Le projet de loi de finances de la Sécurité sociale pour 2025 prévoit une diminution des exonérations de charges sociales sur les bas salaires, une première en France depuis plus de trente ans. Cette mesure vise à générer 5,1 milliards d’euros d’économies dès 2025, avec l’objectif à long terme de combler le déficit budgétaire de la Sécurité sociale. Si le gouvernement y voit une opportunité de réformer un système coûteux, le président du Medef, Patrick Martin, alerte sur les risques pour l’emploi et la compétitivité des entreprises.
Budget de la Sécu : hausse des charges pour les entreprises, le Medef menace de licencier
Un alourdissement des charges sur les bas salaires
Le gouvernement Barnier a décidé de limiter les exonérations de charges pour les salariés au niveau du SMIC et au-delà, afin de générer d’importantes économies pour la Sécurité sociale. Concrètement, les exonérations de charges pour les salariés rémunérés au SMIC seront réduites de deux points dès le 1er janvier 2025, puis de deux points supplémentaires en 2026. Par ailleurs, les allègements des « bandeaux » d'assurance-maladie et de la branche famille seront diminués, les réductions étant abaissées respectivement de 2,5 à 2,2 SMIC et de 3,5 à 3,2 SMIC.
Cette mesure s’inscrit dans une tentative de maitriser les coûts croissants des dispositifs d’exonérations, qui ont augmenté de manière significative ces dernières années. Les économistes Antoine Bozio et Étienne Wasmer ont inspiré une partie de cette réforme en prônant une approche plus linéaire des exonérations. Cependant, le gouvernement ne retient pour l’instant que la partie visant à réduire les exonérations sur les plus bas salaires, espérant à terme obtenir un gain de 15 milliards d'euros d'ici 2027.
Les craintes de déstabilisation du marché de l’emploi
Face à cette nouvelle orientation budgétaire, Patrick Martin, le président du Medef, exprime de vives inquiétudes quant aux répercussions de la réforme sur le marché de l'emploi. Dans un entretien au quotidien Les Échos, il déplore notamment le fait que cette hausse des cotisations patronales puisse entraîner la suppression de plusieurs centaines de milliers de postes, surtout dans des secteurs comme la restauration, l'aide à domicile et la propreté. Selon lui, les entreprises, en particulier les PME et les ETI, peinent déjà à surmonter le ralentissement économique actuel. La hausse des charges pourrait compromettre leur capacité à maintenir les emplois existants et à rester compétitives face à la concurrence internationale.
Patrick Martin insiste sur le caractère structurel des mesures, qui ne se limiteraient pas à des ajustements temporaires comme annoncé initialement par le gouvernement. Le président du Medef regrette également que les propositions des économistes Bozio et Wasmer, qui incluaient une baisse des cotisations entre 1,3 et 1,8 SMIC pour compenser les hausses sur les plus bas salaires, n’aient pas été retenues pour une mise en œuvre immédiate. Cette approche aurait permis, selon lui, de mieux répartir l’effort entre les différents niveaux de salaires et d’éviter de fragiliser l’emploi des moins qualifiés.
Vers une dégradation de la compétitivité française ?
Le président du Medef critique également le projet gouvernemental pour son manque de cohérence avec la situation économique actuelle. Il souligne la détérioration de la conjoncture : baisse de la consommation des ménages, recul des investissements des entreprises et hausse des défaillances d'entreprises. Dans ce contexte, il estime que le choix de limiter les exonérations de charges sociales au niveau du SMIC pourrait s’avérer contre-productif. En effet, il craint que ces hausses de charges n'incitent les entreprises à compenser par une réduction de leurs effectifs plutôt qu'à revaloriser les salaires.