C’est acté : les pensions de retraite augmenteront de 2,2 % au 1er janvier 2025, soit dans 2 jours, après une hausse de 5,3 % début 2024, une hausse qui était supérieure à l’inflation. Le Parisien s’est posé la question ce week-end : les retraités devraient-ils se serrer davantage la ceinture ?
Budget 2025 : les retraités sont-ils trop privilégiés ?
3 milliards d'euros de dépenses pour une revalorisation d'un point
Retenez un chiffre : chaque fois que l’on augmente les pensions de retraite de 1 %, la facture pour l’État s’alourdit de plus de 3 milliards d’euros par an. L’augmentation des pensions de retraites pour l’année 2024 a donc coûté 15 milliards d’euros au budget de l’État. Celle prévue au 1ᵉʳ janvier 2025 prochain coûtera un peu moins de la moitié.
Pourquoi ces « petites augmentations » coûtent-elles si vite si cher ? Tout simplement parce que le système de retraite est, de très loin, le premier poste de dépenses de l’État. Il s’approche des 400 milliards d’euros. C’est un quart de la dépense publique !
De fait, c’est tentant de se dire qu’il y a peut-être quelques milliards d’euros à économiser sur les dépenses de retraite quand on cherche à réduire le budget de l’État par tous les moyens. Mais il faut bien comprendre que les retraités n’ont rien d’une population homogène. Un tiers d’entre eux touchent moins de 1 000 € par mois et se retrouvent souvent en dessous du seuil de pauvreté.
Sachant que, la plupart du temps, ces petits retraités sont locataires, ils doivent donc supporter un loyer. Et, pour aggraver les choses, beaucoup — surtout des femmes — vivent seuls, avec donc une seule petite pension pour assumer les charges fixes comme le chauffage ou, encore une fois, le loyer. Concrètement, quand on augmente toutes les pensions de retraite de 2,2 %, pour certains, cela ne représente donc qu’à peine 30 euros de plus par an.
Seuls 8 % de retraités ont une pension de plus de 3 000 euros bruts
Dans ce cas, faut-il faire payer les riches retraités ? Certains sont tentés par cette option. Mais en réalité, si l’on regarde de plus près, les riches retraités ne sont pas si nombreux, ils sont même peu nombreux : moins de 8 % des 17 millions de retraités reçoivent une pension supérieure à 3 000 euros bruts.
3 000 euros bruts, il faut préciser bruts, car ceux qui sont considérés comme « riches retraités » cotisent à la CSG et à la CRDS, tandis que les plus modestes en sont partiellement, voire totalement, exonérés. On a donc déjà commencé à les faire payer depuis quelques années !
Il y a peu de chances que l’on puisse aller beaucoup plus loin de ce côté-là, car le Conseil constitutionnel veille. De fait, celui-ci pourrait censurer une mesure qu’il jugerait inégalitaire, surtout si celle-ci ne vise qu’une partie des retraités.
Le retour du loyer fictif
Ce n’est donc pas vraiment du côté des pensions de retraite des plus riches, ni de leur modulation ou leur taxation, que les regards se tournent en ce moment... C’est plutôt du côté de leur patrimoine immobilier.
« Investissez dans la pierre », nous disait-on. L’idée n’est pas neuve, loin de là. Elle ressort même chaque année, et toujours à la même époque : il s’agit du loyer fictif ! Ceux qui sont propriétaires de leur logement à 100 %, parce qu’ils ont terminé de rembourser leur crédit ou parce qu’ils ont hérité d’une maison ou d’un appartement de leurs parents, pourraient se voir contraints d’acquitter un « loyer fictif ».
Sorte de punition, sachant que 7 retraités sur 10 sont propriétaires de leur logement, et que, la plupart du temps, ils ont justement terminé de rembourser leur crédit, on ne toucherait pas à leur pension de retraite, mais bien à leur patrimoine immobilier, qu’ils ont mis des années à acquérir...
À noter par ailleurs qu'une telle mesure serait extrêmement facile à mettre en place aujourd’hui. En effet, il y a quelques mois à peine, on a demandé à tous les propriétaires de déclarer précisément quels biens immobiliers ils détenaient et ceux qui sont loués ou non. On en a beaucoup parlé parce que des étudiants logés chez leurs parents se sont mis à recevoir, par erreur, une taxe d’habitation. Il y a eu d’autres couacs du même genre.
Mais maintenant, Bercy sait précisément qui possède quoi, qui loue ou ne loue pas son ou ses biens. Autre avantage d’une telle solution : le loyer fictif serait, bien évidemment, proportionnel à la surface du bien et à sa valeur immobilière. Sous-entendu, il ne serait pas inégalitaire...
Bien évidemment, les retraités propriétaires d’une résidence secondaire devraient aussi s’acquitter d’un loyer fictif. En réalité, cet impôt existe déjà : il ne s’agit ni plus ni moins que de la taxe foncière. À la différence, néanmoins, que ce loyer fictif ne serait réclamé qu’à ceux qui ont fini de rembourser leur crédit immobilier, ce qui est par nature le cas des retraités. Les banques consentent, en effet, difficilement des crédits dont les dernières mensualités seraient à rembourser au-delà de 67 ans.
Voilà comment, d’un tour de passe-passe, on va peut-être verser moins de pensions à certains retraités. Évidemment, tout cela ne fonctionnera pas pour ceux qui sont déjà partis à l’étranger et qui ont mis leur maison en location, ni pour ceux qui font déjà appel à un conseiller en optimisation fiscale, qui leur trouvera rapidement une parade.
Quelques chiffres :
Dépenses de retraite | 380 Milliards en 2024 (prévision) |
34 % des retraités | reçoivent moins de 1.000 € / mois |
8 % des retraités | reçoivent plus de 3.000 € / mois bruts |
70 % des retraités | sont propriétaires de leur logement |
La taxe foncière | 28,4 milliards € de recettes en 2024 |