osaka ? Sur le stand, pas de démonstration dynamique, ni de prototype en mouvement. Juste une carrosserie statique, joliment éclairée, trônant sur une plateforme.

La vidéo diffusée, largement conçue en images de synthèse, montre un pilote affrontant des falaises, des ravins, des forêts, avec une aisance spectaculaire. Mais personne n’a vu Corleo marcher. En clair, le robot ne fonctionne pas encore.

Ce manque de preuve matérielle laisse dubitatif. Derrière la vitrine, aucune preuve de faisabilité réelle, et encore moins d’autonomie. Le prototype relève davantage du manifeste publicitaire que de l’avancée technique concrète.

Pourquoi Kawasaki parie-t-elle sur un robot quadrupède ?

Le projet s’inscrit dans la stratégie "Impulse to Move" de Kawasaki, qui ambitionne de réinventer la mobilité individuelle en intégrant robotique, écologie et ergonomie. Un pari cohérent avec la double compétence du groupe : robotique industrielle (via Kawasaki Robotics) et technologie motocycliste.

Le choix de l’hydrogène, énergie encore marginale dans ce segment, traduit un engagement pour une propulsion propre. Quant aux jambes, elles symbolisent une volonté d’explorer les zones inaccessibles aux véhicules traditionnels : montagnes, forêts, terrains militaires…

Le discours est ambitieux, les images sont bluffantes. Mais la réalité mécanique, elle, n’a pas encore rejoint la fiction.

Corleo : la mobilité du futur ou chimère techno-écolo ?

D’ici à 2050, horizon annoncé pour une possible commercialisation, les défis sont multiples. Structuraux d’abord : comment garantir la stabilité d’un cavalier sur quatre membres motorisés ? Technologiques ensuite : quelle autonomie pour un engin énergivore sur terrains complexes ? Juridiques enfin : quelle réglementation pour un véhicule ni vraiment moto, ni tout à fait robot ?

L’enjeu est clair : transformer un fantasme visuel en produit roulant fiable. Corleo est une belle promesse, certes, mais encore loin d’un usage concret. Le spectre du gadget de salon plane, comme pour tant de concepts morts-nés.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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