Arrêt maladie : une proposition de loi pour faciliter le licenciement des fraudeurs

Une proposition de loi a été déposée par Antoine Vermorel-Marques, député Droite Républicaine de la Loire, le 25 mars pour enrayer l’augmentation spectaculaire des arrêts de travail frauduleux. Dans un contexte où les fraudes à l’arrêt maladie explosent, le texte propose un nouveau levier : faciliter le licenciement des salariés pris en flagrant délit.

Stephanie Haerts
Par Stéphanie Haerts Publié le 26 mars 2025 à 13h30
Arrêt maladie : une loi pour faciliter le licenciement des fraudeurs
Arrêt maladie : une proposition de loi pour faciliter le licenciement des fraudeurs - © Economie Matin
42 millions €En 2024, selon la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), les fraudes aux indemnités journalières ont explosé : 42 millions d’euros de préjudice recensés, contre 17 millions en 2023.

L'arrêt maladie au cœur d’une offensive politique contre la fraude

Face à l’ampleur du phénomène, la droite entend frapper vite et fort. À l’origine de cette initiative, un message d’un chef d’entreprise, excédé par un salarié détenteur d’un faux arrêt maladie obtenu pour « moins de vingt euros » sur un site illégal. La situation semble caricaturale. Elle est pourtant bien réelle. Le député Antoine Vermorel-Marques, interpellé, a lui-même mené sa propre expérimentation en ligne et il est parvenu sans difficulté à recevoir un faux document médical « prêt à l’emploi ».

Une vidéo virale est venue conforter le parlementaire dans son intuition. Sur TikTok, une jeune femme, visiblement en congé maladie, se filme dévalant une piste de ski en lançant à la caméra : « Tu vas faire quoi la CPAM, le contrôle du travail ? J’m’en fous ! » Le ton est donné. Selon le député, « la lutte contre la fraude sociale fait partie du combat pour la défense du travail que mène la droite », peut-on lire dans Le Parisien. L’objectif est désormais législatif. Et offensif.

Quand la fraude au travail devient une ligne budgétaire nationale

Le contexte n’est pas anodin. En 2024, selon la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), les fraudes aux indemnités journalières ont explosé : 42 millions d’euros de préjudice recensés, contre 17 millions en 2023. Une progression de 147 % en douze mois. Ces chiffres vertigineux servent de socle à la proposition de loi que s’apprête à défendre Antoine Vermorel-Marques, avec le soutien de Fabien Di Filippo et du groupe Droite Républicaine.

Le texte entend ajouter un outil à l’arsenal de lutte contre la fraude : une communication automatique des cas avérés de tricherie de la CNAM vers l’employeur, preuves à l’appui. Jusqu’ici, les sanctions étaient possibles mais délicates à mettre en œuvre sur le plan juridique. Avec cette proposition, les employeurs pourraient, s’ils le souhaitent, enclencher une procédure de licenciement facilitée. La logique est sans détour : « Ces pratiques, qui permettent d’obtenir un arrêt maladie en quelques clics, sont non seulement illégales, mais nuisent à l’intégrité de notre système de santé », a déclaré le député dans le quotidien.

Entre volonté de répression et nécessité d’équilibre du droit du travail

Le gouvernement, pour sa part, n’a pas botté en touche. Interpellée au cours d’un débat sur la fraude sociale, organisé à la demande des Républicains, Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée à la Santé, a répondu avec une tonalité compatissante : « Vous soulignez un problème très grave et croissant. » Elle a confirmé que « la CNAM a renforcé ses équipes » avec plus de 1 600 agents pour traquer les fraudes.

Signe d’un consensus politique naissant, la ministre a ajouté être « évidemment favorable sur le principe » à la proposition de loi. À compter de juillet 2025, la généralisation des formulaires Cerfa sécurisés devrait, selon le ministère, compliquer considérablement la production de faux documents médicaux. Cette mesure réglementaire accompagnera le dispositif législatif en gestation. Mais ce que certains considèrent comme un progrès légitime contre la fraude est vu par d'autres comme une pente glissante vers un droit du travail affaibli. Une inquiétude légitime, notamment chez les syndicats qui redoutent des licenciements abusifs ou des erreurs de traitement en cas de suspicion infondée. Le débat, lui, ne fait que commencer.

Un débat symptomatique d’une société en fracture

Cette proposition de loi sur l'arrêt maladie ne vise pas seulement une poignée de fraudeurs numériques. Elle cristallise une ligne de fracture politique entre ceux qui prônent un renforcement immédiat de la répression et ceux qui insistent sur les garde-fous protecteurs du salariat.

Entre vidéos TikTok, chiffres explosifs et sanctions disciplinaires, l’arrêt maladie devient une nouvelle arène de confrontation idéologique. Ce qui était autrefois un mécanisme de protection temporaire du travailleur malade s’est transformé, pour certains, en faille exploitée à des fins personnelles. En redonnant un levier direct aux employeurs, la droite propose une réponse musclée. Reste à savoir si le législateur parviendra à équilibrer cette réforme pour éviter que l’arme anti-fraude ne se retourne, un jour, contre les innocents.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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