Dans le sillage de la COP28 à Dubaï, l’attention politique européenne et internationale se porte à nouveau sur le changement climatique et la meilleure façon de lutter contre ses effets néfastes, en examinant la manière dont les dirigeants mondiaux jouent leur rôle au niveau local. Pour de nombreux pays, cette stratégie reposera notamment sur l’hydrogène, comme moyen de réduire les émissions liées aux combustibles fossiles.
COP28 : l’UE doit renforcer son économie de l’hydrogène
Cependant, bien qu’il puisse être une réponse au dilemme climatique puisqu'il s'agit d'une source d'électricité flexible et sans émission, son exploitation demeure complexe. Selon la Commission européenne, il représentait moins de 2 % de la consommation d'énergie européenne l'année dernière et était principalement utilisé pour fabriquer des produits chimiques, tels que des plastiques et des fertilisants. En outre, 96 % de cet hydrogène a été produit à partir de gaz naturel, entraînant d'importantes émissions de CO2, ce qui renforce la nécessité d'exploiter la puissance de l'hydrogène d'une manière non polluante.
Les gouvernements et les organisations de l’ensemble de l'Europe devront accélérer leurs stratégies en matière d'hydrogène pour atteindre les objectifs fixés par l'Union européenne (UE) et contribuer de manière significative à la lutte contre la crise climatique :
L'UE se trouve à un carrefour décisif dans sa quête d'un avenir durable et décarboné, dans lequel l'hydrogène est un vecteur énergétique propre et polyvalent extrêmement prometteur. Dans le cadre de sa stratégie visant à devenir le premier continent neutre sur le plan climatique, elle prévoit que 13 à 14 % de la consommation d'énergie proviendra de l'hydrogène d'ici à 2050. Pour atteindre ces objectifs ambitieux et faciliter une transition rapide, l'UE doit donner la priorité aux stratégies nationales en matière d'hydrogène et les renforcer dans tous ses États membres.
L'un des principaux impératifs du renforcement de ces stratégies nationales réside dans l'accélération de la transition du continent vers l'abandon des combustibles fossiles. Alors que les pays s'efforcent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, l'hydrogène apparaît comme une alternative viable dans les secteurs où l'électrification directe n'est pas pratique ou économiquement irréalisable.
Dans cette optique, le gouvernement irlandais a dévoilé sa Stratégie Nationale d’Hydrogène, un plan ambitieux visant à positionner l'hydrogène comme un élément central d'une économie neutre en carbone. Cette initiative s'articule autour de trois objectifs principaux : la décarbonisation de l'économie irlandaise, en ciblant les secteurs où l'électrification s'avère peu pratique ou coûteuse comme les industries lourdes telles que l'acier et le ciment, le renforcement de la sécurité énergétique, en encourageant la production nationale d'un carburant renouvelable sans carbone, et le développement d'opportunités industrielles.
De l'autre côté de la Manche, le gouvernement français prévoit d'investir 30 milliards d'euros d'ici la fin de la décennie dans le cadre de France 2030, dont 7 milliards d'euros dans les énergies renouvelables et l'hydrogène à faible teneur en carbone. Cette stratégie prévoit la construction d'un avion à faible émission de carbone, d'un petit réacteur modulaire et de deux megafactories pour la production d'hydrogène vert. Elle envisage également d'augmenter la production de véhicules électriques. L'objectif du pays est de réduire ses émissions de 81 % d'ici 2050 par rapport à celles de 2015 et, comme une grande partie de l'UE, il se tournera vers l'hydrogène pour y parvenir.
Toutefois, pour exploiter pleinement le potentiel de l'hydrogène, il est impératif que les États membres agissent de manière cohérente et coordonnent leurs actions. En effet, l'UE doit établir un cadre encourageant la collaboration transfrontalière par le partage des connaissances, l'harmonisation des réglementations et l'incitation à l'investissement dans les infrastructures et les projets liés à l'hydrogène. Un projet clé, la récente déclaration d'intention commune signée par l'Irlande et la France sur la coopération en matière de transition énergétique, devrait permettre d'approfondir le dialogue sur le rôle que l'hydrogène produit par électrolyse jouera dans les systèmes énergétiques français et irlandais. Le Celtic Interconnector est également en cours de construction. Il s'agit d'un câble électrique sous-marin à haute tension qui reliera les réseaux électriques de l'Irlande et de la France et qui aura la capacité d'alimenter 450 000 ménages. Cette liaison électrique directe entre l'Irlande et l'Union européenne pourrait permettre de réduire les coûts de l'énergie.
Plus tôt dans l'année, l'Irlande a également signé une déclaration d'intention commune avec le ministère fédéral allemand de la recherche, qui officialise la coopération entre les deux pays dans le développement de la production d'hydrogène vert. Le gouvernement irlandais s'est fixé pour objectif de produire 5 GW d'énergie en mer d'ici 2030 et vise maintenant à obtenir 2 GW supplémentaires d'énergie éolienne en mer pour la production d'hydrogène vert, dans l'espoir de créer une industrie de l'hydrogène. De son côté, l'Allemagne prévoit qu'elle sera en mesure de produire elle-même environ 20 à 30 % de ses besoins en hydrogène d'ici à 2030, grâce aux mesures énoncées dans sa stratégie nationale pour l'hydrogène.
Il est clair que la valeur et le pouvoir potentiel de l'hydrogène pour les nations de l'UE sont élevés et qu'il est essentiel de renforcer les stratégies nationales pour parvenir à un avenir durable et neutre en carbone. En faisant de l'hydrogène un élément clé de leurs plans de transition énergétique, tout en développant des projets communs, les États membres de l'UE peuvent accélérer l'utilisation de l'hydrogène, contribuant ainsi à placer la région à l'avant-garde mondiale de la course contre le changement climatique. Au lendemain de la COP28, les efforts continus des gouvernements pour apporter des contributions efficaces à la crise en cours, combinés aux décisions responsables et durables prises par les organisations, ont le pouvoir de provoquer un changement au niveau international, en inspirant d'autres nations à agir.