L’Afrique, nouvel eldorado de la fintech : et si la clé de l’inclusion financière était ailleurs ?

Des licornes valorisées à des milliards de dollars, des investissements records… la fintech africaine est en plein boom. Mais derrière ces succès retentissants, une question se pose : cette concentration des capitaux sur quelques acteurs majeurs ne risque-t-elle pas de laisser de côté des millions d’Africains ? Et si la véritable innovation se trouvait du côté des entrepreneurs locaux, ces « fondateurs oubliés » qui connaissent les besoins réels de leurs communautés ? Plongez au cœur de la révolution fintech africaine et découvrez comment repenser l’inclusion financière sur le continent.

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Par Frédéric Labbe Chapuis Publié le 13 juillet 2024 à 8h00
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50%Près de 50% des adultes en Afrique n'ont pas de compte bancaire.

L'Afrique est un continent en pleine effervescence, où la technologie financière, la "fintech", connaît une croissance fulgurante. Les investisseurs du monde entier ont les yeux rivés sur ce continent, attirés par le potentiel de profits rapides dans ces marchés émergents. Des milliards de dollars ont été investis ces dernières années, propulsant la fintech africaine au rang de l'une des plus dynamiques au monde. En 2022, le financement des startups africaines a été multiplié par 18,5 par rapport à 2016, et près de la moitié de ces investissements ont été consacrés à la fintech.

Mais attention à ne pas se laisser aveugler par les paillettes des licornes technologiques et des startups à la mode. Certes, des entreprises comme Flutterwave, spécialisée dans les paiements transfrontaliers et valorisée à plus de 3 milliards de dollars, Chipper Cash, qui facilite les transferts d'argent internationaux et a levé plus de 300 millions de dollars, ou OPay, super-application mobile offrant une multitude de services financiers et valorisée à 2 milliards de dollars, font la une des journaux et symbolisent cette réussite africaine.

D'autres acteurs majeurs tels que MNT-Halan, plateforme égyptienne de prêt et de paiement pour les travailleurs informels, TymeBank, banque digitale sud-africaine qui a acquis plus de 5 millions de clients en moins de trois ans, Wave, service de transfert d'argent mobile sénégalais qui concurrence les opérateurs traditionnels, Jumo, plateforme sud-africaine de crédit et d'épargne qui utilise l'intelligence artificielle pour évaluer la solvabilité de ses clients, ont également connu des succès remarquables et attiré des investissements considérables.

Cependant, cette concentration des capitaux sur quelques acteurs majeurs pose question. En 2023, 75% de tous les financements en capital-risque ont été captés par seulement 10 entreprises, créant ainsi un oligopole qui risque de freiner l'innovation et de laisser de côté une grande partie de la population. Cette situation soulève des inquiétudes quant à l'équité et à la diversité du secteur, et pourrait limiter l'émergence de nouvelles solutions adaptées aux besoins spécifiques des différentes communautés africaines.

N'oublions pas que l'objectif premier de la fintech est de favoriser l'inclusion financière, de permettre à tous les Africains, même les plus isolés, d'accéder à des services financiers de qualité tels que le paiement mobile, le crédit, l'épargne ou l'assurance. Or, en Afrique subsaharienne, près de 360 millions d'adultes, soit près de la moitié de la population adulte, n'ont toujours pas de compte bancaire. Cela signifie qu'ils sont exclus du système financier formel et n'ont pas accès aux outils nécessaires pour gérer leurs finances, développer leurs activités ou faire face aux imprévus.

C'est un défi immense, mais aussi une opportunité extraordinaire pour innover et repenser la distribution de ces services. Il est temps de se tourner vers les "fondateurs oubliés", ces entrepreneurs locaux, souvent méconnus, qui comprennent les besoins spécifiques de leurs communautés. Ce sont eux qui détiennent les clés d'une véritable inclusion financière, en proposant des solutions adaptées aux réalités du terrain, telles que des services financiers basés sur la téléphonie mobile, largement répandue en Afrique, des réseaux d'agents bancaires dans les zones rurales mal desservies par les banques traditionnelles, ou des plateformes de microcrédit solidaire pour les petits entrepreneurs et les agriculteurs.

Investir dans ces talents locaux, c'est investir dans l'avenir de l'Afrique. C'est aussi, pour vous, chers investisseurs français, l'opportunité de participer à une aventure humaine et économique passionnante, porteuse de sens et de progrès pour tout un continent. Cela signifie soutenir des projets innovants, accompagner ces entrepreneurs dans leur développement, leur apporter votre expertise et vos réseaux, et favoriser l'émergence d'un écosystème fintech africain diversifié et résilient.

Repensons notre approche de la fintech en Afrique. Osons explorer de nouveaux horizons, soutenir les entrepreneurs locaux et contribuer ainsi à bâtir un avenir plus juste et plus prospère pour tous les Africains. En diversifiant nos investissements et en misant sur l'innovation locale, nous participerons à la création d'un secteur financier africain plus inclusif, plus dynamique et plus durable, pour le bien de tous.

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Frédéric Labbe Chapuis est un serial-entrepreneur spécialisé dans les logiciels de sécurité des véhicules. Il partage sa vie entre l'Europe et l'Afrique – où il a vécu. Après avoir créé avec succès des entreprises dans le domaine de l’immobilier et de la vente, il est depuis 2007 PDG de la Silotec (Société Internationale de logiciels techniques), société luxembourgeoise spécialise dans le domaine de la sécurité routière via la création de centres de contrôle et la sécurisation des documents. Il exprime son point de vue et son expérience sur l’actualité des entreprises et des entrepreneurs made in France. Domaines de prédilections : success stories, start up, sécurité et entreprises vertes.

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