Les particules fines libérées par l’usure des freins automobiles sont bien plus polluantes que les moteurs diesel. Invisibles à l’œil nu, ces particules métalliques s’accumulent dans l’air que nous respirons et pourraient être encore plus toxiques que les fumées d’échappement.
Automobile : ces particules polluent plus que le diesel
Depuis des années, la lutte contre la pollution automobile s’est concentrée sur les moteurs thermiques et leurs émissions. Pourtant, une pollution cachée persiste, menaçant notre santé sans que nous en soyons conscients. Une récente étude scientifique révèle l’ampleur de ce fléau invisible et remet en question nos priorités en matière de réglementation environnementale.
Freinage et pollution : un danger méconnu au cœur de nos villes
Le 20 février 2025, une étude de l’Université de Southampton, publiée dans Particle and Fibre Toxicology, a mis en évidence un fait inquiétant : les particules fines issues de l’usure des freins automobiles seraient plus toxiques que celles des moteurs diesel. Alors que la lutte contre la pollution automobile se concentre sur les émissions d’échappement, une source de pollution tout aussi préoccupante passe sous les radars législatifs. Ces particules invisibles à l’œil nu, enrichies en cuivre, s’infiltrent profondément dans nos poumons, augmentant le risque de maladies respiratoires sévères.
Les particules de frein : une pollution qui s’aggrave à chaque arrêt
Lorsqu’un conducteur freine, les plaquettes frottent contre les disques de frein, libérant une quantité infime mais continue de particules métalliques dans l’air. Cette pollution n’est pas un phénomène marginal : elle représente jusqu’à 55 % des émissions de particules fines générées par les véhicules.
Les particules issues du freinage sont riches en métaux lourds, notamment en cuivre, utilisé pour améliorer la conductivité thermique des plaquettes de frein modernes. Cependant, le cuivre est également un toxique cellulaire, capable d’engendrer un stress oxydatif sévère dans les poumons et de favoriser des maladies comme la fibrose pulmonaire ou le cancer.
Pourquoi ces particules sont-elles plus dangereuses que le diesel ?
Alors que les filtres à particules ont drastiquement réduit la pollution des moteurs diesel ces dernières années, rien n’a été fait pour limiter la pollution issue du freinage. Les PM2.5, particules fines de moins de 2,5 micromètres de diamètre, générées par l’usure des freins sont capables d’atteindre les alvéoles pulmonaires, voire de passer directement dans le système sanguin.
Les études menées par l’Université de Southampton montrent que ces particules, une fois inhalées, provoquent un stress oxydatif important, perturbant le métabolisme cellulaire et déclenchant des réactions inflammatoires chroniques. Contrairement aux émissions diesel, qui sont aujourd’hui en partie filtrées par des systèmes de dépollution, les particules de frein échappent totalement aux contrôles et continuent de se disperser librement dans l’air des villes.
Les effets sur la santé sont d’autant plus préoccupants que ces particules sont présentes partout où le trafic est dense. Dans les zones urbaines, les concentrations les plus élevées sont relevées aux intersections, aux feux rouges et aux abords des passages piétons, où les véhicules multiplient les arrêts et les redémarrages.
Une réglementation (enfin) à l’étude
Face à ces résultats alarmants, la Commission européenne a décidé d’intégrer, pour la première fois, des limites d’émission pour les particules de frein dans la future norme Euro 7, prévue pour 2026. Cette réglementation imposera aux constructeurs de réduire ces émissions, avec des plafonds allant de 3 à 11 mg/km selon le type de véhicule.
L’objectif de cette norme est de mieux encadrer les polluants non issus des gaz d’échappement, en particulier les particules générées par le freinage et l’usure des pneus. Les fabricants devront développer de nouvelles technologies pour capturer ces particules à la source, notamment en équipant les véhicules de dispositifs de filtration spécifiques.
Certains constructeurs ont déjà commencé à investir dans ces innovations. Tallano Technologies, par exemple, a conçu un collecteur de particules de frein capable de capter jusqu’à 90 % des émissions, mais ces dispositifs restent aujourd’hui rares et optionnels. L’enjeu est désormais d’imposer leur généralisation à l’ensemble du parc automobile, afin de réduire significativement cette pollution invisible.
Comment se protéger dès aujourd’hui ?
Les conducteurs peuvent limiter leur exposition en adoptant une conduite plus souple et en évitant les freinages brusques. Une distance de sécurité accrue permet de limiter les à-coups et donc la production de particules fines issues du freinage. Le choix des matériaux des freins joue également un rôle clé : les freins en céramique, bien que plus coûteux, produisent moins de particules que les freins métalliques traditionnels.
Pour les piétons et les cyclistes, éviter les zones à forte densité de circulation est une mesure simple mais efficace. Les trottoirs situés près des feux rouges sont particulièrement exposés à la pollution due aux freins.