Dans la zone euro, le taux terminal du cycle actuel semble plus élevé que nécessaire, compte tenu d’une inflation largement imputable aux coûts de l’énergie importée. L’inflation et la croissance ont toutes deux fortement ralenti, et les conséquences du resserrement monétaire ne se font pas encore pleinement sentir.
BCE : Le coût d’un resserrement excessif
Nous tablons sur une croissance à peine supérieure à 1% en 2024, alimentée par un marché de l’emploi résilient et par un certain assouplissement monétaire à compter du milieu de l’année.
Selon nous, le cycle de hausse des taux de la Banque centrale européenne (BCE) a pris fin. Avec un taux terminal qui dépasse toutefois largement le niveau que nous anticipions en début de cycle.
Nous pensions initialement que la BCE ne réagirait pas de la même façon que la Fed à la hausse de l’inflation, car la région présentait des signes de choc d’offre, contrairement aux Etats-Unis où la demande explosait. Un resserrement monétaire prononcé ne nous semblait pas justifié, sachant que le choc énergétique générait déjà une forte perte de revenu réel sur tout le continent et que les signes de surchauffe étaient rares.
Mais le resserrement mené par la BCE s’est avéré similaire à celui de la Fed, avec un relèvement du taux de dépôt de 450 points de base pour le porter à 4% et une contraction bilantaire.
L’inflation a fortement diminué dans la zone euro durant l’année écoulée (avant que les conséquences du resserrement monétaire ne se fassent pleinement sentir) – aussi rapidement qu’elle avait préalablement augmenté. Le PIB est inférieur à la tendance, avec une croissance quasiment nulle sur les douze derniers mois et une légère contraction au troisième trimestre. L’écart transatlantique qui s’était formé durant la pandémie, en raison de la surperformance de l’économie américaine, s’est creusé davantage.
Alors que l’inflation diminue rapidement et que la croissance reste léthargique, il apparaît clairement que les politiques choisies étaient erronées. L’enquête d’octobre de la BCE sur les prêts bancaires montre que le resserrement des normes de crédit se poursuit et que la demande en emprunts reste faible. Les indicateurs prospectifs, tels que les indices des directeurs d’achat (PMI), suggèrent une faiblesse persistante à court terme.
Ce couple croissance/inflation défavorable justifiera selon nous un assouplissement monétaire progressif d’ici à la mi-2024. Un rythme plus rapide pourrait même être nécessaire : par le passé, il a fallu rapidement inverser certaines décisions de la BCE. Les hausses de taux se sont transformées en baisses dans un délai de quatre mois en 2008, puis de nouveau en 2011.
Le recul de l’inflation, la résilience du marché de l’emploi, l’atténuation du choc énergétique et l’assouplissement de la politique monétaire devraient quelque peu améliorer les perspectives en 2024. Nous tablons sur une croissance légèrement supérieure à 1%. Cela pourrait réduire un peu l’écart entre les Etats-Unis et l’Europe, mais les erreurs politiques de cette dernière lui coûteront certainement cher.