Après la grogne des agriculteurs en début d’année 2024, le Sénat français a exprimé, jeudi 21 mars 2024, une position tranchée contre la ratification du CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement) – un pacte commercial entre l’Union européenne et le Canada. Un camouflet pour le gouvernement de Gabriel Attal.
Le CETA rejeté par le Sénat : et maintenant ?
Le CETA : un vieux traité qui a traîné
Comme tout traité de libre-échange, le CETA ( Comprehensive Economic and Trade Agreement) visait à éliminer les barrières douanières pour stimuler les échanges entre l'UE et le Canada, promettant une croissance des exportations françaises vers le Canada de 33%.
Pourtant, malgré ces ambitions, le traité s'est rapidement retrouvé au cœur de débats houleux, cristallisant les inquiétudes de secteurs clés comme l'agriculture française, préoccupée par l'importation de produits canadiens ne répondant pas aux mêmes standards sanitaires européens. Le CETA ne prévoyait en effet pas de clause miroir, ce qui le rendait injuste pour les producteurs européens soumis à une réglementation plus dure que celle canadienne, notamment au niveau des produits phytosanitaires.
Au Sénat la gauche et la droite s’allient
L'introduction du vote au Sénat, orchestrée par le groupe communiste dans le cadre de leur journée d'initiative parlementaire, n'est pas due au hasard. Cette manœuvre, à l'approche des élections européennes, semble vouloir poser le CETA comme pierre angulaire des débats sur l'avenir des politiques commerciales de l'UE. Avec 211 voix contre et 44 pour, le message du Sénat est sans équivoque.
Le rejet a même été au centre d’une alliance rare chez les sénateurs. Alors que le Sénat est majoritairement à droite, ils ont largement voté un texte venant de l’aile la plus gauche.
Le gouvernement est fâché… et un nouveau camouflet l’attend
Face à ce vote, les réactions gouvernementales ne se sont pas fait attendre. Franck Riester, ministre du Commerce extérieur, a notamment qualifié l'initiative de « manœuvre grossière » et de « manipulation inacceptable », tandis que d'autres voix au sein du gouvernement ont loué les bénéfices supposés du CETA pour l'économie française. Cependant, cette défense semble avoir peu pesé face à l'ampleur du rejet exprimé par le Sénat.
Alors que le traité est déjà appliqué provisoirement, le rejet du Sénat renvoie la balle à l'Assemblée nationale, où un nouveau vote pourrait avoir lieu. Toujours dans le groupe communiste, les députés élu du parti prévoient d’ajouter un vote sur le CETA le 30 mai 2024 à l’Assemblée nationale. Si l’alliance gauche-droite se confirme, il y a de fortes chances que le texte soit tout simplement rejeté.
Sans compter que le chemin vers une ratification complète s'annonce semé d'embûches même au niveau européen. Neuf autres États membres de l'UE n'ont pas encore ratifié le CETA.