Christine Lagarde: Remarques au sommet pour un nouveau pacte mondial de financement.

Le seuil de 1,5°C pour les températures annuelles risque d’être dépassé avant 2027, il faut agir rapidement pour limiter le réchauffement climatique. Les gouvernements doivent respecter leurs engagements et mobiliser les financements privés pour la transition verte et juste. Les banques centrales doivent également soutenir la verdissement du système financier. En travaillant ensemble, nous pouvons préserver le seuil de 1,5°C et sauver notre planète.

Cropped Favicon 1.png
Par La rédaction Publié le 24 juin 2023 à 1h31
Banque Centrale Bce Fed Eng
Christine Lagarde: Remarques au sommet pour un nouveau pacte mondial de financement. - © Economie Matin

Paris, 23 juin 2023

Je suis vraiment honoré d'être avec vous aujourd'hui lors de ce sommet important pour aborder la question la plus pressante de notre temps.

Il y a huit ans à Paris, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a ouvert la COP21 en déclarant que "Paris doit marquer un tournant [...]" vers la limitation du réchauffement climatique à 1,5 ° Celsius.

Aujourd'hui, la fenêtre d'opportunité pour atteindre cet objectif se referme sous nos yeux : les huit dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées dans le monde et le seuil critique de 1,5°C pour les températures annuelles sera probablement dépassé au moins une fois avant 2027.

Des sécheresses, des vagues de chaleur et des inondations sans précédent sévissent déjà dans le monde. Ils infligent des souffrances et des dommages sur tous les continents et ne sont qu'un aperçu de l'avenir. Il est du devoir de chacun de prendre toutes les mesures possibles pour atteindre l'objectif climatique de Paris. Non seulement cela relève de la justice pour les générations futures, mais c'est également indéniablement une question de justice et de responsabilité pour les générations actuelles. Les pays en développement sont déjà les plus durement touchés par l'impact du réchauffement climatique. Un fait est évident : les pays en développement sont appelés à supporter une part disproportionnée de l'impact. Plus de 90 % de ceux qui ont péri en raison d'événements météorologiques extrêmes au cours du dernier demi-siècle vivaient dans ces pays, où plus de 70 % des catastrophes signalées se sont produites.

La voie à suivre est claire : nous devons poursuivre une transition mondiale pour assurer la résilience de nos économies. Cela signifie non seulement réduire les émissions de gaz à effet de serre à zéro net et adapter nos économies pour les protéger contre le changement climatique, mais aussi s'attaquer aux causes profondes de la destruction sévère de la nature qui menace les ressources vitales dont nous dépendons pour notre survie. Les recherches de la BCE montrent qu'en Europe seulement, plus de 70 % de notre économie dépend fortement des services écosystémiques de la nature - un chiffre qui est probablement beaucoup plus élevé dans les économies en développement.

Pour relever ce défi, il existe au moins trois leviers que nous pouvons utiliser pour stimuler le financement nécessaire à une transition verte et juste à l'échelle mondiale.

Premièrement et avant tout, il incombe aux gouvernements de mener la lutte contre le changement climatique et de respecter leurs engagements en matière de financement de la transition. Les économies développées doivent donner l'exemple et respecter la promesse de 100 milliards de dollars faite il y a 14 ans lors de la COP15 à Copenhague. Les gouvernements devraient également mobiliser les financements privés en mettant en œuvre des politiques de transition et en créant un cadre solide et stable pour attirer les flux de capitaux au niveau national et mondial.

Deuxièmement, les gouvernements peuvent pousser à la réforme de l'architecture financière multilatérale. Le G20 - cette année sous la présidence de l'Inde - peut jouer un rôle clé dans le déblocage de financements supplémentaires. L'examen des cadres d'adéquation des fonds propres des banques de développement multilatérales peut offrir une telle opportunité. Plus généralement, nous devons identifier et éliminer les obstacles publics et privés au financement vert dans le monde entier chaque fois que cela est possible.

Troisièmement, les banques centrales du monde entier peuvent et doivent, dans le cadre de leur mandat, soutenir la verdissement du système financier. Le Réseau pour la verdissement du système financier, qui regroupe 127 banques centrales et superviseurs du monde entier, a joué un rôle crucial dans l'accélération de l'action mondiale et continuera à le faire. Nous à la BCE avons également fait de la prise en compte du changement climatique une priorité, car (i) il affecte l'inflation ; (ii) il affecte notre bilan ; et (iii) c'est un risque financier pour les banques que nous supervisons. Nous avons ajusté nos avoirs en obligations d'entreprise et modifié nos garanties et notre gestion des risques pour mieux refléter les risques climatiques et en même temps fournir des incitations pour soutenir la transition verte de l'économie. En tant que superviseurs, nous nous assurons que les banques tiennent compte des risques climatiques lorsqu'elles prennent des décisions commerciales et de prêt. Nous testons également l'impact du changement climatique sur l'économie et la stabilité financière. Par notre conseil, notre analyse et nos actions, nous visons à gérer les risques financiers découlant du changement climatique ainsi qu'à fournir des preuves à l'appui de la nécessité de la transition que je viens de mentionner. Ces transformations se sont produites en un laps de temps remarquablement court de quelques années seulement, reflétant l'élan croissant de nos efforts collectifs mondiaux pour lutter contre le changement climatique. La conférence d'aujourd'hui est la preuve de notre dévouement commun à intensifier nos actions alors que la fenêtre pour atteindre nos objectifs climatiques se rétrécit.

Nous pouvons préserver le seuil de 1,5 °C grâce à nos efforts unis. Comme l'a si élégamment dit Sir David Attenborough, "Si en travaillant séparément, nous sommes une force assez puissante pour déstabiliser notre planète, alors en travaillant ensemble, nous sommes assez puissants pour la sauver". Par nos actions, prouvons-lui qu'il a raison.

Lire l'article original en anglais

Une réaction ? Laissez un commentaire

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre Newsletter gratuite pour des articles captivants, du contenu exclusif et les dernières actualités.

Aucun commentaire à «Christine Lagarde: Remarques au sommet pour un nouveau pacte mondial de financement.»

Laisser un commentaire

* Champs requis