Comment retrouver une souveraineté Française qui s’est liquéfiée au fil des décennies ?

La France dans de nombreux domaines a perdu de sa superbe. Elle n’est plus du tout ce qu’elle était, une nation phare de l’Europe et même du monde des siècles passés. Nombreux sont ceux qui parlent d’une France indépendante, souveraine sur le ton du regret.

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Par Daniel Moinier Publié le 2 février 2024 à 5h00
dette publique faillite france
dette publique faillite france - © Economie Matin
20%20% de l’assiette des Français est importée.

Bon nombre de politiques de tous bords veulent réécrire l’histoire en appelant à l’héritage gaullien, aux valeurs des Trente Glorieuses et de cette époque adulée d’avant 1970. Tous ces élites sans scrupule font sourire, appelant de leurs vœux le retour d’une grandeur passée.

Est-ce si impossible de retrouver cette souveraineté et indépendance alors que la nation est de plus en plus chapeautée par une union européenne pointilleuse, qui, elle aussi vacille, se cherche au travers de tous ces membres ayant des optiques de plus en plus divergentes ?

La souveraineté énergétique :

La France n’a jamais disposé d’une indépendance énergétique complète. Elle a toujours été tributaire de ses fournisseurs, coté gaz et pétrole (même si nous avions eu de petites productions : Lac, Pechelbronn…). Elle le reste toujours et il est à croire qu’elle continuera ainsi, même si l’extraction des schistes comme aux USA aurait pu être possible.

Heureusement l’industrie nucléaire remise en valeur écologiquement nous sortira toujours d’une grosse épine du pied, même si elle doit toujours avoir une dépendance avec l’achat d’uranium. Il en est de même avec une grosse partie des métaux lourds ou rares, indispensables aux piles et batteries.

Il a été dommage que des politiques de gauche et de la cause écologique aient remis en cause la production nucléaire. Cette longue période de latence a mis en veille le renouvellement des centrales. Cela a abouti à des fermetures de réacteurs pour effectuer de la maintenance engendrant des coûts énormes, amplifiés par la baisse de production et de l’approvisionnement étranger pour subvenir au manque.

Cette perte de rentrées a réduit et retardé les capacités d’investissement dans les photovoltaïques et éoliens, y compris les véhicules électriques.

Pour la première fois en 2022, la France a été importatrice nette d’électricité avec pour conséquence, une production tombée à son niveau le plus bas depuis 30 ans.

La construction de nouveaux réacteurs EPR2 a été entérinée en 2022, mais la production ne sera sur le réseau qu’en 2035/2036 sous toute réserve !

La souveraineté alimentaire :

La France était en partie autosuffisante sur le plan alimentaire. C’était disait-on le jardin de l’Europe.

L’industrie agro-alimentaire et surtout l’agriculture ont perdu de plus en plus de terrain.

La France n’assure plus totalement sa souveraineté alimentaire, si bien qu’aujourd’hui 20% de l’assiette des Français est importée.

C’est surtout la production de viande ovine qui a le plus diminuée cause notamment des accords UE-Mercosur. Celle-ci a diminué de 50%, celle de volaille de 42%, de porcs 26% et de bovins de 21%.

La filière fruits a aussi été touchée, c’est 37% qui vient de l’extérieur, pour la pêche c’est une catastrophe avec une baisse de 90%.

L’agriculture et les industries agroalimentaires françaises cèdent aussi du terrain et deviennent de plus en plus dépendantes des importations. Elles sont même devenues archi-déficitaires dans les boissons.
C’est le faible pouvoir d’achat français qui n’est plus suffisant pour acheter des produits français moins compétitifs. Ce qui ne favorise pas non plus la production, c’est la baisse constante du nombre d’exploitations, due en grande partie par la prise de retraite des agriculteurs et de leur non-remplacement pour beaucoup.

Pourrait-on aussi parler de la souveraineté de la défense ?

"La défense ! C'est la première raison d'être de l'État. Il n'y peut manquer sans se détruire lui-même". Charles de Gaulle deuxième discours de Bayeux, 1952.

La France en ce domaine a un certain avantage par rapport à beaucoup de pays européens. Elle a conservé une armée et surtout elle détient une puissance nucléaire non négligeable.

Il faut rappeler que ce budget n’a pas arrêté de diminuer, passant de 5,44% du PIB sous de Gaulle, à 1,22% sous François Hollande. Il est remonté fortement sous la Présidence Macron passant de 30.3 Mds en 2017 à 43.9 Mds en 2023, avec une programmation de 69 Mds en 2030.

La souveraineté numérique :

Depuis les années 2002, ce sont les GAFAMA qui dirigent le monde. Ces entreprises ont inventé l’économie digitale. Ils disposent d’un pouvoir absolu avec leur énorme clientèle générant des budgets exponentiels. Ils sont même devenus les concurrents des états, affectant la liberté de penser et de décider des individus principalement sur les réseaux sociaux. Le travail des influenceurs et la vitesse de diffusion des informations vraies ou fausses occultent la liberté de penser et de décider des individus, ce qui affecte la souveraineté numérique. Les GAFAMA ont pris le pouvoir et règnent sur l’espace numérique, décident, suppriment et vendent même des données personnelles de leurs clients-adhérents-abonnés.

La souveraineté monétaire :

En apparence, la France disposait encore en partie de son indépendance monétaire. Ce n’est plus tout à fait le cas depuis le 1er janvier 2002, lors de l’arrivée de l’Euro adopté par 12 membres de l’UE.

Elle est depuis contrainte par les règles de la monnaie européenne, imposées par la BCE (Banque Centrale Européenne). Un des gros problèmes à gérer, ce sont les fluctuations de l’euro par rapport à la monnaie américaine : Le dollar peut handicaper ou arranger suivant son niveau, toute l’économie des pays européens.

La souveraineté économique :

Suivant un rapport de synthèse d’une quarantaine d’auditions auprès de décideurs politiques, d’acteurs économiques, de chercheurs et de régulateurs, il a été établi que la France décroche sur plusieurs domaines : Dans les produits de santé, d’équipements, de consommation de base, les communications, les données, les échanges internationaux, la gouvernance des entreprises, les métaux précieux, les principes actifs pharmaceutiques…

Cette situation conduit à un état critique de grande vulnérabilité, et à une forme de captivité des politiques économiques, vis-à-vis d’importations désormais incontournables, d’États ou entreprises étrangers.

Et pour un avenir meilleur ?

La crise actuelle imposera de passer par une refondation de notre démocratie et des réformes de fond.

Le système électoral ne représente plus la réalité populaire. Il existe de plus en plus un désamour des citoyens pour la politique, avec un manque important de confiance envers les candidats qui se présentent aux élections.

Les quatre crises qui viennent de nous frapper : Covid, Ukraine, inflation et Qatar ont ravivé les inquiétudes sur la capacité de la France à résister aux chocs, frappant les chaînes de valeurs mondiales et poussé les gouvernants à favoriser la remise en route de l’agenda politique de la « souveraineté économique ».

En termes de souveraineté, la France devra en premier retrouver son indépendance dans beaucoup de domaine : énergétique, industriel, alimentaire, la dépendance aux investisseurs étrangers…

En France, depuis le printemps 2022 la souveraineté a figuré en bonne place dans les débats de la campagne présidentielle et dans l'intitulé et les attributions de ministères, telle celle de la commission des affaires économiques qui s’est saisi de plusieurs thématiques liées à la souveraineté aux cours de ses dernières années avec cinq plans définis.

Mais le chemin sera long pour retrouver cette souveraineté qui s’est liquéfiée au fil des années et des gouvernements.

www.danielmoinier.fr

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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