Alors que l’Unédic espérait stabiliser ses finances, la réalité est bien plus sombre. Déficit, hausse du chômage et prélèvements de l’État : les comptes de l’assurance-chômage s’enfoncent dans le rouge, menaçant sa capacité à se désendetter. Un retour à l’équilibre est-il encore envisageable ?
Assurance-chômage : le déficit menace, vers une nouvelle réduction des droits ?
« Entre 2024 et 2026, les prélèvements de l'État obèrent la totalité des capacités de désendettement de l'Unédic, qui doit donc réemprunter dans un contexte de taux encore élevés », alerte Christophe Valentie, directeur général de l’Unédic.
Une remontée du chômage qui plombe les finances
Les dernières prévisions de l’Unédic sont sans appel : 2025 s’annonce comme une année difficile pour le régime d’assurance-chômage. Après une légère stabilisation en 2024, la dégradation du marché du travail vient peser lourdement sur les comptes.
- 50 000 emplois devraient être détruits en 2025 selon les projections de l’Unédic. 114 000 demandeurs d’emploi supplémentaires avaient déjà été enregistrés par France Travail depuis la fin de l'année 2023.
- 2,7 millions de personnes sont actuellement indemnisées, un chiffre en augmentation qui alourdit mécaniquement les dépenses du régime.
Une reprise de l'emploi est prévue en 2026 et en 2027 (+78 000 et +139 000 respectivement).
La logique est implacable : moins d’emplois, moins de cotisations patronales et donc des recettes en baisse. À cela s’ajoute un autre problème majeur : les ponctions de l’État.
Au-delà de la conjoncture économique, les partenaires sociaux pointent un autre coupable : les prélèvements imposés par l’État. Ces transferts financiers, destinés à financer d’autres politiques publiques, creusent encore un peu plus les difficultés de l’Unédic.
Ponctions en chiffres :
- 5 milliards d’euros prélevés en 2024 pour financer France Travail
- 12 milliards d’euros prévus entre 2023 et 2026, une somme qui obère toute capacité de remboursement de la dette
- CSG insuffisante : la suppression des cotisations chômage des salariés n’a pas été intégralement compensée par l’État
Les syndicats et le patronat dénoncent une situation où l’Unédic est utilisée comme un trésor de guerre pour financer d’autres dépenses.
Lors de la crise du Covid, l’assurance-chômage avait même été mise à contribution pour financer le dispositif de chômage partiel, une charge qui ne relevait pourtant pas de ses missions premières.
Selon Jean-Eudes Tesson, président de l’Unédic et représentant du Medef : « Encore faut-il que l'Etat les respecte et que France Travail constate que nous finançons 80 % de son budget. »
La situation est tellement délétère que l'Unédic a écrit au Premier ministre François Bayrou, mais les représentants ont trouvé sa réponse sans grand intérêt.
Assurance-chômage : un déficit qui gèle tout espoir de désendettement
Avec un déficit de 200 millions d’euros attendu en 2025, les prévisions d’excédent annoncées il y a encore quelques mois sont caduques. L’Unédic va être incapable de rembourser ses emprunts sans s’endetter davantage.
Fin octobre 2023, les projections tablaient encore sur un solde positif de 300 millions d’euros en 2024, avec une trajectoire d’amélioration progressive : 1,8 milliard en 2025, 3,5 milliards en 2026, et 9,4 milliards en 2027. Mais la réalité est tout autre. La hausse du chômage, combinée aux prélèvements de l’État, a anéanti ces perspectives optimistes.
Malgré 2,2 milliards d’euros d’économies attendues grâce à la convention d’assurance-chômage signée en novembre 2023, ces efforts sont insuffisants pour compenser le poids croissant des dépenses et des ponctions gouvernementales.
Le principe même de l’assurance-chômage, conçu pour être contracyclique (c'est-à-dire accumuler des réserves en période de croissance pour faire face aux crises), est désormais paralysé. L’Unédic se trouve dans une situation où elle doit réemprunter pour payer ses dettes, un cercle vicieux dangereux à long terme.
Malgré cette situation tendue, un espoir subsiste : la révision des règles européennes sur l’indemnisation des travailleurs frontaliers. Actuellement, l’Unédic doit financer une part importante des allocations versées à ces travailleurs, ce qui lui coûte environ 800 millions d’euros par an.
La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, mène des négociations pour alléger cette charge.