La plus grosse menace pour l’Europe et le monde : l’hégémonie chinoise

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Par Daniel Moinier Publié le 21 mai 2019 à 11h48
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@shutter - © Economie Matin

Alors que les élections européennes sont là, presque tous les partis se débattent pour imposer leur idéologie. Et pourtant la plus importante menace, face une Europe déchirée, c’est la Chine qui tisse sa toile irrémédiablement par tous les moyens, scientifique, économique, financière, numérique, tellurique...

L'Europe exclue du jeu mondial

Les trois blocs mondiaux, Etats-Unis, Russie, Chine se regardent, se jaugent, se mesurent avec des rapports de force qui penchent de plus en plus vers ce dernier pays.

Et l’Europe ? Vu les distensions actuelles et sa stagnation, elle semble complètement exclue du « jeu » mondial, si ce n’est comme allié éventuel.

Les Etats-Unis ont monté une toile d’encerclement pour obtenir un leadership mondial dans presque tous les domaines, militaire (800 bases militaires/monde : « Le gendarme du monde »), les nouvelles technologies du WEB (GAFA : Google, Apple, Facebook, Amazon) les routeurs (Sisco) satellitaires (Google Maps, GPS,…et surtout la Space Force Américaine = 80 satellites militaires) informatique (Microsoft, IBM, HP, Oracle), Télécom (ATT, Vierzon)……

L’URSS qui a été longtemps leur grand rival avec la guerre froide, n’est plus directement l’ennemi héréditaire. Elle reste encore dans la « course » grâce à sa supériorité nucléaire, son potentiel militaire conventionnel et une certaine diplomatie intelligente (surtout au Moyen-Orient). Mais avec sa faible démographie et sa faiblesse économique, elle ne pourra pas conserver longtemps sa supériorité militaire stratégique devant la Chine et son rôle de contrepartie vis-à-vis des Etats-Unis.

Il reste encore une confrontation mais beaucoup moins vive entre les Etats-Unis et la Russie à moyen terme, mais par contre à plus long terme entre la Chine et les Etats-Unis, sans négliger le partenariat exceptionnel entre la Russie et la Chine.

Cette structure triangulaire reste temporaire compte tenu de leur personnalité stratégique et de l’évolution de chacun des composants. La Chine avec sa population, sa puissance, sa volonté d’hégémonie va devenir et devient même déjà le principal « concurrent » des Etats-Unis.

Un consensus bipartisan sur la nécessité d’affronter la Chine mais aussi la Russie

Trump l’a bien compris, mais aussi tout son gouvernement et même les démocrates. C’est une des rares chose sur lesquelles les deux parties soient d’accord. Il existe donc bien un consensus bipartisan sur la nécessité d’affronter la Chine mais aussi la Russie. Encore plus pour les démocrates qui veulent punir Moscou de son aide « supposée » à l’élection de D.Trump.

Depuis peu, l’administration Trump et ses gouvernants réalistes considèrent maintenant la Chine comme principal adversaire de l’hégémonie mondial et principal défi stratégique à relever.

Ils sont convaincus que la puissance américaine est encore très supérieure à celle de la Chine et même de la Russie et qu’ils ont encore pour un bon moment à être maître de l’ordre mondial, en restant forts et attractifs pour de nombreux états.

Il est vrai que la Chine a peu d’alliés, reste encore faible militairement et ils considèrent la Russie comme un pays en déclin qui a accepté un mariage de complaisance qui ne pourra pas durer très longtemps.

Et pourtant le partenariat russo-chinois constitue un modèle rare dans l’histoire. C’est deux puissances limitrophes partageant un voisinage commun, essaient de conserver chacune des avantages sans gêner leurs intérêts fondamentaux. La Russie est le seul pays à ne pas avoir peur de la Chine. Mais la Chine a une stratégie intelligente et fine, elle lui confère par sa présence un statut de grande puissance, contrairement à l’occident qui a échoué. Il est vrai que la Russie a besoin de la Chine et de ses bonnes relations, y compris sur le plan économique. C’est 16% du chiffre d’affaire russe, deux fois plus important qu’avec l’Allemagne. Ces relations positives peuvent même s’amplifier si les relations Chine-USA s’en trouvaient plus conflictuelles. Sauf si la Chine devenait plus hégémonique en traitant la Russie comme un partenaire de second plan, ce qui vu d’aujourd’hui, ne risque pas d’arriver.

Le rapprochement de la Russie avec l’Europe a été un échec. La « Grande Europe » englobant les deux dans une même communauté politique ne semble plus pouvoir exister dans un avenir prévisible. Même si la Russie ne veut pas tourner le dos à l’UE, elle veut garder son rôle de grande puissance mondiale indépendante en lien avec les communautés atlantiques et pacifiques.

La Chine avance...

La Chine surtout depuis la crise de 2008 et la révolution tisse sa toile, avance sans crier gare. Elle a déjà annexé les trois-quarts de l’Afrique économiquement et financièrement. Cela a été aussi un accélérateur de son ambition consistant à faire entrer le monde dans une nouvelle ère post-occidentale.

Pour répondre à son encerclement par les Etats-Unis, la Chine développe une influence grandissante parfois invasive sur des terrains très variés, en apparence sans lien direct. Mais à y regarder de près, cela ressemble à un plan minutieusement étudié, s’accompagnant de discours gagnant-gagnant sous forme de coopération, puis des contraintes pour suivre leurs règles.

La Chine ne veut pas affronter la concurrence, elle cherche plutôt qu’il n’y en ait pas. Elle veut maîtriser la « data » en prenant la tête de l’innovation dans l’intelligence artificielle.

Pour se sortir du joug américain, elle vient de lancer la route de la soie qui passera largement au nord mais juste après, elle va mettre en place une autre plus au Sud.

Elle a créé aussi un groupe international Huawei qui devrait dépasser à terme tous les ténors américains, coréens, etc… D’ailleurs Donald Trump ayant pressenti les dégâts pour son pays essaie par tous les moyens de lui barrer le chemin, en l’interdisant aux USA ainsi que ZTE Télécom. Aux toutes dernières nouvelles, Google vient de priver Huawei de son système d’exploitation androïde, ce qui va l’obliger de se passer d'applications phares comme YouTube, Gmail, Google Maps ou le navigateur Chrome. Un problème aussi pour les clients actuels de Huawei (17% de part de marché en France). Avec cette directive présidentielle, les principaux fabricants de semi-conducteurs européens et américains devraient être également touchés.

Mais ce qui est aussi inquiétant, c’est les 7 bases militaires installées par la Chine, dans les iles annexées de la mer de Chine, à Djibouti et dernièrement dans l’Arctique.

Mais la seule réelle possibilité d’avoir un conflit ouvert entre ces deux puissances, c’est que la Chine envahisse Taiwan. Les Etats-Unis ne pourraient pas rester sans répondre.

Alors que l’Europe aurait besoin d’être au meilleur de sa forme pour rivaliser, minimiser le besoin d’hégémonie de ces deux grandes puissances mondiales et surtout la Chine, elle se divise, se déchire entre des tendances et mouvements divers, tels le ou les : populistes, patriotes, eurosceptiques, altermondialistes, collapsologiques ou collapsosophiques, antimondialistes, véganisme, les apôtres de la décroissance, les verts extrêmes et j’en oublie certainement.

La chine pendant ce temps tisse sa toile inlassablement avec une stratégie bien huilée. L’Afrique est son « terrain de jeux » privilégié du moment.

Deux spécialistes français des relations européennes et internationales ont établi une analyse très détaillée et documentée de la position de l’Europe et de l’hégémonie chinoise en plein développement : Le premier Charles Zorghibe dans sa dernière thèse :

« Le concept de politique africaine de la Chine va de l'aide solidaire à l'action mercantiliste en passant par la stratégie d'influence pour la construction d'un nouvel ordre mondial, permettant à la Chine de s'offrir un environnement favorable et un meilleur levier diplomatique à son émergence en dehors de la région où elle se trouve. Comme les visées sont diversifiées, les méthodes sont muItidimensionneIles. C'est pourquoi la politique africaine de la Chine d'aujourd'hui nous montre un visage bien différent de ce qu'il était par le passé. L'Afrique ne serait-elle pas un prisme à travers lequel se projette la puissance de demain de ce géant asiatique ? Le Grand Bond actuel de l'empire du Milieu en Afrique trouve ses racines et sa logique dans l'impératif du contexte structurel, international comme domestique ».

Le deuxième Jean-Claude Empereur concernant l’Europe :

« Les européens ont souscrit béatement au grand récit de la mondialisation heureuse et de la fin de l’histoire. Ils ont banni de leurs discours les notions de conflit et de puissance. Ils se sont aveuglés en privilégiant la servitude volontaire sur la prise de conscience des réalités.

        1. La perspective des élections européennes, la négociation sur l’Accord de partenariat transatlantique, dans un climat général de méfiance envers les institutions européennes, devraient inciter médias et responsables politiques à s’interroger sur les concepts de puissance, d’indépendance et de souveraineté appliqués à la construction de l’Union européenne et à rompre enfin avec une stratégie d’évitement sémantique qui a prévalu jusqu’à maintenant dans l’expression de ces concepts.

La question de la puissance de l’Europe est essentielle mais à deux conditions :

  • Que les Européens s’entendent sur son contenu ;

  • Qu’ils la considèrent non comme une fin en soi mais comme l’élément d’un concept plus riche : la souveraineté européenne.

Si la réconciliation des Européens avec la puissance est une nécessité, l’impératif essentiel reste la conquête de la souveraineté, c’est-à-dire la volonté de maîtriser un destin collectif. La puissance n’est qu’un élément de la souveraineté, un chemin d’accès ; elle n’a pas de valeur en soi. C’est un concept relatif, la souveraineté est un concept absolu.

La puissance se définit par un contenu, la souveraineté par une vision ».

En conclusion :

Il serait temps que l’Europe se fédéralise pour parler d’une seule voix pour préserver face à la Chine (et même l’Amérique), sa démocratie, sa prospérité économique qui en ont bien besoin, pour conserver ses droits individuels par rapport à des droits collectifs. Une Europe regroupée, forte pourrait encore être actrice de son destin, influer sur le cours de l’évolution du monde. C’est l’ultime défi que nous impose la Chine avant qu’il ne soit trop tard.

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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