ZFE : le gouvernement ne veut toujours pas les supprimer partout

C’est un feuilleton politique dont les automobilistes français se passeraient bien. Créées en 2019, les Zones à Faibles Émissions (ZFE) continuent de provoquer l’ire des administrés concernés, mais aussi de certains groupes de l’échiquier politique. Malgré cette bombe sociale à retardement, le gouvernement persiste et signe.

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 4 avril 2025 à 10h05
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ZFE : le gouvernement ne veut toujours pas les supprimer partout - © Economie Matin
86 %86 % des citoyens ayant participé à la grande consultation publique sur les ZFE s'opposent à leur mise en œuvre.

Contre-attaque. Le 26 mars 2025, à l’occasion d’une commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi de simplification, l’Assemblée nationale — notamment grâce aux votes du Rassemblement national et des Républicains — a adopté un amendement visant à limiter les ZFE. Malgré cela, le gouvernement, par la voix de la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, continue de défendre mordicus le dispositif, en particulier dans deux grandes agglomérations françaises.

ZFE : le gouvernement garde son cap

Le texte adopté en commission parlementaire n’a pas suffi à faire plier l’exécutif. Si la majorité des députés a voté en faveur d’un amendement remettant en cause l’obligation pour toutes les villes de plus de 150 000 habitants de mettre en place une ZFE, le gouvernement a immédiatement riposté en annonçant le dépôt d’un contre-amendement. Objectif affiché : maintenir une base légale pour les collectivités qui souhaitent poursuivre le dispositif, et restreindre l'obligation aux seules métropoles de Paris et Lyon.

Pourquoi ces deux villes ? Parce qu’elles sont les seules à avoir dépassé les seuils réglementaires de pollution pendant au moins trois des cinq dernières années. Dans un communiqué transmis le 3 avril 2025, le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, justifie cette stratégie en invoquant la nécessité de préserver l’outil juridique : « Nous souhaitons conserver une base légale pour que les collectivités qui souhaitent continuer à en mettre en place puissent le faire simplement. »

Bruxelles veille

Derrière le débat national sur les ZFE, une menace plus discrète se profile : celle de la Commission européenne. Dans les arcanes bruxelloises, une suppression généralisée du dispositif ne passerait pas inaperçue. Et pour cause : l'exécutif européen – qui, rappelons, à toutes fins utiles, n'est pas élu – s'attend à des résultats concrets de la part de ses 27 pays membres en matière de transition écologique. Ainsi donc, et selon une note interne de la Direction générale du Trésor, datée du 1er avril 2025, un abandon trop large des ZFE signifierait pour la France qu'elle s'assiérait sur 3 milliards d’euros de financement européen en 2025 - directement issus du Plan national de relance et de résilience (PNRR) et jusqu'à 40,3 milliards d’euros d'ici à 2026. 

Derrière la querelle franco-française se dessine donc un risque à double détente : budgétaire et diplomatique. Or, avec une dette publique qui a franchi la barre des 3 400 milliards d’euros, l’exécutif sait qu’il marche sur une corde raide. Bref, l’Europe veille, et celle-ci ne rechigne pas à maintenir la pression sur la France, et ce, même si les ZFE sont perçues comme de l’écologie punitive, antisociale, et sont rejetées par 86 % des particuliers ayant participé à la grande consultation publique à leur sujet.

Un moratoire à l’étude

Le 18 février 2025, 35 députés issus de divers groupes parlementaires ont déposé une proposition de loi visant à instaurer un moratoire de cinq ans sur les ZFE. Leur argument : donner le temps aux collectivités, aux entreprises et aux citoyens de s’adapter à la mutation en cours. Une suspension qui permettrait également d’ajuster le dispositif aux réalités territoriales, souvent éloignées du discours national.

La proposition sera débattue en séance plénière à partir du 8 avril 2025. Mais même si elle est adoptée, rien ne garantit sa mise en œuvre, puisque le Conseil constitutionnel pourrait censurer certaines de ses dispositions. La bataille sur les ZFE est donc loin d’être terminée.

Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin.

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