Ce mardi, à 20h (heure de Paris), le Centre spatial guyanais sera le théâtre du lancement inaugural de la fusée Ariane 6. Ce lancement tant attendu marque un tournant décisif pour l’Europe spatiale, confrontée à des enjeux stratégiques et de compétitivité cruciaux.
Ariane 6 : un premier lancement déterminant pour l’Europe spatiale
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Publié le 9 juillet 2024 à 10h00
10 MILLIARDSAmazon a commandé pour 10 milliards de dollars de lancements pour Ariane 6.
Le lancement d'Ariane 6 vise à rétablir l'accès souverain de l'Europe à l'espace, en particulier face à la domination de l'américain SpaceX. La fusée emportera 18 microsatellites, notamment pour des universités et des expériences scientifiques. Après une « répétition humide » réussie en juin, toutes les procédures jusqu'au moment d'allumer les moteurs sont prêtes. Une répétition qui s'est bien déroulée et qui laisse augurer du meilleur pour le lanceur européen.
Un décollage stratégique pour l'Europe
L'Europe a été privée de son accès à l'espace pendant neuf mois, depuis le dernier vol de Vega en octobre 2023. Avec la retraite d'Ariane 5, la fin de l'utilisation des Soyouz russes après l'invasion de l'Ukraine, et les défaillances de Vega, la situation est devenue critique. « Tout ce qui pouvait mal tourner a mal tourné », regrette auprès de La Tribune Joseph Aschbacher, directeur général de l'ESA. « Ariane 6 est cruciale pour l'Europe, qui doit absolument disposer d'un accès indépendant à l'espace ».
Ariane 6 est un projet ambitieux visant à succéder à Ariane 5 et à assurer un accès autonome de l'Europe à l'espace jusqu'au début des années 2030. Cette nouvelle fusée doit démontrer sa capacité à réaliser des missions multiples, notamment la mise en orbite de constellations de satellites. « Grâce à la capacité de réallumage de son étage supérieur, Ariane 6 est adaptée à des missions multiples (GEO et LEO) », souligne Martin Sion, patron d'Arianegroup. Cela inclut les programmes européens de navigation, d'observation de la Terre, de science et de sécurité.
Ce projet rencontre des défis de compétitivité. Le modèle économique d'Ariane 6 a été plombé par les retards, les coûts accrus des fournisseurs et les exigences contradictoires des 22 pays membres de l'ESA. Malgré ces obstacles, Ariane 6 bénéficie d'un soutien fort, notamment de l'Allemagne, qui a récupéré de nombreuses technologies développées par la France.
L'espoir de la communauté scientifique
Le lancement inaugural d'Ariane 6 est crucial non seulement pour restaurer la souveraineté spatiale de l'Europe, mais aussi pour rassurer et attirer les clients. Le carnet de commandes de la fusée est déjà bien rempli, avec une trentaine de lancements prévus, dont des satellites militaires et d'observation. Amazon, par exemple, a commandé 18 lancements pour déployer sa constellation Kuiper, un investissement estimé à 10 milliards de dollars.
Le succès du vol inaugural permettra à Arianespace d'entrer dans une phase d'exploitation commerciale du lanceur, avec des objectifs ambitieux : après deux vols en 2024, six lancements sont prévus en 2025, puis huit en 2026. À partir de 2027, Ariane 6 devrait réaliser en moyenne neuf lancements par an, avec une capacité maximale de douze lancements par an. L'objectif est de pouvoir réaliser deux lancements dans un intervalle de deux semaines pour couvrir les périodes les plus intenses.
Ce vol de démonstration doit prouver qu'Ariane 6 peut accomplir les mêmes missions qu'Ariane 5, avec des capacités accrues. Un succès ouvrirait la voie à une nouvelle ère pour l'Europe spatiale, capable de rivaliser avec les géants mondiaux et de garantir son indépendance stratégique.