Les acteurs du marketing numérique et les médias français montent au créneau contre Apple. En cause, un nouvel outil, « distraction control », qui permet de masquer les publicités sur Safari. Cette fonctionnalité, selon eux, menace le modèle économique de la presse et pourrait avoir des répercussions sur la conformité aux règles européennes sur la protection des données.
Apple en guerre contre la publicité : la colère des médias français
Un outil qui inquiète les annonceurs
Depuis septembre, la marque à la pomme a introduit une nouvelle fonctionnalité dans la dernière mise à jour de son système d'exploitation : "distraction control". Cet outil permet aux utilisateurs de masquer manuellement les fenêtres pop-up et les bannières publicitaires lorsqu'ils naviguent sur Safari. Ce qui semblait être une simple amélioration de l’expérience utilisateur a rapidement déclenché une levée de boucliers du côté des médias et annonceurs français.
Les professionnels du secteur estiment que cette fonctionnalité remet en cause un pan entier de leur modèle économique. En effet, la publicité en ligne est une source de revenus essentielle pour de nombreux médias, y compris la presse écrite et les pure players. En masquant les publicités, les utilisateurs réduisent ainsi les revenus publicitaires, créant une incertitude financière pour les médias dépendants de ce modèle. C’est dans ce contexte qu'une lettre ouverte, signée par des organisations telles que l'Alliance Digitale et l'Association française de la presse d'information générale (Apig), a été adressée à Apple, exigeant la suspension de cet outil.
Des conséquences sur la protection des données
Outre l'impact économique, les signataires de la lettre expriment leur crainte quant aux effets de "distraction control" sur la protection des données. En permettant aux utilisateurs de masquer les fenêtres de consentement aux cookies, cet outil pourrait, à terme, compromettre la conformité des médias et des annonceurs avec les réglementations européennes sur la protection des données personnelles, comme le RGPD.
Cité par l'AFP, Pierre Devoize, directeur général adjoint d’Alliance Digitale, souligne ainsi le risque d'une automatisation future du masquage de ces fenêtres publicitaires. Si l’utilisateur n’a plus besoin de les masquer manuellement, cela pourrait entraîner une désactivation systématique des cookies, menaçant ainsi la collecte de données nécessaires à la publicité ciblée, pilier fondamental de nombreuses stratégies marketing.
Une réponse d'Apple attendue
Face à cette opposition, Apple a pour l'instant choisi de ne pas réagir officiellement. L’entreprise affirme toutefois que "distraction control" ne supprime pas définitivement les publicités mais les masque temporairement, permettant ainsi aux utilisateurs de choisir leur expérience de navigation. Cependant, pour les annonceurs et les médias, cette réponse ne suffit pas.
La lettre envoyée à Apple est la deuxième initiative de ce type en quelques mois. La première, envoyée en mai dernier, était restée sans réponse. Aujourd'hui, les signataires ne cachent pas leur détermination : ils envisagent de recourir à des actions juridiques si Apple ne suspend pas ou ne modifie pas cet outil. Il reste à voir si Apple, sous pression, prendra des mesures pour apaiser les craintes des médias et annonceurs français.