Le jeudi 14 novembre 2024, le Premier ministre Michel Barnier a déclaré qu’il utiliserait « probablement » l’article 49.3 pour faire adopter le budget 2025. Une manière de le faire adopter de force, largement utilisée sous Emmanuel Macron et qui met le gouvernement Barnier dans une position délicate. Utiliser le 49.3 risque en effet de conduire le gouvernement vers une censure qu’il n’est pas certain d’écarter.
Budget 2025 : le 49.3 semble déjà décidé par le gouvernement
Le 49.3 bientôt de retour dans l’hémicycle ?
L’article 49.3 de la Constitution permet à un gouvernement de faire adopter une loi sans vote à l’Assemblée nationale, sauf si une motion de censure est déposée et adoptée. Cet outil, qualifié par certains de « couperet constitutionnel », est souvent utilisé en dernier recours pour surmonter une impasse parlementaire. Michel Barnier a affirmé qu’il lui semblait difficile de « faire autrement » face aux blocages rencontrés lors des débats sur le budget. Et ce même si le nouveau gouvernement avait déclaré qu’il préférait ne pas en faire usage.
Le rejet massif, par la droite et le centre, du volet « recettes » du budget, profondément modifié par la gauche, a provoqué une impasse au Palais Bourbon. Le projet initial, selon Barnier, avait pour ambition de maintenir un équilibre budgétaire tout en réduisant la dette publique. Mais les modifications apportées à l’Assemblée ont transformé ce texte en une version qu’il juge « déformée ».
Les raisons du recours au 49.3
- Impossibilité de réunir une majorité
Michel Barnier, en difficulté pour rassembler les voix nécessaires au vote, explique que son recours au 49.3 est inévitable. L’opposition, divisée entre la gauche, le Rassemblement national (RN) et des franges des Républicains, rend tout consensus impossible. - Maintenir les objectifs budgétaires Le budget 2025 vise à économiser 60 milliards d’euros, répartis entre :
- Réduction des dépenses publiques : 40 milliards d’euros.
- Augmentation des recettes : 20 milliards d’euros, sans hausse des impôts locaux.
Michel Barnier a promis que ce budget ne réintroduirait pas la taxe d’habitation supprimée sous Emmanuel Macron. De plus, il s’est montré « très réservé » sur l’idée controversée de supprimer un jour férié pour financer la Sécurité sociale.
- Préserver l’équilibre institutionnel En utilisant le 49.3, Barnier espère contourner le risque de voir le texte rejeté une nouvelle fois. Cependant, cette manœuvre comporte un coût politique important, notamment la possibilité d’une motion de censure.
Vers une motion de censure pour le gouvernement Barnier ?
L’opposition a déjà annoncé son intention de déposer une motion de censure si le gouvernement utilise le 49.3. Si cette motion réunit la gauche et le RN, le gouvernement pourrait être renversé. Toutefois, Barnier se montre confiant : « Les Français ne souhaitent pas le renversement du gouvernement. Ce que j’entends, c’est : ‘Courage, tenez bon’. »
Mais Michel Barnier se fait probablement des illusions concernant le soutien des Français au gouvernement, alors que la majorité des voix aux législatives est allée au Nouveau Front Populaire et au Rassemblement National. Sans compter que les sondages montrent que 67 % des Français s’opposent à l’usage du 49.3 pour ce budget. De plus, une étude d’Odoxa-Mascaret révèle que :
- 73 % des Français pensent que ce budget ne sera pas efficace pour l’économie.
- 79 % jugent le texte injuste socialement.
Un effort budgétaire de 5 milliards d’euros est demandé aux collectivités, ce qui suscite des critiques. Plusieurs maires et présidents de régions dénoncent un budget « asphyxiant » pour leurs territoires.
Critique principale | Réponse du gouvernement |
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Réduction des dotations locales | Ajustements budgétaires promis par Barnier |
Suppression d’un jour férié | Refusée pour des raisons sociales |
Absence de nouvelles taxes | Engagement de maintenir la fiscalité stable |
Les débats à l’Assemblée : une simple façade ?
Selon plusieurs analystes, le recours au 49.3 était envisagé dès octobre 2024. Lors des premières discussions sur le budget, des membres du gouvernement avaient évoqué cette option comme une possibilité. Ce calcul stratégique vise à éviter de nouvelles concessions aux oppositions.
La Première ministre précédente, Élisabeth Borne, avait utilisé le 49.3 à 23 reprises en 2023 pour faire passer ses budgets. Michel Barnier semble vouloir éviter cette répétition excessive. Le travail de l’Assemblée national sera malgré tout réduit à néant… « Mais vous observerez que nous avons fait le choix de laisser le débat s’y dérouler », se justifie le Premier ministre.
Le choix de Michel Barnier d’utiliser le 49.3 pour le budget 2025 reflète une situation politique extrêmement tendue. Si cette stratégie lui permet d’imposer son texte, elle pourrait également coûter cher à son gouvernement en termes de crédibilité et de soutien populaire. Une motion de censure pourrait-elle aboutir à un renversement du gouvernement ?