L’immobilier neuf en France traverse une crise sans précédent, avec une baisse drastique du nombre de logements construits en 2023. Entre taux d’intérêt en hausse, manque de foncier et réglementations contraignantes, le secteur immobilier français est confronté à des défis majeurs.
Immobilier : pourquoi il n’y a plus de construction en France ?
Un marché de la construction en déclin
L'année 2023 a marqué un tournant sombre pour l'immobilier neuf en France. La construction de logements a enregistré une chute de 22 %, tandis que les permis de construire ont dégringolé de 23,7 %. Les chiffres définitifs sur les ventes de logements neufs ne sont pas encore disponibles, mais selon Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), les promoteurs ont vu leur activité chuter de près de 50 % par rapport à une année normale. Entre 2016 et 2019, la moyenne annuelle des ventes s'élevait à près de 165 000 logements, un chiffre qui devrait tomber entre 85 000 et 90 000 pour 2023. Cette dégringolade aurait été encore plus dramatique sans le soutien de mesures exceptionnelles, comme l'engagement d'Action Logement et de CDC Habitat d'acquérir 45 000 logements.
Un soutien insuffisant
Bien que cette aide ait empêché une chute encore plus catastrophique, elle n'a pas suffi à maintenir une activité viable pour les promoteurs. «La moitié de l’activité des promoteurs en 2023 provient d’Action Logement et de CDC Habitat, contre une part de seulement 25 % normalement», indique Boulanger. Sans cette intervention, l'effondrement aurait atteint plus de 70 %. Cependant, ces ventes à des acteurs soutenus par l'État se font avec des marges quasi nulles, mettant en péril la rentabilité des promoteurs.
Des facteurs multiples
Les raisons derrière ce déclin sont multiples. La hausse des taux d'intérêt a considérablement alourdi le coût du financement pour les acquéreurs, exacerbant les difficultés liées à l'augmentation des prix dans le neuf ces dernières années. Parallèlement, la raréfaction du foncier et la multiplication des normes ont augmenté le coût de construction. En outre, les mesures gouvernementales récentes, notamment la réduction du prêt à taux zéro et la suppression annoncée du dispositif Pinel, ont semé le doute chez les investisseurs et les primo-accédants, désormais confrontés à des obstacles quasi insurmontables pour accéder à la propriété.
Une clientèle qui s'évapore
Les investisseurs particuliers, acteurs clés du marché grâce à des dispositifs comme la loi Pinel, se sont détournés du secteur, avec une baisse des ventes de 64 % par rapport à 2019. Les acheteurs institutionnels, en quête de rendements plus attractifs ailleurs, ont également déserté le marché immobilier neuf.
Vers un avenir incertain
L'absence de nouveaux projets de construction est un signe préoccupant pour l'avenir. Marc Gedoux, vice-président des Promoteurs du Grand Paris, souligne que : «Actuellement, nous finissons les chantiers en cours mais on ne rentre pas de nouvelles affaires». Cette prudence, dictée par les difficultés de commercialisation et la pression sur les marges, entraîne le report, voire l'annulation, de nombreux projets.
Impact sur l'emploi
La crise ne se limite pas au secteur de la construction. Elle s'étend à l'ensemble de l'écosystème immobilier, avec la suppression anticipée de 150 000 emplois dans le bâtiment et les professions connexes. Les promoteurs, déjà engagés dans des programmes de réduction de coûts, prévoient des licenciements et des non-renouvellements de contrats, aggravant la situation.
Cette analyse met en lumière la complexité des défis auxquels le secteur immobilier neuf français est confronté. Entre contraintes financières, réglementaires et économiques, et manque de constructions, les perspectives restent incertaines. L'appel à des mesures de soutien plus efficaces et ciblées se fait plus pressant, dans l'espoir de revitaliser un marché essentiel à l'économie et à la société françaises.