Alimentation : quel est le budget des Français ?

Alors que l’inflation alimentaire continue de ronger les marges des ménages, la question du budget alimentation des Français s’invite dans tous les foyers. Et pour cause : cet indicateur révèle bien plus qu’un coût. Il éclaire une fracture sociale, une transition de modes de consommation, une évolution des priorités. Comment les Français dépensent-ils pour se nourrir, et à quel prix ?

Stephanie Haerts
Par Stéphanie Haerts Publié le 27 mars 2025 à 20h00
Quel est le budget alimentation des Français ?
Alimentation : quel est le budget des Français ? - © Economie Matin

Une part du budget qui s’est effondrée, mais à quel prix ?

Au fil des décennies, la place accordée à l’alimentation dans la consommation des ménages a fondu comme beurre au soleil. En 1960, elle représentait 35 % des dépenses totales selon l’Insee. En 2023 ? Seulement 15,9 %. Une chute spectaculaire, qui s’explique par une élévation du niveau de vie, la diversification des postes de consommation, et l’essor des dépenses dites « contraintes ». Mais attention aux illusions d’optique. Car si la part relative du budget alimentaire diminue, les montants absolus, eux, grimpent.

Toujours selon l’Insee, en euros constants (référencés à 2014), le budget annuel alimentaire par habitant est passé de 1 322 euros en 1960 à 3 456 euros en 2023. Et cette évolution cache d’importants contrastes sociaux. Comme le rappelle le site La Finance pour tous, « les 10 % des ménages ayant le niveau de vie le plus faible consacrent une part bien plus importante à l’alimentation à domicile que les 10 % les plus riches ».

324 euros mensuels : un chiffre moyen trompeur

La moyenne mensuelle consacrée à l’alimentation est aujourd’hui estimée à 324 euros, selon le Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie (Crédoc). Cette estimation repose sur le concept d’unité de consommation, permettant de comparer des ménages de tailles différentes. Mais cette donnée moyenne dissimule des écarts abyssaux. Car tous les Français ne mettent pas le même montant dans leur caddie.

D’après l’Insee, les ouvriers supportent une charge budgétaire alimentaire bien plus lourde que les cadres. Autrement dit : une inégalité structurelle déguisée en normalité statistique. Le Crédoc note également que 16 % des Français déclaraient en 2022 ne pas manger à leur faim, un chiffre inquiétant, conséquence directe de l’envolée des prix post-Covid et de l’insécurité alimentaire croissante.

Produits carnés en chute, légumes en tête : une transformation alimentaire

Les comportements d’achat ont évolué, et pas seulement pour des raisons de goût. En dix ans, la part du budget dédiée aux produits carnés a reculé de près de 2 %, selon l’Insee. Même dynamique pour les produits laitiers (-1 %), surtout chez les ménages modestes. À l’inverse, les dépenses en légumes ont grimpé (+1 %), mais cette hausse reste portée par les ménages les plus aisés.

Un virage alimentaire s’opère, mais il n’est ni homogène ni égalitaire. Si certains adoptent les fruits exotiques (+26 %), d’autres réduisent leurs achats de fruits courants : pommes, poires, kiwis, fraises, tous en recul de 8 %. Et plus inquiétant encore : les ménages modestes ont réduit leurs achats de fruits frais de 11 %, pendant que les plus riches les augmentaient de 11 %.

L’inflation alimentaire, ce poison silencieux

Le budget alimentation des Français n’échappe pas à la poussée inflationniste. Entre 2022 et 2024, les hausses de prix sur les produits alimentaires ont contraint les foyers à revoir leur copie. Moins de viande, moins de marques, plus de discount, davantage de menus planifiés. L’étude NielsenIQ relayée par CoursesPlanner.app (2024) note une augmentation du recours aux enseignes à bas prix et une explosion des outils de gestion de courses.

Et quand on gratte un peu, les chiffres révèlent aussi un basculement discret mais profond : les Français consacrent désormais 6,4 % de leur budget alimentaire à la restauration en cantine, contre 1,2 % pour les boissons non alcoolisées et 1,7 % pour les alcoolisées, peut-on lire sur Le Mag de la Conso, Ouest-France. Le foyer n’est plus le seul lieu de consommation, mais il reste le thermomètre social de cette mutation.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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