Économie : les français fuient les crédits comme la peste

Dans le climat économique actuel de la France, les comportements financiers des ménages sont en pleine mutation, avec deux tendances frappantes qui se dégagent : un virage vers une épargne accrue et un net recul dans la souscription de crédits.

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 28 novembre 2023 à 12h00
Économie : les français fuient les crédits comme la peste - © Economie Matin
159 M d'€L'épargne des Français en 2023 s'élève à 159 milliards d'euros

Les Français se détournent des crédits

Alors que les Français se tournent vers l'épargne, leur appétit pour les crédits semble s'estomper. Les dernières données de la Fédération bancaire française (FBF) révèlent une contraction notable du recours au crédit immobilier et à la consommation. En effet, même si la production de ces crédits reste positive en volume, son ralentissement est palpable : seuls 3,9 % des ménages envisagent de souscrire un crédit immobilier dans les mois à venir, alors qu'ils étaient 4,8% fin 2021. Plus révélateur encore, moins de 43,4% des ménages français détenaient au moins un crédit à la fin de 2022, un chiffre en baisse constante depuis les années 90 (53 %).

Cette tendance est particulièrement frappante pour les crédits à la consommation. En 2005, 30,2% des ménages avaient un tel crédit, contre seulement 21,8% en 2022. Autrement dit, les Français sont de plus en plus réticents à l'idée de s'endetter pour des dépenses immédiates

D'un autre côté, avec des taux d'intérêt élevés, les banques restent réticentes à octroyer des prêts : plus de 50 % de refus de demande de crédit immobilier sur l'année 2023. Pour maintenir leur production de crédits immobiliers, les banques ont allongé les délais de remboursement, avec une durée moyenne des crédits octroyés s'établissant à 21,6 ans en octobre 2023, contre 13,6 ans en 2001. Pour autant, la situation ne semble pas prête de s'améliorer. D'après Guillaume Almeras, fondateur de Score Advisor, nous pourrions assister à l'avènement d'un « crédit crunch », cela signifie que les banques pourraient ne plus être en mesure de maintenir le même niveau de production de crédits qu'auparavant.

La prudence gagne les Français

La prudence est devenue le maître-mot des ménages français en matière de finances personnelles. Du fait d'une inflation persistante, une majorité de Français continue d'épargner, même si 23 % d'entre eux indiquent qu'ils épargneront moins en 2023 qu'en 2022. La diversité des habitudes d'épargne se manifeste clairement : 24 % des ménages épargnent entre 1 et 50 euros par mois, tandis que 32 % mettent de côté entre 50 et 200 euros, et 17 % économisent plus de 200 euros mensuellement. 

La popularité croissante du Livret A témoigne de cette tendance à la prudence. Fin 2022, on comptait 56 millions de comptes actifs, séduits par la sécurité et un taux d'intérêt attractif de 3 %. En période d'incertitude, le Livret A offre une option d'épargne sûre, loin des fluctuations du marché. Pour autant, cette inclinaison des Français vers l'épargne n'est pas nouvelle,  elle s'est intensifiée depuis la pandémie de Covid-19. L'épargne totale en 2022 a atteint près de 159 milliards d'euros, bien au-dessus de la moyenne annuelle de 101 milliards d'euros observée entre 2015 et 2019.

L'augmentation de l'épargne n'est pas seulement une réaction à l'inflation, mais aussi une réponse à un climat économique global incertain. À défaut de contracter des crédits, avec l'instabilité des marchés et les incertitudes liées à l'emploi et aux revenus, les Français choisissent la sécurité, en mettant de côté pour se prémunir contre d'éventuelles difficultés futures. 

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Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin.

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