Je me trouve à Salta, une ville provinciale d’Argentine. Nous faisons une visite pour examiner des investissements. Nous en tirons des leçons sur l’instabilité des monnaies, des régimes politiques, et les placements.
Argentine : leçons sur l’inflation
Le lauréat du Prix Nobel d’économie de 1971, Simon Kuznets, a observé : “Il existe quatre types d’économies. Développée. Sous-développée. Le Japon. L’Argentine.”
Un contact local nous a invités au “Club 20” ce midi, un club social exclusif, basé à Salta. (Le nombre 20 se réfère à une date critique de la guerre d’indépendance contre l’Espagne.)
L’aïeul de notre contact était l’homme le plus riche d’Amérique latine, et l’un des fondateurs du club, qui regroupait des capitaines d’industrie et personnes influentes à la première moitié du 20ème siècle.
Après la Seconde Guerre mondiale, les fortunes du pays ont basculé. Le nouveau président, Juan Perón, a interdit les rassemblements du Club 20, qui formait un noyau d’opposition aux programmes de nationalisation de l’économie. Le gouvernement a même saisi les locaux du groupe, à Salta, pour les transformer en Hôtel de Ville.
L’Argentine mélange aujourd’hui des aspects d’un pays européen, et du tiers-monde.
Dans la région montagneuse, beaucoup d’habitants - descendants d’Indiens - vivent dans des maisons d’adobe (boue argileuse séchée), au sol en terre (voir une des maisons en adobe abandonnées que vous pourrez voir).
Dès qu’ils en ont les moyens, à la campagne, les gens achètent des motos ou camions pick-up.
Cela leur épargne les heures de marche qui font partie du quotidien de nombreuses personnes jusqu’ici - pour aller à l’école, se rendre au marché, ou voir un médecin.
L’énergie solaire marche ici, mais peu de gens l’utilisent en raison du coût. Les élus provinciaux en distribuent parfois dans le cadre d’un programme.
Les gens des villes ont en général plus de richesse, mais le revenu moyen reste d’environ 10.000 euros dans le pays.
Beaucoup de gens touchent des planes, qui sont des subventions. Cependant, les distributions et les déficits contribuent à une chute de la valeur du peso, de moitié tous les 12 mois au rythme actuel.
Instabilité dans l’énergie
Les dévaluations de la monnaie nuisent en général à toute entreprise, même si elles peuvent faire grimper les cours en Bourse d’un point de vue nominal.
Même l’énergie, qui peut grimper en prix avec l’inflation, ne protège pas à coup sûr.
YPF, le producteur semi-étatique argentin, fait des gains en Bourse de plus de 6.000 % depuis 1998, mais seulement si vous les comptez en pesos.
Lorsque vous prenez en compte la dévaluation du peso, la société a perdu 44 % depuis sa cotation en Bourse dans les années 90.
Les soucis de hausses de prix font aussi des dégâts en Europe, même si la situation dans l’énergie offre un peu de répit.
Le gaz naturel chute depuis plusieurs mois. Il coûte à présent 43 euros le MWh (l’unité de l’échange d’Amsterdam), contre des prix de 100 à 200 euros sur la majorité de l’année dernière. Il revient peu à peu vers des niveaux de la norme (autour de 20 euros le MWh), comme vous le verrez ci-dessous.
Cependant, le continent n’a pas encore relégué les soucis au passé.
Le prix du baril du pétrole tient toujours autour des 85 $ le baril de Brent. La rechute du baril, en cours depuis l’été dernier, a peut-être atteint ses limites.
Or, le répit dans l’énergie bénéficie toujours de facteurs qui risquent de disparaître un jour ou l’autre. Par exemple, la mollesse de la demande chinoise continue d’aider les prix de l’énergie à baisser.
Reuters :
“Une baisse des exportations chinoises en janvier et février indiquent une faiblesse de la demande pour les produits chinois…
“Les importations chinoises ont aussi baissé, selon les chiffres officiels, ce qui provient aussi de la faible demande internationale, puisque le pays importe des matériaux et pièces pour alimenter ses exportations.”
Jusqu’ici, la faiblesse de la demande chinoise permet de réduire la tension sur l’énergie ailleurs dans le monde… en particulier en Europe.
L’industrie européenne a aussi réduit la consommation d’énergies en réaction à l’envolée des prix.
Cependant, un manque de demande de l’énergie correspond à une baisse de production pour les biens que nous utilisons, comme les engrais pour l’agriculture, ou l’acier pour la construction.
La baisse de consommation d’énergies réduit le prix du gaz, de l’électricité, et du pétrole, mais présage des baisses de production et recul de l’activité des économies.
Les hausses de prix - un signe de la perte du pouvoir d’achat - font aussi des dégâts sur le continent européen.