Réglement FiDA : les Français craignent pour leurs données financières

Le projet FiDA (Financial Data Access) fait l’objet d’un vif débat en Europe. Présenté comme un pas en avant vers une finance plus ouverte et compétitive, il soulève néanmoins de sérieuses inquiétudes quant à la confidentialité des données des consommateurs. Entre les promesses d’innovation et les craintes de dérives, que cache réellement cette initiative européenne ?

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 7 février 2025 à 8h45
carte vitale, assurance maladie, phishing, arnaque, email, carte numérique
Réglement FiDA : les Français craignent pour leurs données financières - © Economie Matin
85%85 % des Français font confiance à leur assureur traditionnel

Le 28 juin 2023, la Commission européenne a dévoilé un nouveau règlement, le FiDA, qui vise à encadrer l’accès et le partage des données financières au sein de l’Union européenne. Dans la droite ligne de l’open banking, cette initiative ambitionne de favoriser l’innovation financière en rendant les données accessibles à un plus grand nombre d’acteurs.

Mais derrière ces belles intentions, le projet suscite de nombreuses craintes. Assureurs, consommateurs et experts alertent sur les risques en matière de confidentialité et les conséquences sur la mutualisation des risques. Alors que le texte entre dans sa phase de négociation, les Français se montrent massivement opposés à l’ouverture de leurs données.

Données financières : qu’est-ce que le FiDA ?

Le Financial Data Access (FiDA) est un projet de règlement européen destiné à obliger les institutions financières à permettre aux consommateurs et aux entreprises d’accéder à leurs propres données. Jusqu’à présent, ces informations restaient exclusivement détenues par les banques et les assurances.

Avec le FiDA, ces données pourront être partagées avec d’autres acteurs, notamment les start-ups financières (AssurTech, FinTech) et les grandes entreprises technologiques.

Les points-clés du FiDA :

Élément Changement apporté
Accès aux données Possibilité pour les consommateurs de partager leurs données avec des tiers.
Produits concernés Tous les produits financiers, sauf la complémentaire santé.
Nouveaux acteurs Les GAFAM et AssurTech pourraient exploiter ces données.
Consentement Les consommateurs doivent donner leur accord, mais la réversibilité du consentement n’est pas garantie.

Si l’objectif est de stimuler la concurrence et de favoriser des offres personnalisées, des experts dénoncent des risques majeurs en termes de confidentialité et de solidarité tarifaire.

Les craintes des Français pour leurs données financières

Les Français sont-ils prêts à partager leurs données financières et assurantielles avec une multitude d’acteurs ? Non, à en croire un sondage exclusif Macif-Kantar réalisé du 30 décembre 2024 au 3 janvier 2025.

Les chiffres-clés de l’enquête :

  • 85 % des Français font confiance à leur assureur traditionnel, contre 40 % ou moins pour les comparateurs en ligne et les GAFAM.
  • 75 % des sondés veulent que leurs données de santé restent strictement confidentielles.
  • 65 % des Français ne souhaitent pas partager leurs données financières.
  • 64 % refusent de transmettre leurs informations personnelles.
  • Seulement 9 % accepteraient l’ouverture des données, mais sous conditions strictes.

Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif, tire la sonnette d’alarme : « Nous ne pouvons pas rester silencieux face à une initiative qui pourrait compromettre la sécurité des données de nos assurés. La mutualisation repose sur la confiance et la solidarité. Il est impératif que le projet FiDA soit ré-examiné pour garantir la protection des données et préserver les principes fondamentaux de notre modèle assurantiel. Par ailleurs, le manque d’information des Français sur ce sujet est préoccupant. Ce projet menace directement la manière dont ils seront assurés demain, laissant pour compte les plus fragiles ou les plus exposés aux risques. »

L’entrée de nouveaux acteurs, notamment les grands groupes technologiques, inquiète particulièrement. Qui garantira que les données ne seront pas exploitées à des fins commerciales ? La question reste sans réponse.

Un risque majeur pour la solidarité du modèle assurantiel

En l’état actuel, le modèle d’assurance repose sur la mutualisation des risques. Chacun cotise en fonction de critères collectifs, permettant de financer les sinistres des plus fragiles.

Avec FiDA, le marché pourrait être segmenté, favorisant des assurances "à la carte". Résultat ? Les profils les plus risqués paieraient des primes exorbitantes, voire ne trouveraient plus d’assurance.

Impact sur la solidarité tarifaire :

Problème Conséquence attendue
Fin de la mutualisation Montée des tarifs pour les plus vulnérables.
Segmentation accrue Sélection des clients les moins risqués.
Accès aux assurances Exclusion des personnes âgées ou malades.

Dans l’enquête Macif-Kantar :

  • 58 % des Français considèrent que la solidarité est essentielle dans l’assurance.
  • Ce chiffre grimpe à 69 % chez les moins de 35 ans et à 73 % chez les Français vivant dans une zone à risques.

Mais paradoxalement, 52 % des Français se disent favorables à une tarification basée sur le risque individuel. Une contradiction révélatrice d’une méconnaissance des principes assurantiels.

Le FiDA est-il un progrès ou une menace pour la protection des consommateurs ? D’un côté, il promet davantage de transparence et pourrait stimuler la concurrence. D’un autre, il soulève de profondes inquiétudes quant à l’exploitation des données et l’avenir du modèle assurantiel.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

Aucun commentaire à «Réglement FiDA : les Français craignent pour leurs données financières»

Laisser un commentaire

* Champs requis