La Commission mixte paritaire a validé, le 31 janvier dernier, une réduction de 111 millions d’euros des crédits alloués à l’Aide médicale d’État (AME) pour 2025. Ce choix, qui maintient les fonds au niveau de 2024, s’inscrit dans un contexte de vive opposition entre droite, gauche et extrême droite. Alors que le gouvernement et les parlementaires cherchent un compromis, la baisse des crédits a de lourdes conséquences sur l’accès aux soins des migrants en situation irrégulière.
Aide médicale d’État : vers une baisse de 111 millions d’euros de crédits

Une réduction budgétaire qui suscite des tensions
Le dossier de l’Aide médicale d'État (AME), ce dispositif de couverture des soins pour les étrangers en situation irrégulière, est au cœur d’une bataille politique intense. Initialement, le budget de l'AME pour 2025 prévoyait une augmentation de 9 %, portant son budget à 1,3 milliard d'euros. Toutefois, après des négociations ardues, la commission mixte paritaire (CMP) chargée de boucler la version finale du budget 2025 (depuis adoptée par le gouvernement Bayrou par 49.3) a opté pour une réduction de 111 millions d'euros par rapport à cette prévision, maintenant ainsi les crédits au niveau de 2024.
La droite et l'extrême droite, principalement représentées par les sénateurs LR et les députés RN, plaidaient pour une coupe plus sévère, de l'ordre de 200 millions d'euros. Les députés Renaissance, menés par David Amiel, défendaient le maintien des crédits, sans prendre en compte l'inflation. Cette décision, bien que vue comme un compromis, n'a pas manqué de raviver les divisions.
La gauche et le gouvernement entre compromis et craintes
Les socialistes, bien qu'ayant fait campagne pour maintenir le financement à son niveau initial, ont finalement soutenu la proposition d'Amiel par crainte que le Sénat ne parvienne à imposer une version plus restrictive. « C’est une victoire partielle, mais il faut être pragmatique pour éviter une coupure plus importante », a commenté Patrick Kanner, président du groupe PS au Sénat.
Cette position a toutefois été critiquée par la France insoumise. Pour Aurélien Le Coq, membre de la CMP, « la Macronie et ses soutiens coupent dans l’AME, c’est l’extrême droite qui gouverne aujourd’hui. » Le reste de la gauche a exprimé son inquiétude, estimant que cette coupe entrave l’accès aux soins pour les plus vulnérables.
Les associations de santé et plusieurs anciens ministres ont dénoncé cette coupe budgétaire, soulignant les dangers qu'elle représente pour le système de santé français. L'argument sanitaire peine toutefois à convaincre les partisans de la réduction des crédits.
L'extrême droite et la droite réclament une révision plus drastique
Le sénateur Jean-François Husson (LR), qui portait l’option d’une coupe de 200 millions, a déploré ce choix, affirmant que « l'AME devient un véritable poids pour nos finances publiques » et que « sa réduction est inévitable face aux difficultés budgétaires actuelle ». Ces réactions fortement divergentes montrent bien la polarisation des enjeux autour de l'immigration et de la solidarité envers les étrangers en situation irrégulière.
Plus généralement, les membres de la droite et de l'extrême droite continuent de militer pour une réduction plus importante, voire l'élimination pure et simple de l'AME. « L’AME est un encouragement à la clandestinité, » a déclaré le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, sur BFM. Il a également soutenu la nécessité de « réduire le périmètre de soins » en déplorant l’absence de prise en compte des rapports comme celui d’Evin et Stefanini. Ce dernier préconisait en effet une révision du panier de soins accessibles, en limitant l’accès aux prestations « non-urgentes », mais il reconnaissait aussi l'importance de prévenir une dégradation massive de la santé des migrants, ainsi que la propagation de maladies.
Cette position semble néanmoins inapplicable à court terme, notamment en raison des multiples résistances dans l’hémicycle, où le centre, la gauche et certains acteurs de la société civile ne cessent de plaider pour une approche plus humaine. Le compromis adopté récemment laisse donc planer un équilibre fragile, les parlementaires n'ayant réussi à s’entendre que sur un maintien partiel des crédits, sans révision des critères d’éligibilité. « Les critères de l’AME restent inchangés », ont assuré plusieurs parlementaires socialistes, soulignant que cette décision permettait d'éviter de remettre en cause l'intégrité du dispositif.